mardi 19 juillet 2011

Gabon -Et si l’Armée Française quittait le Gabon ?

(Le Nouvel Observateur 19/07/2011)

L’Armée Française a-t-elle le droit d’occuper en quelque sort le Gabon ? La question mérite d’être posée dans la mesure où un Gabonais a décidé de faire une grève de la faim à Libreville, contre la présence militaire de l’Hexagone en terre gabonaise. Au lieu de traiter par le mépris ou l’indifférence l’acte d’un jeune membre du Conseil Économique et Social de notre pays, consistant à aller s’enchainer sur la Place de l’Indépendance pour se faire entendre, il serait souhaitable d’avoir au minimum, un début de réponse de la part des autorités françaises malgré le racisme géopolitique dont nous sommes les victimes.
1. Qu’est-ce qui justifie des Accords de Défense secrets ?
Le Gabon est-il un pays qui ait jamais déclaré la guerre à la France pour que son sol soit militairement parcouru par les bruits de bottes gaulois ? Et cela bien entendu, jusqu’à la dernière goutte ou le dernier gramme d’uranium ! Le Gabon est-il un pays terroriste qui exigerait l’envoi de contingents de légionnaires venant « chasser » l’islamiste barbu dans les forêts équatoriales ? Et, le Gabon a-t-il violé des conventions internationales ou des décisions onusiennes, ce qui expliquerait que les armées françaises se comportent au milieu de nous, comme en territoire conquis ? Il semble que non.
Nous avons au minimum le droit de savoir la Vérité car il s’agit de notre pays. Nous n’en avons pas d’autre.
De quel droit, le Gabon est-il « occupé militairement », quoiqu’on en dise ? Car, il s’agit bien d’une occupation militaire et non d’une coopération bilatérale en la matière. Si c’était une coopération et non l’usage d’un droit du plus fort, il y aurait une caserne de « l’Armée Gabonaise » à Fréjus, Toulon ou au Havre !? Quel est donc le fondement juridique de la présence militaire française au Gabon ?
Nous ne sommes pas attaqués et les Gabonais (qui ne sont pas nombreux) n’ont pas l’intention d’entrer en guerre les uns contre les autres. Nous voulons juste que la Famille Bongo quitte le pouvoir et que les piliers de l’ancien régime d’Omar Bongo ne viennent pas reproduire une nouvelle version du Bongoïsme, après s’être emparés de l’appareil d’état gabonais. En effet, le Gabon ne veut pas que de l’alternance politique, il veut surtout le développement économique. Or, ce dernier n’est pas compatible avec la Françafrique et la présence d’une Armée étrangère chargée de nous empêcher d’en finir avec cette maffia. Il s’agit de déverrouiller le système gabonais et libérer les énergies créatrices de richesse pour tous, nous voyons bien que l’Armée Française nous empêche de le faire.
L’Armée Française agit sur nos esprits comme un pistolet à la tempe qui vous menace de vous faire sauter la cervelle si vous revendiquer vos droits les plus élémentaires, malgré son hypocrisie humanitaire dont nous n’avons pas besoin au fond. Pourquoi ? Parce tout est à la France au Gabon et rien n’est véritablement aux Gabonais. C’est que, les Gabonais veulent devenir riches. Et il ne faudrait pas le dire ? Quelle misère, les soldats français seraient réduits à se comporter au Gabon comme des brigands ou des braqueurs qui empêcheraient les convoyeurs de « fonds de la République Gabonaise » de donner le « magot » de notre nation à celles et ceux à qui il est destiné prioritairement.
Ce faisant, ces « agresseurs » de la « diligence Gabon » ne sont plus les vaillants défenseurs de la France mais d’intérêts privés qui ne servent même pas aux Français. La preuve ? TOTAL ne paie même pas ses impôts en France, tout le monde le sait. Quel intérêt un soldat Français a-t-il donc de sauter sur Port-Gentil notre ville pétrolière comme en 1990 pour ramener un dictateur comme Omar Bongo (Paix à son âme) au pouvoir, puisque précisément, TOTAL ne paie même pas les impôts dont il devrait s’acquitter auprès du Trésor Français mais dissémine selon une enquête récente, une hyper fortune dans les paradis fiscaux ? Ces paradis que le Président voulait voir disparaitre en 2008 en pleine crise financière mondiale.
2. Les citoyens Gabonais et Français sont les dindons de la farce militaire française au Gabon
Que dit par exemple M. Le Floch Prigent dans le fameux film « Françafrique II – L’argent Roi » ? Et bien, que le pétrole gabonais qui est très bon marché pour Elf (aujourd’hui TOTAL) coûte à l’extraction 4 à 5 dollars y compris la part qui revient au Gabon. Mais voilà, TOTAL revendrait notre pétrole pour quatre-vingt ou une centaine de dollars sur le marché mondial, c’est à vous donner le vertige : TOTAL – ELF dépense 4 ou 5 dollars le baril, mais va gagner entre 80 $, 100 $ ou 150 $ par la suite. Le différentiel est énorme pour le Gabonais qui doit se contenter de quelques misérables dollars le baril et pour le Français qui ne verra jamais la couleur des impôts de TOTAL – ELF dans le budget français. Bien au contraire, TOTAL va même répercuter à la hausse dans les stations services toute fluctuation à la hausse du prix du pétrole.
Il est clair que le soldat français rémunéré avec les impôts des Français, braque plus ou moins le pétrole du Gabon en protégeant les installations de TOTAL (qui ne paie pas cependant ses impôts à l’état Français. Nous ne sommes « que » des Africains qui n’ont peut-être pas l’esprit cartésien des Français de France, mais chacun peut reconnaitre ici, qu’il y a un mystère tout de même : Ou va l’essentiel de l’argent du pétrole gabonais ? Dans les paradis fiscaux, dans le financement des partis politiques français, dans les opérations clandestines ou alors dans les équipements de l’Armée Française ? C’est impossible pour le dernier point dans la mesure ou les avions mirages ou rafales français semblent régulièrement à court de munitions pour aller bombarder la Libye dans cette fameuse opération qui a été baptisé « d’Aube d’une Odyssée ».
3. Le Gabon, en guerre contre la France ?
S le Gabon est en guerre contre la France, au point de subir une occupation qui ne dit pas son nom, il serait honnête que l’Élysée consulte au moins son parlement et que le Parlement Gabonais puisse se prononcer sur le sujet.
Nous osons également espérer que quelques membres influents de « l’intelligentsia française » comme Henry-Lévy, Finkielkraut ou Zeymour vont rappeler aux hautes autorités de leur pays, ces propos philosophiques de Rousseau et Hegel.
Dans son Contrat Social,Jean-Jacques Rousseau écrit : « La guerre n’est point une relation d’homme à homme, mais une relation d’État à État, dans laquelle les particuliers ne sont ennemis qu’occasionnellement, non point comme hommes ni même comme concitoyens mais comme soldats. (on a rien vu des 30 000 soldats Ivoiriens contre les 1700 guerriers Français de la Licorne Française et ce ne sont donc pas les soldats Gabonais qui vont donc faire la différence contre les combattants d’élite du 6eme BIMA de Libreville ou Port-Gentil, malgré leur faible nombre relatif). Non point comme membres de la patrie, mais comme ses défenseurs. Enfin (pour Rousseau) chaque État ne peut avoir pour ennemi que d’autres États, et non pas des hommes, attendus qu’entre choses de diverses natures, on ne peut tirer aucun vrai rapport ».
Au Gabon, nous avons la désagréable impression que l’Armée Française n’est pas en guerre contre l’État gabonais mais contre les citoyens Gabonais, comme ailleurs, contre les ivoiriens, les Tchadiens ou naguère les Centrafricains. Nous ne savons pas ce que le 6eme BIMA fait au Gabon et nous supposons qu’elle est comme positionnée contre le Peuple Gabonais pour nous empêcher de choisir notre destin.
Dans une guerre purement interétatique, les individus concernés n’ont aucun motif de se haïr et l’État vainqueur doit cesser de faire du mal aux sujets de l’État ennemi, dès que celui-ci avoue sa défaite. La violence se limite aux chocs des armées.
La présence militaire française sur le sol africain en général et gabonais en particulier au droit international européen présent dans les textes les plus anciens. Avant la PREMIÈRE GUERRE MONDIALE, les relations militaires entre pays était régi par le droit de la guerre. On a prévu les formes pour la déclarer, on a interdit l’emploi de certains moyens et les modalités de l’armistice ou de la signature de la paix ont été réglementées. Bref, la guerre a été limité et légalisé mais rien n’était secret ou pour les seuls initiés.
Après le DEUXIÈME GUERRE MONDIALE, certaines choses sont devenues inacceptables. Tant de morts, tant de destructions matérielles, tant d’horreurs ne pouvaient plus être acceptés comme conformes au monde nouveau. La guerre ne devait plus être un épisode des rapports internationaux, elle devait être mise hors la loi. Les Français se sont même réconciliés avec les ennemis de toujours : le Peuple Allemand. L’occupation momentanée de l’Allemagne par les USA, la France et l’Angleterre ne devait servir qu’à la stratégie suivante : la guerre ou l’occupation militaire en tant qu’instrument de la politique n’était en aucune façon légale. Le problème est que cette évolution positive est restée cantonnée à la sphère occidentale. Il faudrait démocratiser l’illégalité de la guerre ou des occupations militaires pour que la « Civilisation »ne s’arrête plus qu’au sud de la Méditerranée.
Le Gabon n’a pas déclaré la guerre à la France et aucun pays voisins ou éloigné n’a l’intention (à notre connaissance) d’entrer en guerre contre le Gabon. Les citoyens gabonais doivent donc se réveiller et commencer à exiger au Gouvernement Français un calendrier de départ du 6eme BIMA de notre cher pays. Ce n’est pas négociable sinon il n’ y aura pas de futur possible entre la France et le Gabon.
Bruno Ben MOUBAMBA

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