(Lutte Ouvrière 05/05/2011)
Nos camarades de l'Union Africaine des Travailleurs Communistes Internationalistes consacrent l'éditorial de leur mensuel Le Pouvoir aux travailleurs, à la situation du Burkina Faso, récemment secoué par une vague de contestation. Nous en reproduisons quelques extraits.
Blaise Compaoré est confronté à la plus grande crise que son régime ait connue depuis son arrivée au pouvoir en 1987 (...). Le mouvement de contestation a commencé le 22 février dans la ville de Koudougou (centre-ouest) dans le milieu des élèves et des étudiants. À l'appel de l'Association nationale des étudiants burkinabés et de la Coordination des élèves et étudiants burkinabés, des milliers de jeunes ont manifesté pour protester contre la mort d'un des leurs, alors qu'il se trouvait entre les mains des policiers. (...) La colère était d'autant plus grande au sein de la population de Koudougou que ce n'est pas la première fois que les policiers assassinent en toute impunité.
La contestation partie de Koudougou a fait tache d'huile. Elle a gagné de nombreuses villes du pays : Pô, Koupéla, Ouahigouya, Pouytenga... (...) Les bâtiments publics ont été les cibles principales. La réponse de la police a été brutale. Il y a eu des morts et des blessés.
Après les élèves et les étudiants, ce sont les militaires qui ont exprimé leur mécontentement dans les rues de la capitale Ouagadougou. Cela a commencé à la fin du mois de mars, suite à la condamnation et à l'emprisonnement pour viols de quelques militaires. Aussitôt les soldats sortirent des casernes. Ils pillèrent des boutiques, « réquisitionnèrent » des véhicules appartenant à des civils et libérèrent certains de leurs collègues. Le maire de Ouagadougou, numéro trois du parti au pouvoir, fut blessé par des soldats et son domicile saccagé. De fil en aiguille, presque toutes les casernes du pays furent entraînées dans cette vague de protestation, y compris le régiment de la Garde présidentielle (...)
Le 16 avril, les commerçants en colère suite aux pillages de leurs magasins sont eux aussi sortis dans les rues, pour protester contre l'incapacité des pouvoirs publics à assurer leur protection. Le siège du gouvernorat, l'hôtel de ville et l'Assemblée nationale furent vandalisés. Une partie du ministère du Commerce ainsi que les véhicules garés dans sa cour furent incendiés. Le siège du parti au pouvoir, le Congrès pour la démocratie et le progrès, partit en fumée.
Face aux déferlements de manifestations qu'il n'arrive plus à contrôler, pour la raison que l'armée, qui est la principale base de son pouvoir, n'est plus sous son contrôle, Blaise Compaoré a dissous le gouvernement le 21 avril. (...)
Parviendra-t-il à juguler la vague de contestation sans précédent qui déferle sur le pays ? Cela dépendra en partie de sa capacité à reprendre le contrôle de l'armée, mais surtout de l'ampleur de la colère et de la mobilisation populaires. Car les véritables raisons de la colère populaire se trouvent dans la misère, qui fait des ravages et touche l'écrasante majorité. (...) Seule une toute petite minorité de privilégiés du régime et des hommes d'affaires qui prospèrent à l'ombre du pouvoir s'enrichissent et vivent comme des pachas. La corruption et le clientélisme ont gangrené tout l'appareil d'État. Blaise Compaoré, sa famille et son clan se sont approprié toutes les affaires juteuses du pays (...) Mais il est aussi assis sur une poudrière qui pourrait l'emporter.
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