(CRI 26/02/2013) Trois semaines après la formation du gouvernement d'union
nationale en République centrafricaine (RCA) dirigé par l'opposant Nicolas
Tiangaye, les rebelles de l'alliance Séléka refusent leur cantonnement en vue de
leur désarmement, contre l'avis de leur leader Michel Am Nondokro Djotodia,
nommé vice-Premier ministre, ministre de la Défense nationale.
Une
coalition hétérogène de plusieurs mouvements rebelles opposés au pouvoir du
président François Bozizé, Séléka, apparue en décembre dans le cadre d'une
offensive lui ayant permis de prendre le contrôle d'une partie du territoire
centrafricain qu'elle continue d'occuper, est aujourd'hui minée par des
divergences entre sa direction et sa base sur l'application des accords de paix
conclus le 11 janvier à Libreville au Gabon.
Source de désaccords, le
cantonnement des combattants rebelles visant à les amener à déposer les armes
afin d'être par la suite intégrés pour une partie dans l'armée régulière et pour
l'autre reversée dans la vie civile en marge du processus DDR (désarmement,
démobilisation, réinsertion) est une des clauses du compromis signé entre le
régime de Bozizé et ses adversaires, qui a favorisé une accalmie dans les
hostilités entre les deux camps.
Lors d'une visite le 21 février à
Vangué, localité proche de Damara, ville du Centre du pays décrétée « ligne
rouge » par la Force multinationale de l'Afrique centrale (FOMAC) pour protéger
la capitale Bangui contre l'avancée rebelle, Djotodia, qui participe au
gouvernement avec quatre autres membres de la rébellion, a exhorté les troupes à
favoriser la réalisation de ladite opération prévue sur trois sites :
Kaga-Bandoro (Centre- Nord), Bria et Ndélé (Nord-Est).
« Nous avons
choisi ces villes parce que les bases de la FOMAC sont présentes dans ces
localités, pour que vous bénéficiiez des meilleures conditions de vie. Si
aujourd'hui nous acceptons de signer l'accord de paix de Libreville, alors
respectons nos engagements. Car, la communauté internationale a les yeux rivés
sur nous », a lancé l'ancien fonctionnaire du ministère centrafricain des
Affaires étrangères précédemment aussi consul à Nyalla, au Soudan.
Comme
avec la formation du gouvernement d'union nationale où ils réclamaient sept
postes ministériels contre les cinq obtenus, les chefs militaires de Séléka
n'approuvent pas cette position. A la suite du général Mahamat al Katime,
commandant des opérations à Damara, le colonel Michel Narkoyo, un des
porte-parole de la rébellion, joint lundi par Xinhua est formel : pas de
cantonnement et de désarmement tant que les revendications ne sont pas
satisfaites.
DEUX EXIGENCES FONDAMENTALES
Deux exigences
fondamentales sont formulées : le départ de la RCA des soldats sud-africains et
ougandais chargés de prêter main forte au régime du président Bozizé et puis la
libération des détenus politiques en relation avec la crise.
« Nous
attendons toujours la réaction du gouvernement. A Libreville, on a signé
beaucoup de papiers. Jusqu'à présent, ni les Sud-africains, ni les Ougandais,
personne n'a quitté notre pays. On se demande pourquoi le président Bozizé garde
encore ces forces étrangères dans notre pays », a souligné Narkoyo, ex-soldat de
deuxième classe de la gendarmerie nationale devenu colonel dans la
rébellion.
Selon lui, ce retrait devait avoir lieu une semaine après la
signature des accords de Libreville. « Nous sommes prêts pour le cantonnement,
nous ne sommes pas résistants. On ne peut pas aller au cantonnement alors que
nos frères restent en détention », a-t- il en outre mentionné, faisant valoir
que s'il y a blocage dans l'application des accords de paix, c'est du côté du
camp de François Bozizé, accusé de « manque de volonté politique » pour faire
avancer le processus.
A l'en croire, ce blocage ne permet pas au «
président Djotodia de contrôler totalement la situation en tant que ministre de
la Défense. Il n'a pas le contrôle de l'armée. D'après nos informations, le
président Bozizé a augmenté le nombre des Sud- africains t des Ougandais. Son
fils qui fut ministre de la Défense est allé récemment à l'extérieur chercher
des avions et des pilotes. Ils ont monté des hélicoptères et des avions de
guerre. »
Les mêmes accusations avaient été entendues à l'approche de
l'ouverture du dialogue politique tenu en janvier dans la capitale gabonaise,
sous l'égide des chefs d'Etat de la Communauté économique des Etats de l'Afrique
centrale (CEEAC, à laquelle la RCA appartient). Elles sont aussi reprises par
Eric Massi, porte- parole international de Séléka à Paris en France, qui a exigé
que « le président Bozizé exécute de bonne foi les engagements qu'il a pris à
Libreville ».
« Il n'y a pas de divergences. Nous sommes d'accord pour la
mise en oeuvre des accords. C'est les modalités qui restent à définir. Nous
considérons que le processus ne peut pas être unilatéral. Nous avons arrêté
notre offensive, nous sommes allés au dialogue à Libreville, nous avons accepté
de signer l'accord de cessez-le-feu, nous avons accepté que le président
Djotodia et les autres entrent au gouvernement malgré que la composition de ce
gouvernement ne nous convient pas », a-t-il ajouté.
Massi, dont les
propos rejoignent ceux des chefs militaires de la coalition rebelle, a appelé la
Commission des droits de l'homme des Nations Unies à se rendre en RCA pour «
aller visiter les prisons et s'enquérir de leur situation afin qu'ils soient
libérés ». « Les arrestations doivent cesser, car, actuellement à Bangui les
arrestations continuent », a-t-il poursuivi.
MISE EN GADE DU MINISTRE DE
LA COMMUNICATION
Ministre de la Communication, Christophe Gazam Betty,
également membre de Séléka, s'est désolidarisé de cette ligne politique. « Moi,
je n'assumerai pas la responsabilité de me mettre à dos les dix chefs d'Etat de
la sous-région et la communauté internationale. Il faut être réaliste et
responsable », a-t-il dit, précisant que les arguments soulevés sont des «
aspects légitimes, mais ils ne sont pas liés au regroupement et au désarmement
des combattants ».
« Celui qui prendra le risque de faire bloquer cette
machine- là va s'expliquer. Vous n'allez pas souhaiter que ce qui se passe au
Mali arrive ici. Ça voudra dire qu'on a passé trois mois à dépenser de l'énergie
pour rien. Personne n'a intérêt à ce que le processus s'arrête ou capote », a
mis en garde Gazam Betty en annonçant des préparatifs avec l'envoi des équipes
sur le terrain et la mobilisation du matériel (tentes et bâches) avec le
concours des partenaires internationaux tels que l'UNICEF pour le cantonnement
des troupes.
D'après le ministre de la Communication, « nous travaillons.
On n'est pas au gouvernement avec une étiquette. On est ministre de la
République, on n'est pas membre de Séléka. Il y a une équipe qui est sur place
là-bas (fief rebelle, NDLR) en train de faire des réglages. Je souhaiterais qu'à
la fin de la semaine, ce soit réglé ».
Il a fait part de la préoccupation
de libérer le pays de l'asphyxie économique dans laquelle la nouvelle crise
politique l'a plongé. « Il faut libérer les voies pour qu'on apporte les vivres
à la population. Aujourd'hui, on est au bord de la famine. Les enfants ne vont
pas à l'école. La question est d'ordre humain et d'ordre humanitaire
».
Si les rebelles annonçaient 4.600 combattants au début de leur
offensive, les chiffres exacts des troupes à cantonner ne sont pas encore
précisés, en dehors des 1.684 hommes déclarés à Damara, ville située à quelque
90 km de Bangui et où Séléka occupe une position à 5 km depuis sa récente
progression en janvier, selon le colonel Narkoyo.
( Xinhua
)
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