(Les Afriques 11/04/2011)
Plus de 25 milliards de francs Cfa. C’est l’ardoise salée de la Caisse de retraites du Togo pour près de treize années d’indemnités de départ à la retraite non payées. L’hémorragie a forcé le vote, par l’Assemblée nationale, d’une loi suspendant celle ayant institué ce bonus mis à la charge des actifs de la Caisse.
La rupture de l’équilibre financier du régime des pensions civiles et militaires a mis la Caisse de retraite du Togo (CRT) dans une incapacité à payer l’allocation de départ à la retraite, un bonus de douze mois de salaire accordé à tout partant à la retraite. L’essoufflement est intervenu après seulement six années de vie de cette allocation instituée en 1991 mais suspendue en 1997 sans aucun texte réglementaire. Depuis cet arrêt de fait, et pendant que la loi instituant cette allocation courait toujours, la CRT aurait accumulé une obligation de plus de 25 milliards FCfa vis-à-vis de centaines de fonctionnaires auxquels l’indemnité de départ à la retraite n’a pas été payée pour près de treize années. Pour arrêter l’hémorragie financière et limiter l’ardoise, l’Assemblée nationale a dû voter le 18 février dernier une loi portant sur la suspension de cette allocation de départ. Les fonctionnaires se sont montrés désemparés, les syndicalistes moins ouvertement critiques tandis que les politiques décrient une loi déshumanisante à la limite de la « mesure humanicide ». Les autorités togolaises, se défendant, parlent d’une « volonté de faire quelque chose de plus rationnel, de mettre en place un système qui soit plus performant », expliquant qu’il y a eu « une situation malheureuse, parce que les indemnités ont été instituées dans des conditions qui ne respectaient pas les règles de l’art ».
Il y a eu « une situation malheureuse, parce que les indemnités ont été instituées dans des conditions qui ne respectaient pas les règles de l’art. »
« L’institution de l’indemnité de départ à la retraite n’était pas fondée sur des études actuarielles », a expliqué Octave Nicoué Broohm, ministre du Travail, de l’Emploi et de la Sécurité sociale, interrogé par la radio locale Victoire Fm. Les fonctionnaires actifs ont dû supporter la charge du départ à la retraite qui revenait normalement à l’Etat (l’employeur) en guise de reconnaissance pour service rendu à la nation. Le ministre a relevé l’existence d’un « déséquilibre structurel » qui s’est creusé davantage avec la mise de ces indemnités à la charge de la Caisse de retraite du Togo. Le nombre de départs à la retraite était d’année en année plus élevé, tandis que celui des actifs évoluait dans le sens inverse. Il n’y avait pas, en face des indemnités payées, des cotisations qui rentraient en conséquence pour en plus permettre de payer les allocations de départ à la retraite.
Depuis 1997, les fonctionnaires partant à la retraite n’obtenaient plus le fameux bonus. « C’était une situation de fait, aucun acte légal ne venait justifier, expliquer ou rendre compte de cela », a expliqué Octave Broohm. La nouvelle loi portant suspension de l’allocation permet, dit-il, d’abord de « régulariser une situation de fait » et ensuite de travailler sur une base légale qui se penchera sur le sort du passif de plus de 25 milliards accumulés de fait. A partir de la suspension de la loi, sur cette base dorénavant légale, le gouvernement mènera la réflexion sur le bonus. Les questions à ce sujet sont des préoccupations inscrites en bonne place, dit-on, dans le cadre des réformes engagées au niveau de l’Administration publique. Il s’agit pour les autorités togolaises d’envisager, « de façon saine dans un cadre clarifié », les moyens d’apurer le lourd passif et de voir ce qu’il faut mettre en place comme indemnité de départ à la retraite et les conditions à cet effet : les conditions précédentes n’étaient pas « rationnelles ».
Olivier Tovor, Lomé
© Copyright Les Afriques
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire