(Le Figaro 12/12/2012)
Washington souhaite dissocier le processus de réconciliation avec les Touaregs et la mise en place d'une force d'intervention contre les groupes islamistes au Nord du pays.
L'objectif est le même - éradiquer la menace terroriste en provenance du nord du Mali -, mais les moyens d'y parvenir diffèrent. Les États-Unis s'opposent au projet de résolution déposé par la France à l'ONU pour autoriser l'envoi d'une force militaire africaine de plus de 3000 hommes au Mali, malgré les appels répétés du Conseil des ministres de la Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao). Le Conseil de sécurité de l'ONU a «condamné » l'arrestation et renouvelé ses menaces de «sanctions ciblées» contre les ex-putschistes et le Quai d'Orsay a rappelé mardi que la démission du premier ministre malien, Cheick Modibo Diarra, soulignait l'urgence d'un «déploiement rapide de la force de stabilisation ». Mais les États-Unis, qui jugent le concept français «non viable », ont fait une contre-proposition en début de semaine au Conseil de sécurité.
La France propose une seule et même mission gérant à la fois le processus de réconciliation politique nationale avec les Touaregs et la mise en place d'une force d'intervention militaire contre les groupes islamistes au nord avec une possible intervention à l'automne 2013. Ce seraient les Maliens eux-mêmes, une fois formés qui interviendraient au nord.
Les États-Unis souhaitent dissocier les deux missions. Ils sont d'accord pour une mission onusienne en charge de la réconciliation politique, mais veulent repousser à plus tard l'autorisation d'une opération militaire au nord. Ils préfèrent deux missions onusiennes sur le sol malien: une politique et une chargée uniquement d'entraînement militaire pour le moment. La France ne voit pas d'un bon œil la présence de deux missions au Mali.
À New York, la diplomatie française estime avoir le soutien des treize autres pays du Conseil de sécurité, mais doit compter avec Susan Rice, qui ne cède rien. Selon un diplomate new-yorkais, l'ambassadrice américaine estime incapables la Cédéao et une armée malienne partiellement reconstruite de venir à bout des islamistes au nord. «Elle ne pense pas que six mois suffiront à former l'armée malienne et préférerait des Tchadiens pour aller régler le problème parce qu'ils ont la réputation d'être de vrais combattants du désert », explique un diplomate de l'ONU.
Les réticences de Ban Ki-moon
Selon le Wall Street Journal, les autorités américaines seraient divisées. Les responsables de la lutte antiterroriste au Pentagone, soutenus par une partie de l'Administration Obama, seraient disposés à agir vite. Certains chercheraient à obtenir une plus grande marge de manœuvre pour mener éventuellement eux-mêmes des opérations spéciales contre les salafistes de l'Aqmi (al-Qaida au Maghreb islamique) et le Mujao (Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest), présents au nord du Mali. D'autres craignent les conséquences régionales d'une telle action.
La position du secrétaire général de l'ONU, Ban Ki-moon, ne facilite pas la tâche des Français. Réticentes à soutenir une opération de guerre, qui ne correspond pas aux principes de l'organisation, les Nations unies traînent des pieds pour le financement des opérations et s'inquiètent de possibles violations des droits de l'homme. Le coût annuel d'une mission telle qu'envisagée par la France est évalué à 200 millions d'euros et prévoit une participation de l'ONU, de l'Union européenne, de la France et des États-Unis. En attendant un dénouement au Conseil de sécurité, l'Union européenne a autorisé l'envoi au Mali début 2013 d'une mission de 400 militaires européens pour encadrer les troupes maliennes.
Par Adèle Smith
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