lundi 11 janvier 2010 / par Laura Adolphe
Les indépendantistes cabindais, qui s’opposent aux autorités angolaises depuis 1975, menacent de frapper de nouveau
Deux séparatistes cabindais ont été arrêtés aujourd’hui par la police angolaise dans l’enclave de Cabinda (située entre la République Démocratique du Congo et le Congo Brazzaville), après le mitraillage vendredi du bus de l’équipe de football togolaise qui a fait au moins trois morts et plusieurs blessés. Réclamant l’indépendance de la région, le Front de Libération de l’enclave de Cabinda (FLEC), qui revendique l’attaque, menace la Coupe d’Afrique des Nations 2010. La Confédération africaine (CAF) tente de rassurer, mais la colère des séparatistes cabindais n’est pas à prendre à la légère.
La police angolaise a arrêté aujourd’hui deux personnes à l’enclave du Cabinda après l’attaque meurtrière de vendredi contre l’équipe de football togolaise, qui s’est retirée hier de la Coupe d’Afrique des Nations 2010 (CAN). Les deux hommes, membres de la guérilla séparatiste, ont été « capturés sur les lieux » de la fusillade, a déclaré le procureur de la province, Antonio Nito, à une radio angolaise. Mais, les risques subsistent. Les matchs de la Coupe d’Afrique des Nations (CAN), qui se déroulent au Cabinda, sont menacés. « Nous sommes désolés pour les pertes de vies humaines, mais c’est la guerre. Tous les coups sont permis. L’Angola veut faire croire à une paix effective au Cabinda, mais la paix n’existe pas », a affirmé dimanche le secrétaire général de la FLEC (Front de Libération de l’enclave du Cabinda), Rodrigues Minguas, selon qui « les armes vont continuer à parler ».
Un coup médiatique
Dans cette région pétrolière surnommée « Koweït africain », l’équipe du Togo a été victime d’une embuscade le vendredi qui a entrainé la mort de trois personnes ainsi que son retrait de la compétition panafricaine. Les autres délégations, généralement arrivées par avion, n’ont pas été affectées par cette violence.
Les Togolais n’ont évidemment rien à voir avec cette affaire, mais le FLEC a trouvé le moyen de relancer l’attention autour d’un conflit qui dure depuis des décennies. Rodrigues Minguas l’a expliqué hier : « ce n’est pas l’équipe qui était visée. Nous sommes en guerre contre l’Angola. L’équipe du Togo était escortée par les patrouilles angolaises. Nous n’avons pas hésité à attaquer ». En attaquant à l’arme automatique le car de l’équipe du Togo, le Front a réussi son coup médiatique à la veille de l’ouverture de la CAN.
Un conflit au long cours
L’enclave angolaise abrite une myriade de mouvements indépendantistes affaiblis par la présence massive des militaires angolais. Mais ils semblent toujours capables d’un coup d’éclat. Cette région était devenue relativement calme depuis la signature d’un accord de paixentre le gouvernement et le Front de Libération de l’enclave du Cabinda en 2006. C’est justement pour montrer que la situation était normalisée que le gouvernement angolais a organisé des matchs de la CAN sur le territoire du Cabinda. Mais, pour la seule association de défense des droits de l’Homme présente dans l’enclave, Human Right Watchs (HRW) « l’accord n’a fait que renforcer les tensions ». Le gouvernement aurait accru les répressions contre les indépendantistes.
La région a été rattachée administrativement par les Portugais à la colonie angolaise en 1956. C’est en 1963 que plusieurs groupes armés, militant pour l’indépendance, avaient formé le FLEC. Ce groupe reste le principal mouvement indépendantiste de Cabinda. L’enjeu majeur du conflit reste le pétrole. L’Angola est le premier exportateur d’or noir du continent en 2009, aux côtés du Nigéria. Mais c’est le Cabinda, territoire séparé géographiquement de l’Angola, qui concentre 60% de la production angolaise de pétrole. Les revendications du Front portent logiquement sur l’affirmation de l’identité nationale tout autant que sur la volonté de contrôler la rente pétrolière. Les troupes de Luanda avaient pris le contrôle de cette région quelques mois avant l’indépendance de l’Angola en 1975. Depuis, la guerre civile a fait plus de 30 000 morts entre 1975 et 2006 dans ce pays qui compte quelque 300 000 habitants.
La cause des indépendantistes cabindais n’est pas connu sur le plan international, d’où ce coup d’éclat au démarrage de la CAN 2010. Cependant, la mort d’officiés togolais est une mauvaise publicité pour leur cause, même si le public saura désormais que le Cabinda existe et que les Cabindais luttent pour leur indépendance.
Carte : Globalsecurity (NB:le Cabinda se trouve entre les deux Congo)
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