Débuté à La Haye le 22 novembre 2010, le procès de Jean Pierre Bemba a pris un nouveau tournant : c’est maintenant au tour de la défense du célèbre natif de la province de l’Equateur de présenter son dossier. Quand on comparait devant la CPI, difficile de sortir libre quand on est accusé de crimes sexuels, de crimes de guerre et de crimes contre l’humanité, mais, par avocats et témoins à décharge interposés, l’illustre prisonnier ne veut se laisser conter.
Cruel destin que celui de Jean Pierre Bemba ! Né avec une cuillère d’or dans la bouche (il est en effet le fils du milliardaire Jeannot Bemba Saolona, qui a fait fortune du temps de Mobutu), il fut aussi le vice-président de la République démocratique du Congo (RDC) de 2003 à 2006. Et paf ! Un funeste jour, son passé le rattrape, et le procureur de la le Cour pénale internationale, Moreno Ocampo, qui salivait depuis longtemps à l’évocation de son nom et piaffait d’impatience quant à l’éventualité de son arrestation, lève le verre de la victoire : Jean Pierre Bemba, cette force de la nature avec sa centaine de kilos et son mètre 90, est arrêté à Bruxelles le 24 mai 2008 ; et curieusement, ce n’est pas pour la guerre dans son pays, la République démocratique du Congo, qu’il est alpagué, mais pour les nombreuses incursions de ses troupes en Centrafrique, dont l’objectif avoué était de soutenir le régime d’Ange-Félix Patassé.
Lors de ces interventions, ses milices se sont livrées à des exactions : vols, viols, pillages. Le mot «cannibalisme» a même été prononcé dans le témoignage qui fait froid dans le dos à ces familles pygmées dont des femmes auraient été contraintes de cuisiner puis de manger les corps de leurs maris.
En attendant, s’il y a bien quelqu’un à avoir profité de l’éloignement de Jean-Pierre Bemba, c’est l’actuel président de la RDC, Joseph Désiré Kabila : l’illustre prisonnier de la CPI était en effet son véritable challenger et perturbait sérieusement ses nuits. Pendant la présidentielle de 2006, les 42% de suffrages qu’il a obtenus au second tour n’étaient pas usurpés. D’ailleurs, pour beaucoup, sa réputation est restée intacte, malgré le bagne et la distance.
Certaines mauvaises langues font même remarquer qu’il aurait été mis au frais par les Occidentaux afin de permettre à l’actuel chef de l’Etat congolais de gouverner en paix. Certainement que les 230 heures d'audience au tribunal de La Haye pour présenter les 63 témoins ne sont donc pas de trop pour le chef de l’Etat congolais. Avec la comparution des témoins à décharge, le dernier virage est amorcé pour l’enfant gâté, qui n’aura plus qu’à attendre la sentence de la Cour.
Issa K. Barry
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