jeudi 14 avril 2011

BENIN - Législatives prochaines: Vodonou disqualifié

(L'Option Infos 14/04/2011)

Fin de carrière politique pour le député Force clé Désiré Vodonou. La Cour Constitutionnelle vient de le déclarer inéligible. L'homme n'est plus aussi électeur. Il est déchu de son droit civique. C'est suite à des recours qui lui sont déposés qu'elle a jugé utile de prendre cette décision. En clair, Désiré Vodonou ne sera pas en lice pour les législatives 2011. Plus est, il est déchu de son titre de député. A l'origine, l'affaire d'escroquerie réalisée en bande organisée en France dans laquelle il a été condamné par défaut, au tribunal de Tour. Vodonou a toujours rejeté les faits qui lui reprochés.
Mais la Cour de Robert Dossou a fini par démontrer son implication dans ce dossier de faux et usage de faux. Aux dernières législatives, le député Boniface Yèhouétomè de la Rb avait saisi la Cour pour invalider son siège. Mais en vain. Cette fois-ci, la Cour a tenu compte des derniers développements du dossier Vodonou pour statuer sur son sort. Vodonou est politiquement fini.La Cour ordonne aux structures compétentes de lui retirer sa carte d'électeurs.
Tout sur l'affaire «escroquerie réalisée en bande organisée» en France
Né le 7 mai 1963 à Parakou, selon les pièces mises à la disposition du Tribunal, Désiré Vodonou est poursuivi en France pour plusieurs raisons: escroquerie réalisée en bande organisée, transport de monnaie ayant cours légal contrefaite ou falsifiée, mise en circulation de monnaie ayant cours légal contrefaite ou falsifiée et détention en vue de la mise en circulation de monnaie ayant cours légal contrefaite.
Il a brillé par son absence à toutes les audiences convoquées pour connaître de cette affaire. A l'appel de la cause, le Président de séance a constaté son absence. Après en avoir délibéré conformément à la Loi, le Tribunal, attendu que le prévenu ne comparaît pas, qu'il n'a pas eu connaissance de la date d'audience, a statué à son égard par jugement de défaut en vertu de l'article 412 du Code de procédure pénale.
Dans ce dossier, Vodonou est prévenu, selon le tribunal, pour avoir «employé des manœuvres frauduleuses, en l'espèce faisant croire qu'il existait une mallette contenant 20 millions de dollars Us provenant du trésor de feu le Président Mobutu, en produisant des dollars qui se révélaient être des faux, en faisant intervenir un faux agent secret français du nom de Paul Dubois ainsi qu'un faux diplomate béninois dénommé Jacob Vagnikin; en produisant un faux document d'ouverture du canal diplomatique, trompé Messieurs Peeters Louis et Borgers Dirk pour les déterminer à leur remettre des fonds, valeurs ou un bien quelconque, en l'espèce une somme totale de 3,6 millions de francs effectués en plusieurs versements, avec cette circonstance que les faits ont été commis en bande organisée».
Dans la même période, il lui est aussi reproché d'avoir «transporté 350 billets de faux dollars Us, signes monétaires, pièces de monnaie ou billets de banque ayant cours légal en France ou émis par les institutions étrangères ou internationales habilitées à cette fin, qu'il savait contrefaits ou falsifiés». Et ce n'est pas tout. De décembre 1998 à mai 1999, ces faux dollars ont été mis en circulation.
De quoi s'agit-il, en réalité?
En novembre 1998, Dirk Borgers et Louis Peeters, hommes d'affaires belges, sont contactés par des Africains au sujet d'une valise de 20 millions de dollars (trésor du Président Mobutu) afin que cette somme soit réinvestie en Europe. Dirk Borgers et Louis Peeters acceptent, après avoir vu des liasses de billets de 100 dollars parfaitement conditionnés. Il leur a été alors demandé d'avancer des fonds pour le transfert de la valise.
Pour accréditer la véracité de ses dires, Désiré Vodonou, début 1999, fera rencontrer aux parties civiles un haut fonctionnaire du Ministère des affaires étrangères et remettre à celle-ci, par l'intermédiaire de Legrand Jérôme, présenté comme coopérant-agent secret français - sous une fausse identité «Paul Dubois» -, un document officiel «ouverture du canal diplomatique».
A chaque étape, Dirk Borgers et Louis Peeters doivent remettre de l'argent pour des prestations factices et des frais divers (libération d'africains - cautions nettoyage de billets «Mobutu par un produit miracle...). Devant l'Ambassade du Bénin à Paris, Dirk Borgers et Louis Peeters remettront encore des espèces à Legrand Jérôme (380.000 francs) pour récupérer enfin la valise. En fait, Dirk Borgers et Louis Peeters ont investi à fonds perdus, dans l'espoir de percevoir une partie du trésor Mobutu, puisque la «valise» ne leur sera jamais remise. Pour cette opération qu'ils espéraient très fructueuse, ils auront déboursé finalement 3.600.000 francs.
Désiré Vodonou est apparu tout au long de l'information judiciaire comme l'instigateur de cette escroquerie, sachant s'entourer notamment de Legrand Jérôme pour rassurer les Belges. Legrand Jérôme a admis qu'il se doutait qu'il participait à une opération illicite, acceptant de prendre un nom d'emprunt, de remettre un document «diplomatique» aux parties civiles, de se rendre à Paris devant l'Ambassade du Bénin conscient que l'argent devait transiter hors des circuits officiels.
Legrand Jérôme devait, en contrepartie, percevoir 600.000 dollars. Legrand Jérôme a bien dès lors participé à l'escroquerie initiée par Vodonou et a été déclaré coupable. En parallèle de cette escroquerie, Legrand Jérôme a reçu de la part de Désiré Vodonou, une enveloppe contenant 350 billets de faux dollars Us qu'il a, dans un premier temps, entreposée chez sa sœur en France. Celle-ci déclarera, à leur sujet:«Legrand Jérôme a dit à peu près qu'il s'agissait manifestement de photocopie de dollars».
Par un cheminement resté quelque inexpliqué, Pascal Mirebault s'est retrouvé, à son tour, en possession des 350 billets de faux dollars. Si l'enquête a révélé que Pascal Mirebault, ami d'enfance de Legrand Jérôme, avait accepté de faire des attestations d'hébergement pour Vodonou, au nom de cette amitié, rien ne permet en revanche de dire qu'il ait eu l'intention de mettre les faux billets en circulation, se contentant plutôt de les stocker et de le révéler spontanément lors de sa garde à vue. Pascal Mirebault a été donc relaxé.
Compte tenu de l'envergure des moyens mis en œuvre par Désiré Vodonou pour réaliser une escroquerie particulièrement profitable pour lui-même, du non-respect par Vodonou du contrôle judiciaire (il ne s'est pas présenté au Tribunal), le juge a recouru à une peine d'emprisonnement de 3 ans contre lui et confirmé les effets du mandat d'arrêt à diffusion internationale délivré le 22 février 2001 par le Juge d'instruction pour s'assurer de l'effectivité de la peine. Compte tenu du rôle de Legrand Jérôme dans cette affaire, il a été condamné à 12 mois d'emprisonnement dont 7 assortis du sursis.
Sur l'action civile, le juge a solidairement condamné Vodonou et Legrand à payer à Borgers la somme de 152.449,02 Euros à titre de dommages et intérêts et la somme de 800,00 Euros en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Pour ce qui est de Peeters, Vodonou et Legrand ont été solidairement condamnés à lui payer la somme de 243.918, 43 Euros à titre de dommages et intérêts et 800,00 Euros en application de l'article 475-1 du Code de procédure pénale. Voilà de façon ramassée, l'issue de cette affaire traitée au Tribunal de grande instance de Tours, en France, en jugement correctionnel le 6 mai 2003.

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