(Le Pays 19/09/2011)
La récente visite de Nicolas Sarkozy et de David Cameron en Libye et la reconnaissance par l’ONU (Organisation des Nations unies) du CNT (Conseil national de transition) n’y font rien. La rébellion butte sur une résistance farouche des partisans du colonel Kadhafi, reclus dans les villes de Syrte et de Bani Walid. Elle y a même subi des revers, qui l’ont obligée à se retirer de ces villes.
C’est dire qu’une chose est d’avoir des succès diplomatiques, et une autre est d’être efficace sur le terrain militaire. Les forces du CNT ont-elles sous-estimé la capacité de résistance de leurs adversaires au point de se jeter dans la gueule du loup ? Ou alors ont-elles voulu faire usage du minimum de leur force de frappe pour éviter la mort de civils ? On sait que c’est en désespoir de cause que l’offensive militaire a été lancée contre les dernières grandes villes aux mains des pro-Kadhafi. Jusqu’au bout, le CNT a engagé des négociations pour une reddition de ces villes, en vain. Sans doute le CNT subodorait-il le péril d’une offensive militaire.
Ses craintes sont confirmées. Avec ses derniers revers, les errements organisationnels du CNT refont surface, comme au premier jour des combats. Cela ne laisse pas une bonne impression aux yeux du peuple et de la communauté internationale. Le désordre peut apparaître, à ce rythme, consubstantiel au mode de fonctionnement du CNT. Il se pose dès lors la question de la capacité de cet organe d’assurer convenablement la transition, à travers la rédaction d’une constitution et l’organisation d’élections.
Pour lever tous ces doutes, il va sans dire que le CNT doit libérer entièrement le pays dans les meilleurs délais. La Libye libérée ne peut pas se permettre des enclaves insurrectionnelles dirigées par des pro-Kadhafi. Dans les dernières confrontations, le CNT doit cependant faire face à un dilemme : comment libérer Syrte et Bani Walid sans faire des victimes civiles ? Car le CNT doit éviter de reproduire les mêmes erreurs que son ennemi juré, Kadhafi, en bombardant aveuglément les villes. Les hésitations des forces du CNT sont sans doute plutôt le fait d’une volonté d’épargner des civils que d’un déséquilibre militaire.
Après six mois de combats, les soldats du CNT ont prouvé qu’ils ne sont plus ces volontaires engagés mais peu aguerris à l’art de la guerre. Ils ont un vrai arsenal et ils sont désormais mieux rompus au maniement des armes. C’est donc probablement les modalités d’intervention qui posent problème. Mais ces hésitations peuvent coûter cher au CNT car les partisans de Kadhafi n’ont aucun état d’âme. Pour faire passer momentanément la pilule de ces revers militaires, le CNT doit pouvoir au moins présenter un nouveau gouvernement consensuel et rassurant.
Car les seules victoires diplomatiques ne suffisent pas pour asseoir la légitimité du nouveau pouvoir. Il lui faut aussi avoir une emprise sur l’ensemble du territoire libyen. C’est ce à quoi il s’attelle, non sans mal.
Mahorou KANAZOE
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