(Le Pays 14/08/2012)
Au Gabon, l’événement politique majeur du week- end écoulé a été le retour au pays de l’opposant André Mba Obame (AMO). Parti du Gabon le 11 juin 2011 pour des soins en Afrique du Sud, AMO est revenu au bercail le 11 août dernier. Après plus d’une année hors des frontières nationales, son pays lui manquait visiblement et les militants de son parti dissous, l’Union pour la nation (UN), étaient aussi presqu’orphelins.
En témoigne l’accueil populaire et enthousiaste qui a été réservé au docteur en Sciences politiques et ancien cacique du régime du feu Omar Bongo Ondimba. Aussitôt rentré, il a mis les pieds dans les plats de la politique en appelant à la tenue d’une conférence nationale, seul moyen, à son avis, « de sortir le pays de la crise sans verser de sang ». Sur ce plan, il a repris à son compte une demande de la société civile gabonaise qui, le 8 août dernier, formulait la même requête au régime de Ali Bongo Ondimba. Pour se donner des chances de voir cette revendication aboutir, la société civile entend associer les confessions religieuses pour faire pression sur le gouvernement. André Mba Obame ne compte pas aussi rester inactif pour se faire entendre du pouvoir, bien qu’il doive observer une période de convalescence comme le lui ont, sans doute, recommandé ses médecins. Mais il n’est pas certain que leurs conseils soient suivis par le patient de luxe qui a déclaré qu’il redoublera d’efforts dans son opposition farouche à Ali Bongo Ondimba, son ami d’hier devenu aujourd’hui son pire ennemi. La présidence a beau dire que le retour de l’opposant est un non-événement, il n’en demeure pas moins qu’il n’a pas été indifférent à ce qui s’est passé et surtout à ce qui s’est dit. A défaut de lui interdire de rentrer comme c’est le cas dans les républiques bananières, le pouvoir l’a laissé revenir pour sans doute mieux le tenir en laisse avec les poursuites judiciaires engagées à son encontre pour trouble à l’ordre public après qu’il s’est autoproclamé président en janvier 2011, en estimant être le véritable vainqueur de la présidentielle de 2009. Mais cela semble ne pas effrayer l’enfant terrible de la politique gabonaise. Outre la revendication d’une Conférence nationale souveraine (CNS), AMO a jeté une pierre dans le jardin du Palais de front de mer en imputant au régime des massacres à Port Gentil lors de la présidentielle. La surenchère verbale a commencé et a toutes les chances de continuer vu que le régime n’envisage pas de faire la moindre concession par rapport à la tenue d’assises nationales. A ses vis-à-vis, il ne cesse de marteler qu’il n’y a pas de crise au Gabon qui nécessiterait ce genre de rencontre qui a eu ses heures de gloire dans certains pays africains au début de la démocratisation dans les années 90. On assiste pour le moment à un langage de sourds et chacun campe sur ses positions. Qui du pouvoir ou de l’opposant fera des concessions dans l’intérêt du pays ? Là est toute la question et il faut craindre que la confrontation qui pourrait naître de ce bras de fer ne comporte beaucoup de dangers pour la paix sociale.
Séni DABO
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