(La Croix 25/06/2010)
Le premier tour de l’élection présidentielle en Guinée, premier scrutin libre depuis l’indépendance, a lieu dimanche 27 juin.
Pour la première fois en cinquante-deux ans, les électeurs guinéens ne connaissent pas à l’avance le vainqueur de l’élection présidentielle dans leur pays. Celle qui se tient dimanche 27 juin, dont tout porte à croire qu’elle sera transparente, est une avancée inespérée dans ce petit pays ouest-africain qui n’a connu, depuis son indépendance, que deux dictateurs, Sékou Touré et Lansana Conté, puis une transition militaire marquée par la tuerie du 28 septembre 2009 au stade de Conakry (plus de 150 morts).
« Le peuple attend cette élection », résumait récemment Rabiatou Serah Diallo, présidente du Conseil national de transition. Pour cette syndicaliste comme pour de nombreux Guinéens, c’est l’occasion unique de sortir d’un long cycle dictatorial. Le capitaine Moussa Dadis Camara avait été accueilli comme le sauveur après la mort de Lansana Conté, fin 2008, sur la promesse de rendre le pouvoir aux civils.
Une avancée inespérée dans ce petit pays ouest-africain
Mais l’homme a rapidement montré un visage fantasque et inquiétant, convoquant à longueur de nuit chefs d’entreprise et fonctionnaires pour de longs procès télévisés. Alors que Moussa Dadis Camara faisait déjà campagne pour se maintenir au pouvoir, une tentative d’assassinat commise par son aide de camp l’a laissé handicapé et l’a sorti du jeu.
Cet événement, couplé au massacre des manifestants du stade de Conakry, a entraîné la mobilisation de la communauté internationale. Adoubé par la France et les États-Unis, le général Sékouba Konaté a pris la tête d’une transition beaucoup plus consensuelle, où l’opposition aux régimes précédents a eu sa place. Nouvelle Constitution, nouveau code électoral, campagne sereine : tout semble réuni pour faire de l’élection de dimanche un moment historique.
À condition que les prétendants au fauteuil présidentiel jouent le jeu, dans un pays traversé par des fractures ethniques.
Mobilisation de la communauté internationale
Les Malinkés accepteront-ils une victoire du Peul Cellou Dalein Diallo, ancien premier ministre, jugé favori ? Les Peuls admettront-ils l’arrivée au pouvoir du Malinké Alpha Condé, opposant historique ? C’est la question que se posent les observateurs de la vie politique guinéenne.
Représentant un gros tiers de la population, les Peuls, qui détiennent le pouvoir économique et comptent le plus grand nombre de cadres, dans le public comme dans le privé, ont massivement investi dans la campagne de leur champion.
À l’inverse, l’électorat de Haute-Guinée, qui s’était jusqu’ici toujours mobilisé derrière Alpha Condé, va probablement se disperser, notamment en faveur des anciens premiers ministres François Lonsény Fall et Lansana Kouyaté. Cela pourrait faire le jeu du candidat de la Basse-Guinée, Sidya Touré, qui pourrait jouer les arbitres entre Peuls et Malinkés lors d’un probable second tour.
Laurent d’ERSU
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