(Xinhuanet 26/06/2012)
TUNIS -- La décision d'extrader l'ex-Premier ministre libyen M. Bagdadi Mahmoudi vers son pays "est légitime", a déclaré lundi aux médias locaux et étrangers à La Kasbah (siège du gouvernement), le ministre tunisien de la Justice M. Noureddine Bhiri.
Personne n'est à l'abri de l'erreur, mais la décision du gouvernement "est la bonne", a-t-il avoué, indiquant que le gouvernement "n'a rien à cacher" et que "l'exécutif tunisien agit selon le principe de la transparence".
Détenu depuis septembre 2011 en Tunisie, l'ancien responsable libyen a été livré en Libye sans l'aval du président tunisien qui détient, selon la présidence de la République, la prérogative de signer le décret de cette extradition.
Ainsi, le chef d'Etat tunisien a décidé de soumettre à l'Assemblée constituante ce qu'il a qualifié de "transgression de ses prérogatives" afin de prendre les dispositions qui s'imposent suivant la loi portant sur l'organisation provisoire des autorités publiques, d'après une déclaration de la présidence de la République tunisienne.
Bien que les relations entre les institutions d'Etat tunisien soient "amicales", les propos avancés par la présidence de la République prouvent "un profond désaccord entre Carthage ( présidence) et La Kasbah (gouvernement) au sujet de l'extradition de Bagdadi Mahmoudi", a affirmé M. Bhiri.
"L'extradition de l'ancien Premier ministre libyen est une décision illégitime, prise de manière unilatérale et sans concertation entre les trois présidences (gouvernement, présidence et Constituante) et sans l'accord et la signature du Président de la République", a indiqué le porte-parole de la présidence tunisienne M. Adnen Monser suite à l'extradition dimanche matin de Mahmoudi.
M. Monser a argumenté, dans un communiqué, que "la remise de Mahmoudi aux autorités libyennes relève de la politique étrangère de la Tunisie plus que du domaine de la magistrature".
La politique étrangère, a-t-il précisé, "relève des prérogatives de la présidence de la République et en cas de litige, il convient de consulter la Constituante".
Cette hypothèse a été ripostée par le porte-parole du gouvernement tunisien M. Samir Dilou, révélant que "la remise de Mahmoudi dimanche aux autorités libyennes ne constituent en fait qu'une opération technique, administrative et judiciaire, en exécution d'une décision de justice, approuvée à la majorité absolue au Conseil des ministres".
La décision d'extradition, a-t-il ajouté lundi lors d'une conférence de presse, a eu lieu en conformité avec les dispositions du Code des Procédures Pénales et que "cette approbation par le gouvernement de Jebali va dans le même sens que celle prise par le gouvernement précédent".
Toutefois, la "Troïka" (coalition tripartie au pouvoir) avait convenu auparavant de livrer Bagdadi Mahmoudi après l'organisation des élections libyennes et la garantie de toutes les conditions d' un procès équitable à l'accusé, toujours selon le porte-parole de la présidence tunisienne.
Suite à la livraison de Mahmoudi au gouvernement de transition libyen, la présidence tunisienne a imputé au Premier ministre M. Hamadi Jebali – qui a signé l'extradition – "l'entière responsabilité de tout ce qui peut arriver à Mahmoudi et des répercussions qui peuvent en découler sur la Troïka", a prévenu M. Monser.
Les réactions suites à l'extradition de Bagdadi Mahmoudi ont pris de l'ampleur du côté de l'opposition, de la société civile, voire même de parties appartenant à la coalition au pouvoir en Tunisie.
Selon Ahmed Najib Chebbi, du parti "Al-Joumhouri" (Le Républicain), "l'équilibre gouvernemental risque d'être menacé suite à l'extradition de Bagdadi Mahmoudi aux autorités libyennes".
La "crise au sommet de la Troïka", a-t-il déclaré à la presse, s'est amplifiée pour affecter l'institution du pouvoir en Tunisie à la lumière de la déclaration publiée par la présidence de la République suite à la décision d'extradition de Mahmoudi, qui demeure une "pure transaction financière".
Des observateurs étrangers ont également exprimé leur étonnement de la décision de livrer M. Mahmoudi par les autorités tunisiennes, à même d'appeler le Président Marzouki à démissionner de son poste.
"La Tunisie a précipité l'extradition de l'ancien Premier- ministre libyen et ce malgré l'opposition du président Marzouki", s'est exprimé lundi Abdelbari Atwan, le rédacteur en chef du quotidien arabe "Al-qods Al-Arabi" (journal qui diffuse de Londres) .
Etant l'une des figures principales défendant les droits de l' Homme, Moncef Marzouki "devrait démissionner en signe de protestation d'avoir été dépassé et d'avoir permis l'extradition de Bagdadi Mahmoudi", a indiqué M. Atwan.
Ce dernier a également exprimé son étonnement du fait qu'"un gouvernement élu par le peuple a cédé au chantage d'un gouvernement transitoire qui n'a aucune légitimité", tout en précisant que les révolutionnaires de Zintène (Libye) "ont carrément refusé de livrer Seïf El-Islam Kadafi au gouvernement libyen".
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