lundi 18 février 2013

En Tunisie, le parti islamiste Ennahda cherche un compromis

(Le Monde 18/02/2013)
Les négociations devaient reprendre lundi 18 février, entre le chef du gouvernement tunisien, Hamadi Jebali, et les responsables des partis politiques pour tenter de trouver une issue à la crise à Tunis. En coulisses, la confusion et la fébrilité règnent autour de la nécessité de fonder une nouvelle majorité qui remplacerait la troïka, la coalition gouvernementale au pouvoir depuis octobre 2011, aujourd'hui enterrée.
Chaque jour, ou presque, à l'Assemblée, un député annonce son départ de la famille politique dont il est issu, au point que les "indépendants" sont en passe, désormais, de constituer le groupe parlementaire le plus important. Dernier épisode en date de cette effervescence : le secrétaire général du Congrès pour la république, le parti du président Moncef Marzouki, membre de la troïka, a annoncé sa démission pour créer... une nouvelle formation politique. Signe qu'une recomposition du paysage politique s'accélère.
Le parti islamiste Ennahda campe toujours sur son refus de voir se substituer à l'actuel gouvernement, qu'il domine, un nouveau cabinet composé de technocrates, réclamé par l'opposition et proposé par le premier ministre après l'assassinat de l'opposant de gauche Chokri Belaïd, le 6 février.
"ENNHADA VA BIEN"
Si Ennahda se dit prêt à céder sur quelques portefeuilles régaliens qu'il détient, comme les affaires étrangères et la justice, il n'est pas disposé à quitter complètement le navire. Quitte, pour cela, à s'opposer à son secrétaire général qui n'est autre que le chef du gouvernement, Hamadi Jebali. "Nous voulons plus de compromis avec plus de monde", assurait, samedi, Moaz Kheriji, le fils du président d'Ennahda, Rached Ghannouchi, et son chef de cabinet. Le parti islamiste cherche une issue, un cabinet mixte moitié politique, moitié technocrate, qui éviterait, aussi, la démission du premier ministre, dangereuse pour son unité. "Jebali est toujours notre candidat, mais nous avons d'autres options", affirmait Moaz Kheriji, au milieu d'une foule de sympathisants venus défendre la "légitimité" du pouvoir.
Ecrans géants, immense drapeau aux couleurs du parti, bus affrêtés en province, Ennhada n'avait pas ménagé sa peine, samedi, pour imposer une image forte et pacifique. De fait, la foule a défilé très calmement sur l'avenue Habib-Bourguiba, à Tunis, dont les abords étaient gardés par un service d'ordre vigilant. Mais avec quelque 10 000 manifestants, il n'est pas réellement parvenu à faire la démonstration de force qu'il escomptait. "Je suis venu pour défendre la légitimité, car, pendant cinquante ans, le peuple n'a pas pu choisir, et maintenant qu'on en a une, on veut la renverser !", tempêtait Salah Labidi, une chéchia, la coiffe traditionnelle tunisienne, fichée sur la tête.
Au micro, Rached Ghannouchi, s'est voulu rassembleur, en condamnant "toute forme de violence", et rassurant pour son électorat : "Ennahda va bien. Ennahda est la colonne vertébrale de la Tunisie. Il n'abandonnera jamais le pouvoir tant qu'il a la confiance des Tunisiens", s'est-il exclamé.

LE MONDE | 18.02.2013 à 12h20 Par Isabelle Mandraud (Tunis, envoyée spéciale)

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