Le Pays 16/06/2010)
Officiellement, on sait maintenant la raison pour laquelle une dizaine d’officiers de l’armée guinéenne proches de l’ex-chef de la junte Moussa Dadis Camara, avaient été privés de leur liberté avant d’être élargis le 14 juin dernier. Selon le chef d’état-major général de l’armée guinéenne, le colonel Nouhou Tiam, les galonnés avaient été interpellés et gardés à la gendarmerie pour des clarifications sur leur gestion de la grande muette, du temps où leur mentor était aux affaires.
Et comme on n’a rien trouvé "d’opaque" dans leur gestion, ils ont donc été libérés sans explication comme d’ailleurs au moment de leur interpellation. Tous ceux qui avaient vu des raisons politiques à ces interpellations s’étaient lourdement trompés, à en croire toujours le colonel Thiam, qui a dit tout de go que "l’interpellation des officiers n’a rien de politique". Idem pour tous ceux qui faisaient état de "dédadisation" de l’armée guinéenne. Rien de tout cela, foi du chef d’état-major général. Tant mieux alors ! Toutefois, on ne voudrait pas prendre des lanternes pour des vessies en croyant naïvement à la version servie par le colonel.
Les interpellations sont difficilement dissociables du contexte de suspicion envers les partisans de Dadis Camara qui ne digèrent pas la mise à l’écart, par la force des choses, de leur leader. Lesdits partisans sont surveillés comme du lait sur le feu et on n’hésite pas à les inquiéter à tort ou à raison pour des paroles dites ou des actes posés qui sont vite taxés de subversion. La version du chef d’état-major pourrait vraiment faire mouche si dans le lot des interpellés il n’y avait pas que des pro-Dadis.
Mais avec ce dénominateur commun, il est difficile que les problèmes de gestion mis en avant pour expliquer les interpellations ne servent vraiment qu’à mieux masquer la vérité. D’ailleurs, on serait mieux situé si l’un des interpellés disait ce qui est reproché au groupe. Sans cela, on ne peut être que dubitatif et surtout regretter que des interpellations sans procédure judiciaire et sans motif officiel se poursuivent toujours en Guinée. Cela rappelle une période pas très glorieuse notamment celle de Sékou Touré où ces pratiques ont envoyé des personnes innocentes au tristement célèbre camp Boiro pour les plus chanceux. Fort heureusement, on n’est pas arrivé à cette situation parce que les contextes ont changé. La remise en liberté des officiers est à saluer.
Elle est la preuve du triomphe de la sagesse, celle d’un homme, même si son nom n’a pas été beaucoup évoqué dans cette affaire : Sékouba Konaté. Son obsession pour une transition sans heurts permet au pays tout entier d’éviter des crises inutiles et les récifs que constituent les obstacles volontairement dressés sur le trajet par tous ceux qui adorent pêcher en eaux troubles.
Il faut vraiment une hauteur d’esprit, un extraordinaire détachement du pouvoir d’Etat pour conduire le navire Guinée à bon port sans se laisser distraire. Et c’est le défi que Sékouba Konaté compte relever. Il ne lui reste plus que quelques jours pour que cela se réalise.
Séni DABO
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