(Le Nouvel Observateur 09/02/2012)
Le juge du Bronx s'apprêterait à convoquer les deux parties d'ici "deux à trois semaines" pour une première audience concernant la procédure civile.
En saura-t-on bientôt davantage sur l'avancée de la procédure civile américaine opposant Dominique Strauss-Kahn à Nafissatou Diallo ?
Possible, si, comme l'indique "Le Figaro", le juge du tribunal du Bronx (New York) Douglas Mc Keon en charge du dossier civil s'apprête à convoquer les deux parties "d'ici deux à trois semaines." Soit près de 7 mois après le dépôt de plainte au civil de Nafissatou Diallo contre DSK, le 8 août dernier, lors duquel ses avocats ont dénoncé une agression "sauvage et sadique", le 14 mai, au Sofitel.
Après l'abandon des charges pesant au pénal contre DSK le 23 août, une première audience civile devait avoir lieu fin novembre, mais elle avait été reportée sans que le tribunal n'en précise la raison.
1. En quoi va consister cette première audience ?
La prochaine et première audience sera une audience "préliminaire" au cours de laquelle le juge entendra les positions des deux parties. Il s'agira probablement, selon l'avocat aux barreaux de Paris et New York Arthur Dethomas, d'une audience appelée aux Etats-Unis "motion hearing" explique-t-il au "Nouvel Observateur". Elle correspondrait en France à une "audience de procédure", complète son confrère Marc-Pierre Stehlin.
"Il n'est question lors ce type d'audience que de 'procédure pure' et non du fond du dossier" poursuit Me Dethomas : "avant de pouvoir aborder le fond, le juge s'assure que les deux parties ont bien rendu tous leurs arguments ou conclusions ("motions") sur la procédure en elle-même."
A cette occasion, le juge peut demander au défendeur s'il dispose d'arguments, déjà évoqués ou supplémentaires, permettant d'écarter la demande de la plaignante. Il peut encore en profiter, comme l'indique aussi "Le Figaro", pour se faire préciser certains arguments, comme par exemple l'immunité diplomatique avancée par la défense de DSK sur laquelle il doit se prononcer.
L'objectif d'une première audience, ajoute Me Dethomas, est "d'entendre les parties sur leurs 'motions' et de vérifier si l'affaire est en état d'être jugée en fonction des arguments comme l'immunité, la prescription,..."
2. Qu'en est-il de cet argument d'immunité diplomatique ?
Fin septembre, la défense de DSK a demandé le classement de la plainte, affirmant que l'ex-patron du FMI bénéficiait d'une immunité. S'appuyant sur une convention des Nations Unies de 1947, son avocat américain William Taylor a déclaré que DSK était, samedi 14 mai, protégé par une immunité diplomatique jusqu'à son départ pour la France.
"Le juge décidera si M. Strauss-Kahn peut bénéficier de l'immunité à laquelle a droit tout autre diplomate, qu'il se trouve en vacances ou dans le cadre de son travail. Il ne fait pas de doute pour moi que l'immunité couvre les actes de mon client" avait-il notamment affirmé au "Monde".
Les avocats de Nafissatou Diallo contestent cette immunité, qui constitue à leurs yeux une "tentative évidente pour retarder la procédure, et doit être refusée dans son intégralité car elle n'a absolument aucune valeur et aucun sérieux".
4. Qui doit assister à cette audience ?
Nafissatou Diallo et Dominique Strauss-Kahn peuvent naturellement assister à cette première audience, mais ils n'y sont pas contraints et peuvent être uniquement représentés par leurs avocats.
"Ni l'un ni l'autre n'est obligé de s'y présenter" confirme au "Nouvel Observateur" l'avocat aux barreaux de Paris et New York Marc-Pierre Stehlin. Il pense toutefois que Nafissatou Diallo "a peut-être intérêt à s'y rendre avec son avocat, pour montrer sa détermination. Cela peut jouer psychologiquement."
DSK est "nullement obligé d'être présent" expliquait aussi fin août à "TF1 News" son confrère avocat aux barreaux de Paris et New York Christopher Mesnooh, ajoutant "ce sera selon son intérêt par rapport à l'évolution du dossier. De même qu'il pourra décider, ou pas, d'être témoin pour donner sa version des faits. (...) Le volet pénal a été géré sans que DSK ne dise grand-chose. C'est une stratégie qui serait tout à fait transposable au civil."
5. Que peut-il se passer après cette audience ?
En fin d'audience, le juge mettra vraisemblablement sa décision en délibéré. Il n'est "pas tenu par des délais" précise encore le quotidien. Mais sa décision est "lourde de conséquences", note Me Dethomas, qui rappelle qu'il sera alors possible d'y faire appel.
Après cette audience, le juge se prononcera sur les "motions" (conclusions) des avocats des deux camps. "Il fixera probablement une autre date pour une seconde audience", présume aussi Me Stehlin. Avant une phase de "discovery" lors de laquelle, à l'instar du pénal, chaque partie échangera ses éléments de preuve.
Il est pour l'heure bien trop tôt pour se prononcer sur les suites de cette procédure. En cas de procès, DSK pourrait se voir imposer le paiement de dommages et intérêts en faveur de Nafissatou Diallo.
Toutefois, comme l'indique Me Dethomas et comme l'a plusieurs fois rappelé Me Stehlin depuis le début de l'affaire "en matière pénale, comme civile, les deux parties peuvent à tout moment trouver un terrain d'entente et transiger sur un montant d'indemnisation, et ainsi mettre fin à la procédure."
S'il a admis une relation sexuelle "non tarifée", une "faute morale dont (il n'est) pas fier" et qu'il n'a "pas fini de regretter", DSK a toujours nié avoir agressé sexuellement Nafissatou Diallo.
Par Le Nouvel Observateur
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