(L'Express 17/04/2012) BISSAU - L'Union africaine (UA) a suspendu la Guinée-Bissau
à la suite du coup d'Etat du 12 avril, menaçant de sanctions les putschistes qui
ont interdit toute manifestation dans ce pays miné par l'instabilité et le
trafic de drogue.
Le Conseil de paix et de sécurité de l'UA "décide (...)
de suspendre, avec effet immédiat, la Guinée-Bissau de toutes ses activités de
l'Union africaine, tant que l'ordre constitutionnel ne sera pas rétabli", a
annoncé Ramtane Lamamra, commissaire africain, à l'issue d'une réunion à Addis
Abeba.
"Etant donné la fréquence des coups d'Etat en Guinée-Bissau", l'UA
a demandé à l'Afrique de l'Ouest "de lui soumettre, dans les deux semaines, une
décision ou une proposition de sanctions" contre les putschistes et leurs
soutiens civils et militaires, a-t-il dit.
Dans la nuit, une délégation
ouest-africaine, composée de hauts responsables politiques et militaires, avait
déjà affiché "une grande fermeté" face aux putschistes avec lesquels elle
s'était entretenue plusieurs heures, selon des sources proches des
discussions.
"La Cédéao (Communauté économique des Etats de l'Afrique de
l'ouest) a pour principe d'avoir une tolérance zéro pour tout exercice du
pouvoir par des voies non conventionnelles", a rappelé le président de sa
commission, Désiré Trago Ouédraogo.
Selon lui, les représentants de la
junte ont réaffirmé leur engagement, déjà proclamé à plusieurs reprises, de
rétablir les institutions dissoutes après le coup.
Pourtant, quelques
heures à peine après le départ de la mission ouest-africaine, la junte annonçait
l'interdiction de toute manifestation menaçant les contrevenants d'une "sévère
répression".
-Libérations exigées-
Dans l'après-midi, de jeunes
partisans de l'ancien Premier ministre Carlos Gomes Junior, arrêté par les
putschistes tout comme le président intérimaire Raimundo Pereira, avaient prévu
une marche à Bissau pour protester contre le coup d'Etat et réclamer la
"libération sans condition" des dirigeants interpellés.
Cette libération
est "une condition sine qua non d'un retour à l'ordre constitutionnel" avait
insisté dans la nuit de lundi à mardi le chef de la délégation
ouest-africaine.
Le coup d'Etat est intervenu à un peu plus de deux
semaines du second tour de la présidentielle qui devait opposer le 29 avril M.
Gomes Junior, donné favori, à son principal opposant Kumba Yala. Ce dernier
avait annoncé qu'il refusait d'y participer invoquant des "fraudes massives" au
premier tour.
Dimanche, 17 partis d'opposition, au premier rang desquels
le Parti de la Rénovation sociale (PRS) de Kumba Yalla, avaient accepté de
passer un accord avec la junte sur la dissolution des institutions du pays et la
création d'un Conseil national de transition (CNT). Lundi, leurs dirigeants
avaient tardivement condamné le putsch.
Le secrétaire général de l'ONU
Ban Ki-moon a estimé que les putschistes ne faisaient qu'"aggraver la crise
politique dans le pays en annonçant leur intention de mettre en place un
gouvernement national de transition".
Selon M. Ouédraogo, la Cédéao
"prendra des dispositions pour que les modalités du retour à l'ordre
constitutionnel soient précisées avec toutes les parties prenantes".
Il a
affirmé que la Cédéao était prête à "remplacer les troupes angolaises" dont la
présence dans le pays depuis 2011 n'a jamais été acceptée par l'armée
bissau-guinéenne.
Depuis son indépendance en 1974, la Guinée-Bissau,
ancienne colonie portugaise, a connu une succession de coups d'Etat, tentatives
de putsch et assassinats politiques, illustrant l'emprise d'une armée jugée
pléthorique pour un petit pays d'1,6 million d'habitants.
A plusieurs
reprises, des réformes de l'armée ont été annoncées sans jamais pouvoir être
mises en oeuvre.
publié le 17/04/2012 à 07:55, mis à jour à 16:02
© Copyright
L'Express
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire