Vendredi sera signé à Bamako un accord attendu de longue date qui vise à pacifier le nord du Mali. Un texte symbolique, qui ne sera pas signé par tous les acteurs concernés et qui soulève des critiques au nord et au sud du pays.
Vendredi, les routes de Bamako seront encore plus congestionnées qu’à leur habitude : une délégation de chefs d’Etat et d’organisations internationales y sont attendues. A tel point que le gouvernement a hésité à rendre le jour férié pour désengorger les routes de la capitale malienne. Tous viennent assister à la signature d’un accord de paix attendu de longue date : il vise à pacifier le nord du Mali, où plusieurs groupes rebelles revendiquent l’existence autonome des trois régions de Kidal, Gao et Tombouctou sous le nom de l’Azawad.
Huit mois de négociations
Il aura fallu huit mois et la médiation tambour battant de l’Algérie pour parvenir à fixer la date du 15 mai pour la signature de cet accord entre le gouvernement malien, au sud du pays, et les rebelles armés du Nord-Mali.
Parmi eux, un acteur majeur : la Coalition des Mouvements de l’Azawad (CMA), qui regroupe six mouvements indépendantistes armés, dont les deux plus importants du Nord-Mali, le Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA) et le Haut conseil pour l’unité de l’Azawad (HCUA).
Les principaux concernés absents
Toutes les parties concernées par l’accord ne seront cependant pas au rendez-vous demain. Le gouvernement malien a, lui, bien paraphé l’accord lors d’un rendez-vous précédent, le 1er mai, signifiant son acceptation des termes de l’accord. En face, la CMA, qui avait demandé un délai de réflexion, n’a paraphé le document qu’in extremis, lors d’une ultime réunion à Alger jeudi, et ne signera pas officiellement le texte vendredi
En face, la CMA, qui avait demandé un délai de réflexion, n’a paraphé le document qu’in extremis, lors d’une ultime réunion à Alger jeudi, et ne signera pas officiellement le texte vendredi, arguant dans un communiqué que "aucun mécanisme de garantie à l'égard des violations du cessez-le-feu n'avait été véritablement mis en place". Des heurts, venant des deux bords, ont en effet émaillé tout le processus de négociation.
La signature en grande pompe se fera donc sans les principaux concernés au nord du Mali. Sur place, les diplomates et responsables de l’ONU tempèrent : l’accord est un processus irréversible et ceux qui ne le signeront pas vendredi le feront plus tard.
C’est la secrétaire d’Etat au Développement et à la Francophonie Annick Girardin qui représentera la France. Une façon de souligner l’investissement de l’Hexagone dans le développement du nord du pays plutôt que son intervention armée. Elle se veut optimiste : "Il n’y a pas de développement sans sécurité", affirme-t-elle au JDD. "Cet accord n’est pas parfait mais c’est une première marche vers une vie meilleure pour les Maliens. Nous devons nous féliciter de ce qui arrive."
Des réticences des deux côtés
L’accord, "seule façon de sortir de la situation actuelle" selon un diplomate de l’ambassade de France au Mali, a des ambitions volontairement modestes qui font "sa force et sa faiblesse". S’il a le mérite d’exister, il suscite des réticences de part et d’autre du pays.
Au nord, les rebelles armés estiment manquer de garanties d’autonomie. L’accord leur offre une forme décentralisation avec la création d’assemblées régionales, et reconnait l’Azawad comme une "réalité socio-culturelle". Une définition qui n’engage l’Etat malien en rien. Au sud, la promesse d’intégrer des rebelles du Nord dans l’armée fait grincer des dents.
Un point de départ
L’accord ressemble plus d’un point de départ qu’à un aboutissement Il ne s'attaque qu'au volet politique d'un dossier qui en masque beaucoup d'autre : le nord du Mali est le théâtre de longue date de rivalités tribales, et gangréné par des groupes djihadistes et des trafics de drogues et d’armes.
Antoine Glaser, spécialiste de l’Afrique interrogé la veille, résume : "tant qu’un terreau socio-économique ne sera pas présent, le nord du Mali continuera à faire du trafic de kalachnikovs plutôt que d’élever des bêtes."
Alix Hardy, envoyée spéciale à Bamako (Mali) - leJDD.fr
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