(Le Figaro 01/02/2013)
Le dialogue national souhaité par la France se heurte à deux
questions : avec qui parler, et de quoi.
«Je suis optimiste. Nous allons
trouver les ressorts nécessaires pour nous parler et trouver des compromis.» Ce
membre du cabinet du président malien de transition, Dioncounda Traoré,
l'assure: «La mise en place de la Commission nationale de réconciliation est
dans les tuyaux. C'est pour bientôt.»
Après l'appel lancé mercredi par la
France aux autorités maliennes, Dioncounda Traoré a affiché sa disponibilité
pour le dialogue. En précisant que, de tous les groupes armés présents au nord
du Mali, seul le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) peut être
un interlocuteur légitime, «à condition qu'il renonce à toutes ses prétentions
territoriales».
Les indépendantistes touaregs n'y étant pas prêts, le
dialogue risque de tourner court. D'autant que, pour ce collaborateur du
président malien, «les gens sont franchement remontés contre le MNLA. Je ne sais
pas comment ils pourront leur pardonner.» Dans le sud du pays, l'idée est
répandue que le MNLA est à l'origine de la crise, pour avoir pris les armes il y
a un an.
Sur la mise en œuvre de la Commission de réconciliation tant
attendue, la présidence ne donne «ni timing ni contours». Mais le dialogue
national est «un préalable nécessaire pour savoir qui veut quoi», dit un
officiel à Bamako.
Tiébilé Dramé, ancien ministre et président de la
Coalition pour le Mali (organisation de la société civile qui a œuvré ces
derniers mois pour promouvoir une solution négociée dans le Nord) revient de New
York et de Paris où il a rencontré «beaucoup de monde» pour «préparer l'avenir».
Selon lui, ce dialogue doit être le plus large possible: «Au-delà du MNLA, il
faut parler avec l'ensemble des communautés du Nord. De leur place, du
développement de ce territoire, des relations avec le sud du pays… Je vois une
conférence nationale intermalienne, où les représentants de toutes les
communautés discuteraient.» Une manière de respecter la société traditionnelle,
sa hiérarchie et ses grandes familles. Une manière aussi de contourner les
groupes les plus gênants.
Tiébilé Dramé, qui soutient les autorités de
transition, se dit prêt à parler avec le MNLA - «s'il accepte de revenir dans la
République», ce qui n'est pas le cas. Mais le collaborateur du président de
transition préfère les relais traditionnels, «une façon de marginaliser, de
contourner le MNLA».
L'enjeu de la décentralisation
Principale
piste pour préparer la réconciliation nationale: la décentralisation, qui permet
de donner davantage de pouvoir aux élus locaux. Un processus ébauché dès 1999:
«Elle a permis aux populations de prendre leurs affaires en main, soutient
Tiébilé Dramé, mais il faut chercher à l'approfondir.»
Il propose deux
voies: «On peut aller jusqu'à l'élection de l'exécutif régional, c'est-à-dire
des gouverneurs, si c'est ce que veulent les populations. Il y a surtout la
question du transfert des ressources et des compétences, pour que les élus des
régions aient de véritables pouvoirs.»
Cette forme de réponse aux
ambitions indépendantistes touaregs ne fait déjà pas l'unanimité au sein des
autorités politiques: «Personnellement, dit encore un cadre du ministère de la
Communication, ancien de l'Administration territoriale, je ne pense pas que ce
soit une question d'autonomie. La décentralisation ne peut pas régler les
problèmes: il s'agit d'abord de pauvreté et d'un manque de ressources.» Et de
conclure: «Les Touaregs ne se sont jamais adaptés.» La réconciliation nationale
promet d'être un long processus.
Par David Baché
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Figaro
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