(Le Pays 13/02/2012)
On l’avait presque oublié depuis la chute du régime de son père Mouammar Kadhafi. Car, pour sauver sa peau, il avait trouvé refuge au Niger où, depuis son arrivée en août dernier, il bénéficiait des bonnes grâces des autorités de ce pays qui, pour des raisons humanitaires, refusaient de l’extrader et ce, en dépit de la ténacité et la pression du Conseil national de transition (CNT).
Il s’agit, pour tout dire, de Saadi Kadhafi, l’un des fils du défunt guide libyen, qui, dans une interview accordée à la chaîne al-Arabiya, a annoncé tout de go un soulèvement imminent en Libye. Et, cerise sur le gâteau, il dit être prêt à rentrer au pays pour prendre la tête de cette contre-révolution qu’il appelle de tous ses vœux, afin, dit-il, d’extirper le mal qui s’y trouve. De quoi déclencher l’ire des autorités nigériennes qui, fort embarrassées, n’avaient d’autre choix que de présenter leurs excuses au CNT libyen. Au fait, le moins que l’on puisse dire, c’est que cette sortie de Saadi Kadhafi qui, du reste, avait promis à ses hôtes de rester tranquille, en ne menant aucune activité « subversive », rappelle les propos tenus récemment par un rebelle touareg, en exil au Burkina. Aucun Etat, à moins d’avoir fait le choix de jouer un jeu trouble, ne peut admettre qu’un réfugié continue de vitupérer contre les autorités de son pays.
Car, en plus d’embarrasser ses hôtes, pareille attitude dénote de la haute trahison et peut conduire inéluctablement à une brouille diplomatique entre deux Etats. En tout cas, Saadi Kadhafi, disons-le clairement, abuse de la légendaire hospitalité des autorités nigériennes. Si fait que celles-ci se verront obligées de durcir ses conditions de refugié. Tel père, tel fils, sommes-nous tentés de dire, puisqu’à la réflexion, on se demande ce qu’a bien pu motiver l’homme qui était tant choyé par Niamey, pour qu’il en vienne à faire cette déclaration malencontreuse, compliquant ainsi sa situation. Le bon sens, dût le philosophe Descartes en souffrir, n’est pas la chose la mieux partagée. Mais, comme le dit l’adage, l’arbre ne doit pas cacher la forêt. Car, au–delà du remue-ménage diplomatique que cette sortie de Saadi Kadhafi a provoqué, il y a lieu de voir la réalité en face. La Libye d’aujourd’hui se porterait mieux que la déclaration de Saadi Kadhafi serait passée comme de l’eau sur les plumes d’un canard.
Et, la célérité avec laquelle les autorités libyennes ont réagi, est symptomatique de leur frilosité. On le sait, le CNT fait face à une vague de contestations à telle enseigne qu’il fait feu de tout bois, exploitant la moindre occasion pour faire de la diversion. Plutôt que de monter en épingle les propos de Saadi Kadhafi au point d’en demander son extradition, l’organe politique libyen gagnerait donc à pacifier le pays en sus de la feuille de route qu’il a déjà annoncée. Dans le cas contraire, la grogne actuelle, si elle perdure, pourrait mener à une contre-révolution et cela, avec ou sans Saadi Kadhafi.
Boundi OUOBA
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