vendredi 13 avril 2012

Guinée Equatoriale - MANDAT D’ARRET CONTRE TEODORIN NGUEMA: la justice ira-t-elle jusqu’au bout ?

(Le Pays 13/04/2012) C’est à peine croyable ! Teodorin Obiang, fils du président de Guinée Equatoriale, et actuel ministre de l’Agriculture et de la forêt de son pays, est poursuivi en France pour détournement de fonds publics et blanchiment, dans le cadre de l’affaire des biens mal acquis. L’espoir est donc permis de voir un jour la justice triompher, car, ce qui vient de se passer constitue un vrai cas de jurisprudence.
En effet, le parquet de Paris a donné son feu vert, le mercredi dernier, à la délivrance d’un mandat d’arrêt international contre le fils du président Teodoro Obiang Nguema Mbasogo himself. Ce mandat d’arrêt ne surprend pas, même si les proches clament que le fils du père Obiang n’a rien à se reprocher. Actuellement, l’on ignore où se trouve le ministre de l’Agriculture et des Forêts de Guinée Equatoriale. Etant donné l’existence de ce mandat, c’est à se demander s’il osera vraiment se présenter à nouveau en France. En tout cas, il devra rapidement trouver refuge dans son pays s’il veut échapper à Interpol et aux juges d’instruction français. Sous peu en effet, Teodorin Obiang aura à ses trousses les polices du monde entier. Déjà, en février dernier, les juges français avaient perquisitionné son hôtel particulier, avenue Foch à Paris. A cette occasion, ils avaient saisi de nombreuses voitures de luxe et des œuvres d’art, le tout pour une valeur estimée à plusieurs dizaines de millions d’euros.
L’homme est donc connu pour ses frasques. Et l’extravagance qui le caractérise ne doit pas étonner. Son penchant pour le faste lui vient d’un milieu qui a toujours vécu dans l’ignorance de la misère des autres. C’est à peu de choses près le comportement type des familles de certains dirigeants africains imbus d’eux-mêmes. Certes, de manière générale, l’âge aidant, et l’usure du pouvoir faisant le reste, certains dirigeants se font beaucoup plus discrets dans leurs agissements. Par contre, leur progéniture, comme dans un rêve ou au cinéma, aiment à s’adonner à certaines futilités. Dans le cas de la Guinée Equatoriale, les choses évoluent comme si ce pays et toutes ses ressources sont une propriété du clan Nguéma au pouvoir depuis des décennies.
D’autres personnes pourraient également connaître le même sort, les familles d’Ali Bongo du Gabon et de Denis Sassou Nguesso du Congo Brazzaville étant également visées par cette même instruction. Mais, l’affaire aura-t-elle une incidence réelle sur le comportement des gouvernants africains ? Rien n’est moins sûr ! Car, dans certains milieux, on trouve incompréhensible cette affaire des biens mal acquis. Il ne faut pas oublier que la Guinée Equatoriale, le Gabon et le Congo Brazzaville sont trois pays riches en pétrole. En outre, ils appartiennent tous à la sphère d’influence française. Par ailleurs, la justice demeure dans la plupart des républiques bananières africaines une justice aux ordres. L’impunité y a donc la vie dure. N’empêche que c’est un précédent fâcheux pour ceux d’en haut. Il va falloir désormais surveiller d’un peu plus près les frasques de cette progéniture qui a appris à jouir à outrance des ressources nationales. Elle prend toujours plaisir à vivre comme dans les contes, convaincue que le père et l’Etat forment une seule entité. Qui pourra donc contenir les appétits gargantuesques de ces enfants gâtés qui n’ont jamais eu de limites dans leurs excès ? Parviendra-t-on jamais à contenir les assauts répétés de ces « fils et filles à papa » contre la République, habitués qu’ils sont à confondre biens familiaux et deniers publics ? Résolument adeptes du « dépenser sans compter », ils se caractérisent par leurs appétits boulimiques, autant que par leurs agissements ostentatoires et leur arrogance.
C’est peu dire que d’affirmer que l’exemple vient d’en haut et tout autour. Tant qu’on œuvrera à le perpétuer, le processus de désagrégation de l’édifice national ne fera que s’intensifier et s’accélérer. Mais l’affaire constitue aussi un précédent heureux pour les autres. C’est en effet une demi-victoire pour les ONG et les défenseurs des droits de l’Homme qui traquent les auteurs des biens mal acquis.
Constamment mobilisés pour une gestion transparente des deniers publics, ils n’ont de cesse de dénoncer les comportements abusifs des gouvernants africains et leurs proches. Ce mandat d’arrêt est donc une sorte de baume, un encouragement à lutter davantage, même si ces ONG gagneraient en davantage de crédibilité, en dirigeant leurs radars sur des dirigeants d’autres continents, notamment l’Asie des princes arabes. Il ne faut point donc désespérer de voir l’appareil d’Etat débarrassé un jour de ces délinquants à col blanc. Ils n’ont aucune considération pour les peuples africains qui végètent dans la misère. Leur comportement révolte, car il encourage l’enrichissement illicite, l’indifférence et la paresse dans une Afrique qui a pourtant intérêt à redoubler d’effort et de vigilance pour rattraper son retard sur les autres. Aussi faut-il souhaiter que dans cette affaire, la justice française suive effectivement son cours, afin de donner l’exemple. Mais qu’il aurait été beau de voir des tribunaux du continent poser de tels actes !

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