vendredi 13 avril 2012

Les deux Soudans en guerre larvée pour le pétrole

(Le Figaro 13/04/2012) Des combats ont éclaté ces derniers jours dans plusieurs zones contestées où se concentrent d'importantes réserves de brut.
Les deux Soudans sont en guerre. Une guerre encore larvée mais une guerre tout de même. Les discours martiaux des dirigeants du Soudan du nord et ceux du Sud, indépendant de son frère ennemi seulement depuis juillet, ne trompent pas. Jeudi, à Khartoum, le président Omar el-Béchir a accusé son voisin d'avoir «choisi la voie de la guerre». Peu avant à Juba, devant un Parlement surchauffé, son homologue sudiste, Salva Kiir, avait affirmé qu'il tiendrait bon et «qu'il ne donnerait pas l'ordre à (ses) forces de se retirer» des zones contestées.
Les deux pays n'en sont pas restés aux mots. Depuis trois jours des combats opposent les deux armées, les plus violents des derniers mois, et impliquent l'artillerie lourde et l'aviation. Mardi, les troupes du Sud se sont emparées, pour la seconde fois en quinze jours, d'Heglig. Cette ville, officiellement située au nord, ouvre la porte des champs pétroliers du même nom. Une occupation pour le moins étonnante, les troupes du nord étant réputées être à la fois plus nombreuses et mieux équipées. L'armée de Khartoum, active sur de nombreux fronts tant au sud qu'au Darfour, a peut-être besoin de temps pour contre-attaquer. En attendant, l'aviation, en guise de réponse, aurait bombardé jeudi Bentiu, la capitale de l'État sudiste de Unity. Ce raid, le premier de ce type depuis la fin de vingt ans de guerre civile en 2005, visait une zone pétrolière, sudiste cette fois.
Le partage de la manne pétrolière est le cœur de cette crise. En accédant à l'indépendance, le Sud est devenu maître d'environ 75 % des réserves de brut de l'ex-Soudan. Mais la frontière entre les deux pays n'a jamais été précisément tracée, pas plus que n'a été réglée la question des droits de passage. Pour exporter son pétrole, le Sud, État enclavé, doit en effet utiliser des oléoducs qui traversent le Nord. En dépit de cinq ans de négociations molles, ces deux dossiers, qui s'ajoutent à d'autres contentieux portant notamment sur la nationalité, n'ont jamais connu de début de solution.
Référendum à venir
Jeudi, la crise s'est envenimée en se déplaçant vers Abyei, une enclave hautement contestée. Ce territoire, riche en brut mais aussi en eau et en pâturage, fait théoriquement l'objet d'un sort à part. Un référendum doit y être organisé pour laisser le choix aux habitants de se lier à l'un ou à l'autre des Soudans. Or Khartoum et Juba s'opposent sur la constitution du corps électoral. Jeudi, la capitale du Sud a donc affirmé être prête à une intervention militaire à Abyei pour en chasser les troupes nordistes. Une menace bien pesée. Dans la foulée, Salva Kiir s'est dit prêt à retirer ses hommes d'Helgig si le nord fait de même à Abyei.
Cette proposition a peu de chances de se concrétiser. Les autres tentatives de médiations organisées par l'Union africaine (UA) pour renouer les discussions ont échoué, avant même d'avoir pu s'ouvrir. Les deux pays, qui n'ont aucun intérêt à une guerre, semblent en fait chercher à se placer en position de force pour de futurs pourparlers. Jeudi, la chef de la diplomatie de l'Union européenne (UE), Catherine Ashton, s'est faite plus menaçante, jugeant «inacceptable» l'occupation d'Heglig après des appels similaires de l'ONU et de l'UA.

Par Tanguy Berthemet
Par Tanguy Berthemet Mis à jour le 13/04/2012 à 07:19

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1 commentaire:

  1. La guerre pour le pétrole détruit l'Occident
    Les décisions des autorités de l'Argentine et la Hongrie, de renforcer leur souveraineté nationale a une incidence négative sur la domination absolue de l'Occident.

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