mardi 18 décembre 2012

Côte d'Ivoire, Sénégal - MEDIATION EN CÔTE D’IVOIRE: que peut Macky Sall ?

(Le Pays 18/12/2012)

C’est au tour de Macky Sall d’administrer sa potion de réconciliation aux frères ennemis ivoiriens. En effet, le président sénégalais offre ses services pour pacifier les relations tumultueuses entre le camp de Alassane Ouattara et celui de Laurent Gbagbo. L’initiative est des plus louables, mais il y a des appréhensions sur ses chances de succès tant les deux camps ivoiriens semblent avoir du mal à s’accepter.
Les plus sceptiques en viennent même à se demander ce que le président Sall a bien pu aller chercher dans cette galère. Que peut-il bien faire pour réconcilier ces Ivoiriens qui prennent plaisir à se détester ? Quelle sera sa recette miracle ? Aura-t-il plus de chances que ses prédécesseurs ? En d’autres termes, on se demande si le successeur de Wade au sommet de l’Etat sénégalais saura enfin, dirait-on, réussir véritablement là où ses devanciers ont, d’une manière ou d’une autre, échoué. Ces questions, parmi bien d’autres, on se les pose en ce moment où on apprend que le nouveau président sénégalais offre ses services pour aplanir les chemins de la paix en Eburnie.
Ce qui est d’ores et déjà sûr, c’est que la tâche qui l’attend ne sera pas de tout repos. Sa médiation intervient alors que la Côte d’Ivoire continue sa longue traversée du désert. En effet, l’année 2012 s’achève un peu comme elle a commencé sur le plan sécuritaire dans ce pays. La paix n’y est pas encore la chose la mieux partagée. Certes Abidjan ne brillait déjà pas pour sa sécurité avant la grave crise qui a secoué le pays. Mais, force est de reconnaître que la situation s’est davantage dégradée avec cette crise et le lot d’armes qui se retrouvent dans des mains pas toujours délicates en pareille circonstance.
Il n’est un secret pour personne que le pouvoir de Alassane Ouattara et le camp Gbagbo se regardent encore et hélas, en chiens de faïence, qu’ils n’ont pas encore enterré la hache de guerre. Les Ivoiriens n’ont pas encore fait la paix dans les cœurs. Par voie de conséquence, les tensions restent vives sur le terrain. On en veut pour preuves ces attaques armées récurrentes dont le but est certainement de mettre à mal le pouvoir de Ouattara, mais aussi ces violences contre les partisans de Gbagbo, imputées au nouveau régime. En effet, tandis que le camp présidentiel pointe du doigt les attaques militaires qu’il attribue à des pro-Gbagbo, l’ex-parti au pouvoir, le Front populaire ivoirien (FPI), dénonce de son côté des exactions commises contre ses militants et sympathisants par le nouveau pouvoir. Aussi, le parti de Laurent Gbagbo a mis un point d’honneur à refuser jusque-là de participer à la compétition électorale.
Autant dire que l’heure n’est vraiment pas à l’apaisement des esprits et des cœurs. Macky Sall a donc du pain sur la planche. Ce ne sont pas ses prédécesseurs en matière de médiation entre les deux parties ivoiriennes qui diront le contraire. L’inimitié entre les différentes parties en conflit plus ou moins ouvert en Côte d’Ivoire depuis une décennie, a atteint un seuil critique. La confiance entre les deux camps est très superficielle pour ne pas dire inexistante. Mais les Ivoiriens doivent se rappeler que le plus infâme n’est pas de tomber, mais de refuser de se relever après la chute. On ne le dira peut-être jamais assez : la clé de la réconciliation et de la paix se trouve d’abord et avant tout entre les mains des Ivoiriens.
Il leur appartient de redonner tout son éclat au tissu social en faisant chacun, à quelque niveau qu’il se trouve, preuve d’un grand dépassement de soi tant il est vrai que la fracture consécutive à la crise est, toutes proportions gardées, des plus immenses. Cette entreprise de réconciliation ne sera certes pas une promenade de santé mais « à cœur vaillant, rien d’impossible », dit-on. Aux protagonistes d’y mettre donc toute leur force, toute leur imagination. Et le moins que l’on puisse souhaiter à Macky Sall, c’est de réussir avec brio cette importante mission qui, bien que résolument difficile, n’en demeure pas moins méritoire.

« Le Pays »
© Copyright Le Pays

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire