(L'Observateur Paalga 21/07/2011)
Il est des événements dans un pays qui le font régresser démocratiquement à tout le moins, font douter de la réalité de ce mode de gouvernement. La canonnade nationale du 19 juillet dernier sur la résidence privée du président Alpha Condé à Conakry dans le quartier huppé de Kippé est de ceux-là.
6 mois après son investiture le 21 décembre 2010, l’ex-champion de la Coalition arc-en-ciel essuie là sa première dure épreuve, par le feu, de l’exercice du pouvoir d’Etat. Que ce soit une tentative de régicide ou un vrai putsch, le résultat aurait été le même si les assaillants étaient parvenus à leur fin, car on voit mal comment dans cette Guinée, qui est en balbutiement démocratique, aurait pu poursuivre sa route de l’Etat de droit si le président Alpha avait été mis hors jeu.
Dans l’attente que les enquêtes en cours éclaircissent ce raid sur le domicile du premier magistrat, de nombreuses questions turlupinent les esprits :
- pourquoi le Président Alpha Condé n’a pas livré les noms des deux chefs militaires et de la trentaine de militaires, proches de Sékouba Konaté, qui seraient au devant de l’affaire ?
- Est-ce parce que ces derniers portent des noms ethniquement marqués ?
Car dans une Guinée où les relents communautaires sont périodiquement exacerbés, jeter des noms de Peulhs ou de Malinkés en pâture pourrait, dans le premier cas, mettre le pays en ébullition, dans le second cas hypothéquer une victoire du camp présidentiel aux prochaines législatives.
24 heures après ces malheureux événements, la clameur de désapprobation et de soutien qui a afflué vers le palais de Sékoutourya est grande : UA, Occidentaux...
Une réaction qui aura retenu l’attention de l’opinion publique est celle de Cellou Dalein Diallo, président de l’Union des forces de changement de Guinée (UFDG) et opposant n°1 au Président Alpha Condé.
Que ce soit avant ou surtout après la présidentielle, les relations entre le chef de l’Etat et son ex-challenger étaient si exécrable, qu’à peine ils se saluaient, tout juste observait-on un armistice de façade lors des rencontres "obligatoires" tel le dialogue interguinéen de Ouagadougou. On se rappelle d’ailleurs l’ambiance sibérienne, palpable, entre les deux lors de la signature du protocole de bonne conduite en septembre 2010 dans la capitale burkinabè.
Régulièrement du reste, que ce soit dans l’hebdomadaire Jeune Afrique ou sur les antennes de RFI, les deux personnalités se crêpaient le chignon, ce qui d’ailleurs les déconsidérait aux yeux de la communauté internationale. Elles ne sont pas obligées de s’embrasser chaque matin, mais tout de même....
Alors voir un Cellou Dalein Diallo faire chorus avec tout le monde pour condamner le coup d’Etat manqué du mardi 19 juillet 2011 à quelque chose de princier...
C’est une élégance républicaine qu’on aimerait constater aussi au Burkina Faso. La crise à tiroirs qui a secoué les fondements du Faso offrait justement à nos opposants l’occasion de montrer qu’ils ont la stature d’homme d’Etat. On peut ne pas aimer Blaise Compaoré, on peut vouloir son fauteuil, ce qui est légitime pour un opposant, mais n’est pas être d’accord avec ce qu’on fait à la République via la personne du chef de l’Etat.
Lorsqu’on s’attaque aux symboles de l’Etat, lorsqu’on s’en prend au Président du Faso, c’est à une institution républicaine qu’on en veut. Condamner un tel acte, c’est avoir à l’esprit que demain on peut soi-même être chef et être victime, puisqu’en tant qu’opposant, on peut un jour assumer le pouvoir suprême. Ce n’est pas défendre Blaise, c’est refuser des choses inacceptables.
Hélas, on n’en est pas encore là au Faso, où les rapports politiques sont personnalisés alors qu’on doit penser à la Nation ; car, dans le cas d’espèce, seul un Hermann Yaméogo a frôlé cette attitude républicaine.
Cellou Dalein Diallo a toujours été constant dans son comportement d’homme à stature d’Etat, et vu son âge (59 ans), il ne peut que se mettre en réserve pour la République et attendre son heure, en 2015 ou 2020 !
Par Zowenmanogo Dieudonné Zoungrana
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