(Le Pays 26/03/2013) Les Sénégalais ont bouté Abdoulaye Wade hors du pouvoir le
25 mars 2012 pour deux raisons essentielles : la mauvaise gestion des deniers
publics et l’incapacité à lutter contre la cherté de la vie. Un an après avoir
placé leurs espoirs en Macky Sall, peuvent-ils se réjouir de leur choix ? Leurs
attentes ont-elles été comblées ? Au regard de la profondeur de la crise que
connaissait le Sénégal aux plans social, économique, politique et moral, Macky
Sall pouvait-il faire mieux ?
En tout cas, le fait est que les
Sénégalais n’ont pas encore vu le miracle se réaliser. Le thiéboudiène demeure
cher à cuisiner et peu accessible à bien des familles. Or ce plat national
sénégalais rythme la vie du pays. Préparé à base de riz et de poisson
essentiellement, il ne doit en aucun cas manquer dans le repas quotidien du
Sénégalais. Mais combien sont aujourd’hui capables de s’offrir ce plat qui a
tendance à relever du luxe ? Certes, le président Macky Sall veut révolutionner
les habitudes alimentaires des Sénégalais en les amenant à consommer du riz
local dont il compte développer la production.
Mais en un an, une telle
révolution est impossible. Le nouveau président devrait aussi relever le défi
des pannes électriques à Dakar qui ont sinistré l’économie de la capitale. Les
délestages sont-ils un mauvais souvenir pour les Dakarois ? On peut en douter.
Là aussi, la crise structurelle du secteur de l’énergie est si grave qu’il faut
des années de travail et des investissements colossaux pour offrir de
l’électricité en permanence et à prix abordable aux Sénégalais. Mais on se
demande si le Sénégal peut, tout seul, sans intégrer sa politique dans un cadre
sous-régional, s’en sortir ?
Presque tous les pays d’Afrique de l’ouest
sont en proie à une crise énergétique aiguë. Macky Sall a donc des circonstances
atténuantes à ce niveau, même si le rôle d’un gouvernant est de satisfaire aux
attentes des populations. Dans ce même registre des aspirations sociales, on
peut dire que la question du chômage des jeunes demeure une bombe à retardement
au Sénégal. Certes, on ne voit plus ces scènes terribles de « boat people »
sénégalais périssant dans les mers à la recherche d’un hypothétique paradis.
Mais il faut se détromper. Ce n’est pas tant la résolution des problèmes du
chômage qui a mis fin à cet exode de la mort, que les mesures de répression mise
en place par l’Europe à travers notamment le dispositif FRONTEX.
Au
total, la liste est longue, des espoirs toujours non comblés pour les
Sénégalais. Mais ils doivent cependant se réjouir d’un acquis de taille qui a le
don d’être peu perceptible : l’apaisement politique, les libertés restaurées et
la justice libérée. C’est le retour à l’Etat de droit plein dont les fondements
ont sérieusement été ébranlés par le système Wade. Il ne peut en être autrement
puisque Macky Sall a ancré sa politique sur le respect des institutions. Cette
première année de son mandat a, de ce fait, été marquée par le rétablissement
des institutions dans leurs missions régaliennes. Cela passe sans doute par une
moralisation de la vie publique, d’où la grande opération de traque des biens
mal acquis. Le système prébendier mis en place par le clan Wade ne pouvait
servir de socle à un quelconque développement du pays. Il fallait faire table
rase de ces pratiques peu orthodoxes qui ont gangrené bien des sphères de la
société, et repartir sur de nouvelles bases. Mais peut-être, Macky Sall a-t-il
donné plus de place à ce travail de nettoyage des écuries d’Augias, qu’à la
satisfaction des besoins urgents des Sénégalais. En tout état de cause, il
n’aura plus d’excuse pour le reste de son mandat. C’est sans doute la fin de
l’état de grâce.
Mahorou KANAZOE
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