vendredi 22 avril 2011

Le Burkina Faso gagné par la contestation

(Ouest-France 22/04/2011)

Mutineries à répétition, manifestations d'étudiants, revendications sociales... La fronde s'amplifieet déstabilise le président Compaoré, au pouvoir depuis vingt-quatre ans.
Repères
Qui se révolte et pourquoi ? La contestation a démarré le 20 février, après la mort d'un étudiant à Koudougou. Les circonstances ne sont pas claires. Les autorités soutiennent que le jeune homme est décédé d'une méningite. Les manifestants accusent la police de l'avoir tué. Au-delà de cet élément déclencheur, la jeunesse supporte de moins en moins l'autoritarisme du pouvoir et la mauvaise répartition des richesses.
Les militaires ont suivi le mouvement. Et, depuis deux mois, une grogne agite l'armée en raison, selon la présidence, du non-versement de primes. Plusieurs mutineries se sont enchaînées. Le soulèvement de la garnison de Pô, le 17 avril, après celle de la garde présidentielle et de plusieurs casernes de la capitale, témoigne d'un sérieux malaise. La troupe est ulcérée par l'enrichissement des hauts-gradés. Les mutins se sont livrés à des pillages qui ont déclenché la colère des commerçants. Les magistrats, enfin, se sont mis en grève après des attaques du palais de justice par des militaires. Et, début avril, des milliers de personnes sont descendues dans les rues de la capitale pour réclamer de meilleures conditions de vie.
Que fait Blaise Compaoré ? En vieux routier de la politique, il joue, pour l'instant, la carte de la négociation. Il vient de nommer un nouveau Premier ministre. Luc-Adolphe Tiao, ambassadeur à Paris, 56 ans est chargé de renouer le dialogue avec la population. Compaoré a changé également de chef d'état-major et a versé les primes exigées par les militaires. Une mesure guère appréciée par la population confrontée à la vie chère. Mais qui s'explique par le poids de l'armée, véritable pilier du régime.
Blaise Compaoré est-il menacé ? L'homme qui dirige le pays d'une main de fer depuis 1987 est solide. Porté au pouvoir par l'armée au lendemain de la mort de son ami Thomas Sankara, iI avait su troquer son unifo rme de putschiste pour un costume de président. Il était même devenu l'homme fort de la sous-région, jouant, au besoin, les médiateurs au Togo, en Guinée et en Côte d'Ivoire. En plus de vingt ans, il a offert au Burkina Faso, l'un des pays les plus pauvres de la planète, privé de façade maritime, la stabilité politique qui lui a longtemps fait défaut. Mais à 60 ans, Compaoré apparaît usé par le pouvoir. Les mouvements d'humeur traduisent aussi l'envie de le voir partir. Réélu pour la quatrième fois en novembre 2010, pourra-t-il tenir jusqu'à la fin de son mandat prévue en 2016 ?

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