mardi 5 avril 2011

Côte d'Ivoire - La France et l’ONU devaient-elles intervenir en Côte d’Ivoire ?

(France 24 05/04/2011)

L’intervention militaire de la Force des nations unies en Côte d’Ivoire (Onuci) et de la force française Licorne ont joué un rôle déterminant pour contraindre les troupes du président sortant, Laurent Gbagbo, à cesser les combats. Alors que certains se réjouissent de cette intervention, qui devrait "soulager les populations civiles", d’autres parlent d’un "coup d’État de la France".
L’Onuci et la force Licorne ont tiré lundi depuis des hélicoptères sur les camps militaires d'Agban et d'Akouédo, ainsi que sur le palais et la résidence présidentiels. L'ONU et la France ont expliqué avoir agi en vertu de la résolution 1975 du Conseil de sécurité pour "neutraliser les armes lourdes utilisées contre les populations civiles". Mardi matin, les hélicoptères de la Licorne ne se sont pas engagés dans de nouvelles attaques, mais ils ont continué de survoler la ville.
Le général Mangou, qui dirige les troupes fidèles à Gbagbo, a déclaré mardi que "suite au bombardement par les forces françaises de certaines de nos positions et de certains points stratégiques de la ville d'Abidjan, nous avons nous-mêmes arrêté les combats et nous avons demandé au général commandant l'Onuci un cessez-le-feu". Peu après, le ministre des Affaires étrangères français, Alain Juppé, a reconnu l’existence de négociations avec Laurent Gbagbo sur son départ du pouvoir.
C’était très important qu’il y ait eu une intervention pour soulager les civils. Mais ça aurait dû être fait bien avant. Les gens sont notamment soulagés de savoir que la poudrière [le camp militaire] d’Akouédo a été détruite, car c’était un point de ravitaillement en armes essentiel pour les FDS [Forces de défense et de sécurité, fidèles au président sortant Gbagbo, NDLR]. Stratégiquement, c’était important de fournir à Ouattara l’appui aérien dont il avait besoin pour avancer sur la ville.
Evidemment, les Français vont être pris pour cible. Mais il faut arrêter de se plaindre. On a fait le choix de vivre ici, on sait comment les choses fonctionnent. N’oublions pas qu’il y a aussi beaucoup de désinformation dirigée contre nous. C’est l’ONU qui a décidé d’agir, pas la France. [La force Licorne peut intervenir comme un appoint de l'Onuci, en cas de nécessité, conformément aux résolutions de l'ONU, NDLR ]
Je pense toutefois que l’intervention doit s’arrêter là. Protéger les civils c’est une chose, prendre le palais présidentiel ou la résidence, c’est l’affaire des Ivoiriens.
La situation va pourrir. Même si Ouattara prenait le pouvoir, j’ai du mal à imaginer qu’il puisse gouverner un pays aussi divisé."
L’intervention de l’Onuci et de la force Licorne est incompréhensible. Les forces françaises avaient déjà pris le contrôle de l’aéroport, et elles attaquent maintenant des positions des FDS. Ce n’est pas justifié. L’ONU a dit vouloir détruire les armes lourdes, mais ces armes étaient tout aussi présentes et menaçantes du côté des pro-Ouattara. La France a décidé de déstabiliser les institutions ivoiriennes. Je suis meurtri et indigné.
Je ne crois pas qu’il y ait de risques de représailles contre les Français de Côte d’Ivoire. Depuis 2004, on distingue la position des autorités françaises et la position des ressortissants français. On a conscience que le président Sarkozy ne les consulte pas forcément avant de prendre ses décisions.
Mais en tant qu’Ivoirien, je me sens en danger, car si la France réussit son coup d’Etat, on va avoir un pouvoir autoritaire et autocratique. Ouattara n’est pas un enfant de choeur. Ceux qui expriment une opinion différente seront réprimés. Et je ne suis pas sûr que les médias français en parleront, car ce sera un pouvoir ami. On ne parle par exemple pas beaucoup de ce qui s’est passé à Duékoué. La France n’aurait pas dû aller aussi loin."

http://observers.france24.com/fr/content/20110405-france-onu-intervention-cote-ivoire-licorne-onuci-habitants-abidjan-temoignages
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