(Le Figaro 26/02/2013) La secte islamiste nigériane a diffusé une vidéo de la
famille française enlevée au Cameroun.
Les ravisseurs de la famille française
enlevée le 19 février au Cameroun ont revendiqué lundi le rapt. Dans une vidéo
postée sur YouTube, le groupe islamiste nigérian Boko Haram assure détenir les
trois adultes et les quatre enfants et exige la libération de certains de ses
combattants. Dans une brève intervention au début du film, Tanguy
Moulin-Fournier, le père de famille, confirme avoir été capturé au Cameroun et
être en les mains de Jama'atu Ahlus Sunna Lid-Da'awati wal-Jihad, le nom
officiel de Boko Haram. «Ils veulent la libération de leurs frères au Cameroun
et ils veulent la libération de leurs femmes emprisonnées au Nigeria»,
déclare-t-il.
Dans un texte lu en arabe, un preneur d'otages affirme avoir
agi car «le président français a déclaré la guerre à l'islam et nous le
combattons partout», une référence à l'opération française au Mali. Le ravisseur
s'adresse ensuite au président nigérian, Goodluck Jonathan, demandant la
libération de militantes capturées, «si vous voulez que ces Français soient
libérés». Au président du Cameroun, il conseille: «Relâchez nos frères détenus
dans vos prisons, tous sans exception.» «Laissez-les partir rapidement ou vous
verrez que vous aurez affaire à nous, comme ces gens que nous détenons.» Une
exigence qui a surpris les autorités camerounaises, les prisonniers de Boko
Haram dans ce pays étant, au moins officiellement, rares. Le premier ministre
Jean-Marc Ayrault a confirmé lundi que le groupe Boko Haram détenait «une
famille française». Laurent Fabius a dénoncé des «images terriblement
choquantes».
Texte lu en arabe
C'est la première fois que ce
groupe, fondé en 2002, revendique un enlèvement. Jusqu'à présent, la secte, à
l'idéologie trouble, mais se disant proche du wahhabisme et des talibans
afghans, s'était fait remarquer en multipliant les attentats sanglants ou les
meurtres ciblés. Même si elle affirmait vouloir combattre les influences
étrangères et impies dans le nord du Nigeria, la secte s'en prenait plus au
pouvoir nigérian et à ses symboles qu'aux étrangers eux-mêmes. Ce kidnapping
marque donc un changement de stratégie pour la secte. La vidéo a les allures
typiques des productions islamistes. Les sept otages apparaissent devant un
drapeau noir frappé d'une sourate du Coran et d'un blason formé de deux
kalachnikovs entourant un livre. Ils sont sous la surveillance de deux
combattants noirs, masqués et munis de fusils automatiques tandis qu'un
troisième terroriste lit le texte. L'ensemble, ajouté à l'utilisation de
l'arabe, alors que Boko Haram publiait jusqu'à présent ses communiqués plutôt en
anglais ou en haoussa, la langue locale, renforce l'impression d'un
rapprochement de Boko Haram avec les groupes terroristes internationaux, à
commencer par Aqmi.
Selon plusieurs spécialistes, les raisons de cette
nouvelle tactique traduiraient l'influence d'al-Qaida. Boko Haram pourrait par
là chercher à endiguer la puissance grandissante d'un autre groupe terroriste
nigérian: Ansaru. Présentée comme une scission de Boko Haram, cette milice s'est
fait remarquer ces dernières années en multipliant les rapts d'étrangers. Ansaru
détient actuellement huit personnes, dont l'ingénieur français Francis
Collomp.
Par Tanguy Berthemet
Journaliste Figaro
© Copyright Le Figaro
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