(Le Monde 02/02/2012)
Des affrontements ont opposé mercredi 1er février sur le campus de l'université publique à Dakar les forces de l'ordre à des étudiants protestant contre la mort la veille d'un des leurs lors de la dispersion d'un rassemblement de l'opposition par la police.
Les incidents ont éclaté lorsqu'un groupe d'étudiants de l'Université Cheikh Anta Diop (UCAD) a voulu sortir du campus dans la matinée pour aller assister dans un hôpital voisin à la levée du corps du manifestant tué, étudiant en Lettres modernes, selon des témoins. Il est mort des suites de ses blessures après avoir été renversé par un véhicule lors de la dispersion du rassemblement des opposants à la candidature du chef de l'Etat sénégalais Abdoulaye Wade à la présidentielle de février.
"APOLITIQUE"
Les affrontements, jets de pierres contre gaz lacrymogènes et balles en caoutchouc, se sont poursuivis jusqu'en fin d'après-midi. Les affrontements dans cette université entre étudiants et forces de l'ordre sont relativement courants, mais presque toujours liés à des questions concernant les bourses ou les conditions de vie scolaire. "On en a marre du régime Wade et de ses ministres devenus milliardaires à force de voler l'argent des Sénégalais", clamait l'un des protestataires. "On va lutter jusqu'à ce qu'il quitte le pouvoir", promettait un autre étudiant qui, à l'image de la plupart de ses camarades, se dit "apolitique". "Non à la candidature de Wade !" : de nombreux graffitis ont été inscrits à la peinture noire sur les façades blanches des immeubles de trois étages.
Quelques étudiants plus politisés et se réclamant de candidats de l'opposition dénonçaient le rôle des "corrompus" du Conseil constitutionnel, qui a validé vendredi dernier la candidature du chef de l'Etat sortant, 85 ans et au pouvoir depuis douze ans. L'annonce de cette validation avait été suivie de violences dans plusieurs quartiers de la capitale. Quatre personnes, dont un policier, sont mortes depuis lors en quatre jours dans ces violences liées aux tensions politiques à l'approche de la présidentielle.
"IL DOIT PARTIR"
Par la voix de son ministre des affaires étrangères, Alain Juppé, la France, ancienne puissance coloniale et l'un des principaux investisseurs étrangers dans ce pays d'Afrique de l'Ouest, a appelé toutes les parties à la retenue et souhaité un changement de génération dans la vie politique sénégalaise. Il y a actuellement 18 000 Français au Sénégal, dont la moitié possède également la nationalité sénégalaise. Le chanteur sénégalais Youssou Ndour a demandé mercredi au gouvernement français de dire au président Abdoulaye Wade "qu'il doit partir", car la Constitution "ne lui permet pas de participer à l'élection" présidentielle du 26 février, sur RTL.
Lundi, William Burns, secrétaire d'Etat adjoint américain, avait déclaré que la candidature de Wade à un troisième mandat risquait de mettre en péril la démocratie et la stabilité au Sénégal. Le ministre sénégalais des affaires étrangères, Madicke Niang, a rejeté les critiques venues de l'étranger. "Si ces déclarations viennent vraiment des autorités citées par la presse, je voudrais dire à ces autorités que le Sénégal n'a rien à apprendre de personne en matière de démocratie", a-t-il dit lors d'une conférence de presse.
Appel à témoignages
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Vous êtes actuellement au Sénégal. Racontez-nous l'atmosphère sur place alors que l'opposition appelle à des manifestations contre le gouvernement d'Abdoulaye Wade. La colère monte-t-elle ou au contraire pensez-vous que les informations rapportées à l'étranger sont exagérées ? Une sélection de témoignages sera publiée sur LeMonde.fr.
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