(Le Figaro 13/12/2012)
La vacance du pouvoir n'aura pas duré. Mardi soir, moins de vingt heures après la démission forcée de Cheick Modibo Diarra, un nouveau premier ministre a été nommé à Bamako, Diango Sissoko. «Ce choix n'est pas une surprise et devrait contenter un peu tout le monde», souligne une figure politique malienne.
Le nouveau chef du gouvernement a des arguments pour plaire. Il a toujours affiché une certaine distance tant vis-à-vis du président par intérim Dioncounda Traoré que de la junte conduite par le capitaine Amadou Haya Sanogo. À 62 ans, il bénéficie aussi d'une solide expérience politique accumulée dans les divers postes de ministres occupés lors de la présidence du dictateur Moussa Traoré, puis celle d'Amadou Toumani Touré. «Il devrait être plus fiable et compétent que Diarra», explique Gilles Yabi, du centre de réflexion International Crisis Group (ICG). Car c'est bien les erreurs accumulées par son prédécesseur qui font pour l'heure sa principale force. En huit mois d'exercice, Cheick Modibo Diarra s'est coupé, par ses atermoiements, de ses soutiens extérieurs. À l'intérieur, ses ambitions politiques et les entraves mises dans le processus de réconciliation lui ont valu de solides inimitiés. D'entrée, le nouveau premier ministre s'est donc attaché à rassurer. «La priorité, c'est la récupération du Nord et l'organisation des élections. (…) Je veux faire un gouvernement d'union nationale.»
Élections générales
Le message semble être passé. Mercredi, l'UE a salué la «personnalité consensuelle» et les «dons de négociateur» de Diango Sissoko. «On ne va pas bouder notre plaisir. Cette nomination rapide nous évite le pire, même si tout n'est pas idéal», souligne un observateur.
À son débit, Diango Sissoko compte les conditions de son arrivée au pouvoir. S'il a été officiellement désigné par le président par intérim, nul n'ignore que le choix est en fait celui des militaires. Le nouveau chef du gouvernement va donc devoir se débarrasser de cette image d'homme des putschistes. Ces derniers sont considérés comme hostiles à une intervention étrangère pour reconquérir le nord du Mali aux mains de milices djihadistes ainsi qu'aux négociations avec certains groupes rebelles touaregs.
Mardi, dans une brève intervention, le capitaine Sanogo a démenti être opposé à l'envoi d'une force étrangère «tant que ça peut sauver des populations maliennes». «La chute de Diarra a des origines plus complexes que cette seule question de l'intervention armée. Mais il est certain que les déclarations de Sissoko sur ce sujet seront suivies de près», détail un diplomate ouest-africain, qui souligne, prudent, que la formation du gouvernement donnera une indication à ce sujet. Car le remplacement rapide de Diarra n'a pas totalement mis fin à la crise politique.
La junte, en arrêtant l'ancien premier ministre, officiellement doté de tous les pouvoirs, a donné la preuve de l'influence qu'elle conservait dans le jeu politique. Ce coup de force a miné un peu plus la crédibilité des institutions de transition et relancé l'hypothèse de l'organisation d'élections générales avant la fin légale de la transition fixée au mois d'avril.
Par Tanguy Berthemet
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