(Le Nouvel Observateur 24/02/2011)
L'étau se resserre autour du dirigeant libyen. Une partie du pays n'est plus sous son contrôle et au sein même de son pouvoir, les défections se multiplient. La communauté internationale se rapproche de l'adoption de sanctions.
Combien de temps le dirigeant libyen, le colonel Kadhafi va-t-il pouvoir tenir alors qu'une partie du pays est tombé, que les défections au sein de son pouvoir et son armée se multiplient et que la communauté internationale envisage sérieusement de sanctionner le régime libyen ? Le dirigeant libyen Mouammar Kadhafi était de plus en plus isolé jeudi 24 février.
Durant des décennies, le Guide de la révolution s'est appuyé sur les rivalités tribales et politiques pour asseoir son pouvoir, mais force est de constater que le système qu'il a mis en place est en train de s'effondrer alors que la rébellion gagne du terrain.
Son régime lui tourne le dos
Au sein même du régime libyen, les défections ont continué avec le ralliement du ministre de l'Intérieur, Abdel Fatah Younes à la "révolution" en appelant les militaires à abandonner le Guide. Le ministre de la Justice a lui aussi démissionné.
Une dizaine de généraux et de colonels ont lâché le régime et ont juré fidélité au peuple libyen et à la révolution. "J'ai démissionné et je suis venu à Al-Baïda pour être solidaire de mon peuple. Je serai en première ligne pour nous défendre contre toute attaque venant de l'extérieur", assure le général Salah Mathek, un responsable de la police judiciaire.
"Ils nous ont ordonnés d'attaquer le peuple et j'ai refusé. On ne peut pas utiliser les armes contre nos jeunes", explique un autre général, Abdel Aziz al-Busta.
"On parle de marcher sur Tripoli. Notre objectif est Tripoli, si Tripoli n'arrive pas à se libérer par lui-même", dit un autre officier.
Il y a deux jours, le pilote d'un chasseur a lâché son appareil se faisant éjecter après avoir refusé des ordres de bombarder Benghazi. Lundi ce sont deux chasseurs et deux hélicoptères qui ont atterri à Malte, leurs pilotes ayant déserté.
Démission de diplomates à la chaîne
De nombreux diplomates libyens en poste à l'étranger ont aussi fait défection. L'ambassadeur de Libye en France et son collègue de l'Unesco, également en poste à Paris, ont condamné le régime du colonel... mais veulent garder leurs postes. D'autres les ont imités, comme l'ambassadeur à Vienne (Autriche), en dénonçant "le recours excessif à la violence contre des manifestants pacifiques".
Sanctions de la communauté internationale
Après des jours d'hésitations, l'Union européenne se rapprochait de sanctions jeudi , dénonçant un "bain de sang", un "génocide" voire même des "crimes contre l'Humanité". Après la Finlande et l'Allemagne, la France et le Luxembourg sont montés au créneau mercredi pour demander qu'on sévisse à l'encontre du numéro un libyen et des auteurs de la sanglante répression dans le pays.
Le président français Nicolas Sarkozy s'est prononcé en faveur de "sanctions concrètes" de l'UE, ciblées contre des caciques du régime, et a souhaité la suspension des relations économiques et financières avec Tripoli. Le ministre de la Défense, Alain Juppé, a clairement souhaité le départ du colonel tout en affirmant qu'une intervention militaire étrangère en Libye n'était pas d'actualité. "On parle parfois de la non-ingérence dans les affaires des pays à travers la planète, mais il y a un autre devoir qui a été très clairement adopté par les Nations Unies, c'est la responsabilité de protéger", a-t-il dit. L'ancien ministre socialiste des Affaires européennes, Pierre Moscovici, en a appelé mercredi soir à "la communauté internationale, l'Union européenne et la France" pour "obtenir le départ du dictateur".
Le ministre luxembourgeois des Affaires étrangères Jean Asselborn a évoqué "des restrictions de visa" et le gel des comptes bancaires "des membres du clan Kadhafi".
"J'ai vu des crimes horribles qui sont inacceptables et ne peuvent rester sans conséquences", a souligné le président de l'UE, Herman Van Rompuy. Kadhafi a "perdu toute légitimité" en décidant de "bombarder ses propres citoyens", a dit la chef de la diplomatie espagnole Trinidad Jimenez. Barack Obama a solennellement averti que le régime de Mouammar Kadhafi aurait à rendre compte de ses actes.
Le Pérou a été le premier Etat à rompre ses relations avec la Libye, en signe de protestation contre la violence. Et le Conseil des droits de l'homme de l'ONU tiendra vendredi une session spéciale sur la Libye.
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