(Nord Eclair 02/04/2011)
Alassane Ouattara, 69 ans, reconnu président ivoirien par la communauté internationale, était pour la première fois hier aux portes de la présidence après 15 ans d'attente et de polémiques, qui ont fait de lui le symbole de la crise identitaire qui déchire le pays.
Reconnu par la communauté internationale, Alassane Ouattara joue longtemps la carte diplomatique pour obtenir le départ du sortant. La « patience » - le mot est de lui - et le style mesuré de ce technocrate policé lui valent des critiques dans les rangs mêmes de ses soutiens, alors qu'il reste des mois confiné au Golf hôtel sous un blocus du camp adverse.
« Étranger » ou « cerveau » de la rébellion de 2002 contre M. Gbagbo selon ses adversaires, « ADO » (Alassane Dramane Ouattara), originaire du nord majoritairement musulman, a été la victime des plus dangereux clivages ivoiriens, entre nord et sud, islam et christianisme, étrangers et autochtones.
Né le 1er janvier 1942 à Dimbokro (centre), il accomplit la majorité de sa scolarité au Burkina Faso voisin. Aux États-Unis, il obtient en 1967 un doctorat en économie et entre l'année suivante au Fonds monétaire international (FMI). Il devient en 1983 vice-gouverneur de la Banque Centrale des Etats d'Afrique de l'Ouest (BCEAO).
Il reconnaîtra lui-même avoir occupé plusieurs postes au titre de la Haute Volta, l'actuel Burkina Faso, ce qui va alimenter l'interminable débat sur sa nationalité.
Il est nommé en 1990 Premier ministre par le président ivoirien Félix Houphouët-Boigny, fonction qu'il occupe jusqu'à la mort du « père de la Nation » en 1993.
Jugeant le scrutin non transparent, Alassane Ouattara renonce à se présenter à la présidentielle en 1995 face à Henri Konan Bédié, qui a succédé à Houphouët.
À l'été 1999, il quitte son poste de directeur général-adjoint du FMI : revenu à Abidjan, il se lance dans la course présidentielle de 2000, mais sa candidature est rejetée pour « nationalité douteuse » par la junte au pouvoir.
Marié à une Française, il est alors plus que jamais le symbole de la fracture identitaire de ce pays de forte et ancienne immigration, qu'aggrave en 2002 la partition du pays en un sud loyaliste et un nord rebelle. En 2005, sous pression sud-africaine, Laurent Gbagbo valide sa candidature à la présidentielle, plusieurs fois reportée.
Grâce à son alliance avec son ennemi d'hier Henri Konan Bédié, Alassane Ouattara est d'abord déclaré vainqueur du scrutin de novembre 2010, mais le pays plonge dans une crise sanglante qui réveille le clivage nord-sud.
Publié le samedi 02 avril 2011 à 06h00
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