(Le Figaro 04/03/2013) L'élite des troupes du président Idriss Déby affronte en
première ligne, avec une grande efficacité, les djihadistes dans les contreforts
du nord malien.Début février, dans le Gao tout juste libéré des forces
islamistes, les soldats tchadiens restaient discrets. Tout juste voyait-on de
temps à autre un de leur pick-up sable monté d'une dizaine hommes puissamment
armés, un chèche remonté jusqu'aux yeux. Sans doute cette avant-garde du plus
puissant contingent étranger au Mali derrière l'armée française, avec quelque 2
000 militaires, savait-elle qu'elle ne resterait pas longtemps dans cette ville.
L'objectif était déjà le grand Nord, le combat au près contre les islamistes.
Désormais, le gros des Fatim (Forces armées tchadiennes en intervention au Mali)
s'engage au plus profond des montagnes de l'Adrar des Iforas, dans l'extrême
nord-est du pays, où se sont retranchés des djihadistes.
Le 22 février,
au cours d'un engagement sérieux, les Fatim ont perdu 26 hommes, les plus
grosses pertes des armées de la coalition. Les djihadistes auraient, selon les
officiers tchadiens, perdu 96 personnes. Les conditions précises de cette
bataille, comme le lieu, demeurent imprécises. «C'était un assaut d'une position
pas une embuscade», précise-t-on simplement. Il démontre, dans tous les cas,
l'utilité du soutien tchadien dans cette
opération.
Pour la France, l'entrée en
guerre tchadienne fut, sinon une surprise, au moins une bonne nouvelle. Avant
même l'ouverture des hostilités, et alors que la situation au Mali se
détériorait, les militaires français plaidaient pour recevoir l'appui de ces
troupes. «Dans cette partie du continent, l'armée tchadienne est la seule à être
suffisamment nombreuse, équipée et entraînée pour être réellement efficace»,
souligne un officier français. Les armées ouest-africaines, engagées d'entrée
aux côtés de l'État malien, souffrent en effet de graves lacunes logistiques et
tactiques. L'expérience des Tchadiens dans les terrains désertiques rendait leur
engagement plus précieux encore, tout comme leur habitude de se coordonner avec
les Français.
L'intervention des Fatim n'allait pourtant pas d'elle-même.
Au Quai d'Orsay, des diplomates s'inquiétaient des conséquences que pourrait
avoir une collaboration aussi proche entre Paris et le régime de N'Djamena, loin
d'être un modèle de démocratie. Ils s'interrogeaient aussi sur les règles
d'engagement des Tchadiens pas toujours très respectueuses des lois de la guerre
édictées en Occident.
La question semble s'être réglée lors d'une visite
du président Déby à l'Élysée le 5 décembre dernier et d'un long tête-à-tête
entre François Hollande et son homologue. Paris a toujours nié avoir négocié.
Mais N'Djamena n'a jamais caché son intention de régler à cette occasion
quelques dossiers en souffrance, notamment celui de L'Arche de Zoé.
Une
force autonome
Seule certitude, le Tchad s'est très vite engagé après
l'intervention «surprise» des Français, le 14 janvier. En masse. C'est l'élite
des troupes tchadiennes qui a été déployée, notamment la garde présidentielle,
pour la plupart des Zaghawas, le clan de Déby. Elles ont été placées sous le
commandement du général Oumar Bikomo, mais surtout sous les ordres opérationnels
du fils du président, le général Mahamat Déby.
Leur intervention depuis
le Niger, et non depuis Bamako, montre que les Tchadiens ne se sont pas vu
confier une simple mission d'appui ou de soutien. «Les Tchadiens opèrent de leur
côté, avec les Nigériens, sous le commandement de la coalition. Les Français et
les Tchadiens ne se battent pas ensemble», assure-t-on à Paris. L'armée
française a simplement déployé un détachement de liaison d'une quinzaine
d'hommes auprès du QG tchadien pour coordonner les efforts et régler les
interventions aériennes.
De son côté, le président tchadien trouve lui
aussi matière à se féliciter. Si, au Tchad, l'intervention est parfois
critiquée, notamment après la bataille du 22 février, elle impressionne en
Afrique. Idriss Déby a pu ainsi s'imposer comme un leader régional. Et c'est
comme un leader qu'il a tancé ses pairs, le 27 février, lors d'un sommet de la
Cédéao, les enjoignant à «plus de célérité» dans le déploiement de leurs
troupes.
Par Tanguy Berthemet
Journaliste Figaro
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Figaro
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