(Le Pays 11/04/2012)
Cela fait un an, jour pour jour, que l’actuel président
ivoirien, Alassane Dramane Ouattara (ADO), a accédé de facto à la magistrature
suprême de son pays. Une année qui a été mise à profit pour tenter de gagner
deux paris aussi herculéens l’un que l’autre. Le nouveau locataire du palais
d’Abidjan avait en effet la redoutable charge de tirer son pays du marasme
économique dans lequel l’avait plongé la crise engendrée par les turpitudes de
son prédécesseur.
Il devait dans le même temps réconcilier ses frères et
sœurs en vue de l’avènement d’un climat social paisible et sécurisé. Le nouveau
président mais ancien Premier ministre de feu Félix Houphouët-Boigny, semble
cependant sur le point de relever le défi. La moindre des mentions que l’on peut
décerner à sa gouvernance dans un contexte de crise économique mondiale pas très
favorable, c’est qu’il a réussi à remettre les secteurs de développement sur
orbite. Le gouvernement de ADO a su reconquérir la confiance de ses partenaires
africains et occidentaux en vue de relancer leurs relations économiques et
redynamiser leurs rapports diplomatiques.
Les tenues des Conseils des
ministres conjoints avec le gouvernement burkinabè, ses visites à la Maison
blanche et à l’Elysée sont, pour un début, des preuves palpables de résultats,
sinon satisfaisants, du moins encourageants. Une confiance regagnée dont l’un
des signes prometteurs fut l’élection, pour la première fois dans l’histoire
politique de la Côte d’Ivoire, du chef de l’Etat ivoirien comme président en
exercice de la Communauté économique des Etats de l’Afrique de l’Ouest (CEDEAO).
Le message envoyé par ses pairs de la sous-région en le plébiscitant est, on ne
peut plus réconfortant et significatif. Ce n’est ni plus ni moins qu’une façon
pour eux de le légitimer et d’afficher leur ferme volonté à tourner
définitivement la page sombre du bord de la lagune Ebrié et, partant, celle non
moins noire de Laurent Gbagbo.
L’on note également avec satisfaction que
le pays a été remis sur les rails politiques au niveau national. Le bon
déroulement des élections législatives consacre la reprise normale de la vie
politique avec l’installation prochaine du parlement, institution centrale de
législation, de contrôle et d’imposition. Certes, le boycott du scrutin par le
Front populaire ivoirien (FPI), le plus important parti d’opposition, influe
négativement sur sa saveur qui n’en est cependant pas moins exquise. Le retour
de toutes les formations politiques aux consultations électorales demeure, en ce
sens, un des chantiers à poursuivre par l’ensemble de la classe politique
ivoirienne.
Le Rassemblement des républicains de Côte d’Ivoire (RDR),
qui détient la réalité du pouvoir d’Etat, ne doit point se lasser de se
comporter en rassembleur en offrant sans cesse aux autres l’opportunité de
participer à l’animation de la vie politique. A leur tour, les partis de gauche,
notamment le FPI, doivent éviter de sombrer dans la léthargie. Celui-ci doit se
donner les forces nécessaires de survivre à son ancien président désormais entre
les mains de la Cour pénale internationale (CPI). A force de bouder les urnes,
le parti de Laurent Gbagbo s’expose à l’inertie politique qui peut engendrer de
fâcheux phénomènes comme l’éclatement ou la mutation régressive. Ce n’est pas en
restant à l’écart des sphères de décision par une auto-marginalisation inféconde
que les dignitaires du FPI pourront libérer leur mentor de la CPI ou lui
préparer un retour triomphal au cas où il en sortirait.
Le camp d’en
face ne perdra pas le temps à attendre qu’ils finissent de pleurnicher et
fassent indéfiniment le deuil de leur gourou pour occuper le terrain. L’une des
prouesses du RDR est d’avoir réussi, en tout cas, à faire oublier l’Enfant
terrible de Mama dont il ne reste pratiquement plus grand-chose des années de
règne. L’ombre de Gbagbo a ainsi cessé de planer sur le processus de
normalisation de la Côte d’Ivoire, même si par moments ses partisans font de
l’agitation.
Il est heureusement indéniable que les Ivoiriens, du moins
ceux qui ont encore en mémoire les actes indignes du prédécesseur de ADO, ne le
regrettent nullement. Les patriotes ivoiriens, les vrais, ont mieux à faire que
de se faire du mauvais sang pour un gangster électoral qui fut de surcroît un
incitateur aux crimes en série. La reconstruction de l’armée et la poursuite de
la recherche de la totale réconciliation sont de loin des processus de longue
haleine qui méritent plus d’attention.
Pour avoir su avec tact, en un an
de gouvernance, faire cohabiter « chiens et chats » sans accrocs majeurs, ADO a
eu le mérite de sortir son pays de la zone de turbulences. Le pire est donc
passé, mais la trajectoire est encore longue pour réussir un vol paisible après
ce redécollage réussi. Car, le retour à une Côte d’Ivoire à la fois paisible,
prospère et hospitalière doit s’inscrire dans la durée.
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