lundi 11 avril 2011

BURKINA - Vie chère: la rue exige des solutions justes et urgentes

(L'Observateur Paalga 11/04/2011)

Dans un préavis de grève en date du 4 avril courant, le Bureau de la Coordination nationale de la Coalition contre la vie chère (CCVC) appelait l’ensemble des couches populaires à un arrêt de travail et à une marche-meeting le 8 avril 2011 sur tout le territoire national.
Les grilles des boutiques et autres commerces, les stations d’essence sont restées fermées aux premières heures de la journée du 8 avril dernier. L’appel au débrayage collectif de la CCVC a fait mouche. A la Bourse du travail, une foule des grands jours était au rendez-vous.
En attendant l’arrivée des responsables syndicaux pour le début de la manifestation, les discussions sur les conditions de vie en déclin des populations étaient sur toutes les lèvres, soutenues par des chansons d’artistes acquis à la cause des plus faibles, diffusées par des haut-parleurs.
Sur des pancartes de fortune, on pouvait aisément lire des slogans hostiles au régime du président Compaoré et au pouvoir de la IVe République. Morceaux choisis : « On veut manger » ; « Blaise dégage » ; « L’injustice permanente mène toujours à la révolte » ; « Justice pour Thomas Sankara » ; « Justice pour Justin Zongo »…
Partis de la Bourse du travail, les manifestants, au rythme de chants, de cris de guerre divers…ont rallié avec détermination l’avenue de la Nation, indifférents au soleil d’avril qui dardait déjà à cette heure de la journée sur eux ses rayons brûlants.
Les derniers marcheurs ont mis un long temps avant de prendre le départ, signe que la population est réellement sortie pour manifester son mécontentement à l’égard des autorités qu’elle accuse de tous les péchés d’Israël.
Sur tout l’itinéraire qui est allé de la Bourse du travail à l’avenue de la Nation en passant par le rond-point des cinéastes, l’avenue Kwamé-N’Krumah, l’avenue Houari- Boumediene, l’avenue du Mgr Thévenoud pour enfin rejoindre le point de départ ; les manifestants n’ont pas du tout désarmé. Le ton est même monté par moments à certaines intersections de la ville où des usagers de la route ont voulu forcer le passage.
Au rond-point des Nations unies, au croisement des avenues Kwamé-N’Krumah et Houari- Boumediene, la présence d’éléments bien armés de la Compagnie républicaine de sécurité (CRS) a eu pour effet d’exciter davantage les protestataires. Tout le long du parcours, ceux qui sont restés devant les boutiques ou les services pour regarder passer la foule ont tout simplement été hués et traités de « peuple mouton ».
De retour à la Bouse du travail, le public a été invité à écouter le message du président du CCVC, après une animation bien appréciée de l’ingénieuse chorale du Collectif. Pour « le général Sagnon », la mobilisation de vendredi dernier n’est rien d’autre que l’expression vivante du ras-le-bol vécu au quotidien par la grande majorité des Burkinabè.
Pour la vérité et la justice, les crimes de sang, la bonne gouvernance, des mesures vigoureuses contre la vie chère… le peuple exige des solutions justes et urgentes. Pendant les derniers jours de mars, a-t-il souligné, les citoyens ont vécu une situation chaotique qui a conduit à une restriction des libertés.
Pour Tolé Sagnon, il y a des signes qui ne trompent pas. Le malaise dans la société est profond et criard et la fragilité du système évident. Tout, selon lui, indique que les choses ne peuvent pas continuer comme elles l’ont été jusque-là. Tablant sur l’adresse de Blaise Compaoré à la nation le 30 mars 2011, le « général » s’est montré amer.
Dans son message, le chef de l’Etat affirme avoir « …saisis le sens et la portée de la quête de bien-être, de vérité, de justice et de sécurité qui sous-tendent certaines manifestations… » et réaffirme sa « …disponibilité à rencontrer toutes les catégories sociales en vue d’échanger sur leurs préoccupations ».
Une diversion, dira le président du CCVC, pour qui ce discours présidentiel n’avait pour seul objectif que de « faire baisser le thermomètre de la tension sociale pour arrêter toute lutte ».
On ne saurait attendre grand-chose de la communication du président du Faso, a-t-il soutenu.
Non sans faire des observations qui aboutissent à la conclusion que cette nouvelle adresse du grand sachem à son peuple, ressemble étrangement à cette autre du 21 mai 1999 suscitée par la crise Norbert Zongo. Après le dépôt du rapport de la Commission d’enquête indépendante (CEI), a fait remarquer Tolé Sagnon,
Blaise Compaoré avait déclaré avoir compris qu’il « y avait bel et bien une crise sociale et politique consécutive au mécontentement des citoyens face au manque de détermination des gouvernants à résoudre les problèmes sociaux, les contentieux politiques, les dysfonctionnements administratifs, la modernisation des institutions républicaines, la recomposition de la scène politique ».
Il avait alors annoncé des mesures pour « préserver la paix sociale, rétablir la confiance dans les institutions, renforcer la foi dans le dialogue et la concertation ». Depuis, rien n’a étanché la soif de vérité et de justice des Burkinabè, mis fin aux assassinats, aux tortures et autres atteintes graves aux droits de l’homme. Finalement, le dossier Norbert Zongo a été conduit à un non lieu.
Place doit maintenant être fait aux actes, a poursuivi l’orateur du jour. Le peuple attend sans délai des mesures énergiques contre l’impunité, la vie chère et pour l’élargissement des libertés. En somme des actes concrets pour une démocratie véritable au Pays des hommes intègres.
La lutte de la Coalition doit donc se poursuivre pour la satisfaction de sa plate-forme minimale. Elle a du reste, par la voie de son président, invité l’ensemble de ses composantes, militants et sympathisants à travers tout le Burkina, à rester attentifs et mobilisés, dans l’attente de tout mot d’ordre qu’elle lancera dans ce sens.

D. Evariste Ouédraogo
© Copyright L'Observateur Paalga

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire