(La Nouvelle Expression 16/02/2010)
Malgré les joint-ventures menés par les SNH avec les opérateurs, et le code pétroliers reformé, la chute de la production semble inexorable.
Cette année encore, le gouvernement camerounais va devoir faire face à un tassement de ses recettes pétrolières. L’ensemble des gains du secteur pétrolier devraient s’établir, selon les prévisions budgétaires, à 407 milliards, dont 317 milliards de redevances reversées au trésor public par la Société nationale des hydrocarbures, et 90 milliards d’impôts sur les sociétés pétrolières.
En 2009, le gouvernement avait encaissé 504 milliards (contre les prévisions de 519 milliards) dont 314 milliards de redevance SNH et 190 milliards d’impôts sur les sociétés pétrolières. Des chiffres qui suffisent à prouver que le déclin du secteur pétrolier camerounais se poursuit, aggravé par les fluctuations défavorables du dollar, principale monnaie de cotation.
Au-delà de la faiblesse du dollar et de la décote due à la qualité peu prisée du brut camerounais, cette situation résulte de la baisse continue de la production pétrolière camerounaise depuis près de 10 ans. La production pétrolière camerounaise, démarrée en 1977, a atteint son pic en 1986, avec plus de 10 millions de tonnes produits en un an, soit une moyenne de 175 000 barils par jour. La baisse de la production s’est accélérée au début des années 1990. En 1995, elle tombait à 5 millions de barils par an.
Les obligations
En 1994, le gouvernement fait prendre des mesures incitatives en réaménageant les contrats pétroliers à l’avantage des multinationales, pour les encourager à développer les champs marginaux (les domaines pétroliers de faible potentiel). Cette reforme de la législation pétrolière est accompagnée de mesures d’assouplissement pour l’obtention de permis de recherches. Frontalier des grands producteurs de la région du Golfe de Guinée, le Cameroun misait sur la découverte d’importantes niches en on shore à la frontière tchadienne, où des données sismiques acquises ont été confiées à une firme chinoise. Pour l’instant il ne s’agit que de perspectives.
La restauration de la souveraineté du Cameroun sur la presqu’île de Bakassi a également redonné espoir aux acteurs camerounais du secteur pétrolier. Ainsi, le Bloc pétrolier dit Iroko a déjà été attribué à la firme Addax pour les recherches, suite à la libération de Bakassi. « Les négociations sur le bloc Iroko ont été rendues possibles à la faveur de l’accord intervenu entre le Cameroun et le Nigeria sur le tracé de la frontière maritime entre les deux pays, dans le cadre de la mise en oeuvre de l’arrêt de la Cour Internationale de Justice de la Haye du 10 octobre 2002 » explique Adolphe Moudiki, le directeur général de la société pétrolière camerounaise.
Au titre de ce contrat, explique la Snh, la société Addax s’engage à réaliser des activités de recherche dans cette zone, pour une durée de trois (03) ans. Les obligations de travaux prévoient notamment, l’acquisition, le traitement et l’interprétation de 22 Km² de données sismiques 3D et le forage d’un puits d’exploration à une profondeur d’au moins 1100 mètres. Les obligations financières correspondant à ce programme des travaux s’élèvent à 17,5 millions de dollars US. Ce sera une des premières opérations pétrolières du Cameroun dans la zone de Bakassi, anciennement occupée par le Nigeria.
Joint-ventures de prospection
Dans l’urgence, la Société nationale des hydrocarbures, entreprise publique créé en 1980, tente d’enrayer la chute. Dans son rôle, elle est chargée de la promotion, valorisation et suivi des activités pétrolières sur l’ensemble du territoire national; de la gestion des intérêts de l’État dans le secteur pétrolier; et de la commercialisation, sur le marché international, de la part de la production nationale de pétrole brut qui revient à l’État.
Fort de ces prérogatives, l’entreprise publique multiplie les contrats de partage de la production, et s’engage dans les joint-ventures de prospection et d’exploitation avec les compagnies étrangères. Le Snh a ainsi pris des participations de 20% dans les associations d’exploration production avec des firmes telles que Total E&P Cameroun, Mobil Producing Cameroon Inc, Perenco Cameroon; Pecten Cameroon. C’est dans ce sens par exemple que Total E&P Cameroun et la Société nationale des hydrocarbures (SNH) ont signé le 14 juillet 2009 un contrat de partage de production.
Ce contrat, d’une valeur de USD 10 Millions autorise Total E&P Cameroun à explorer le bloc offshore de Lungahe dans le bassin de Rio-del-Rey, région du Sud-ouest du Cameroun. Le pétrole puisé est partagé et la SNH, commercialise sa part sur les marchés internationaux. Selon la SNH, on observe un regain d’intérêt des compagnies pétrolières internationales pour le domaine pétrolier camerounais qui, compte 11 permis et autorisations de recherche, pour une superficie de 14 522,28 km² ; et 14 concessions et autorisations d’exploitation, pour une superficie de 2 248,84 km². Ce « regain d’intérêt » ne se traduit curieusement pas par une inversion de la tendance baissière de la production pétrolière.
Liquéfaction du gaz naturel
Si cette méthode n’a pas encore permis de relancer la production, les perspectives du secteur gazier restent assez prometteuses et augurent d’un renouveau du secteur des hydrocarbures. Selon les chiffres officiels, les réserves de gaz naturel prouvées s’évaluent à 156 milliards de m3, ce qui représente déjà quelque trente ans d’exploitation. A cela, il faut ajouter 110 milliards de m3 supplémentaires estimés par les firmes spécialisées. Ces chiffres, d’ailleurs, ne correspondent qu’au gaz non associé, extrait du sous-sol en l’état. Car, le Cameroun étant producteur de pétrole, ses champs pétroliers évacuent annuellement dans la nature, et en pure perte, environ 1 milliard de m3 de gaz naturel torché.
La technologie permettant de récupérer ce gaz inutilement brûlé existe, et les autorités sont décidées à s’en procurer d’autant que l’environnement est perturbé lors de la combustion. Au total, estime la Société nationale des hydrocarbures, « les réserves prouvées sont de l’ordre de 157 milliards de m3 pour un potentiel de 270 à 300 milliards de m3. Néanmoins, les opportunités de monétisation de cette ressource se profilent à l’horizon, aux plans national et sous-régional. Des axes de développement ont été identifiés, notamment dans la génération de l’énergie électrique, l’approvisionnement des industries en gaz et la production de Gpl (variété consommé par les ménages) ».
D’ores et déjà, on sait que le projet de centrale thermique de Kribi sera alimenté par le gaz naturel découvert à profusion sur le littoral camerounais. D’autre part, un accord a été signé avec la Guinée équatoriale qui dispose des installations techniques appropriées pour la liquéfaction du gaz naturel camerounais.
par François Bambou
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