(Togosite 22/07/2010)
Les autorités togolaises envisagent d’interdire les manifestations de rue par une nouvelle loi.
Les autorités togolaises envisagent de rétrécir le champ de jouissance de certaines libertés individuelles comme le droit à la manifestation. De sources bien informées, un projet serait en préparation dans les officines du pouvoir et pourrait être présenté lors du prochain conseil des ministres qui aura probablement lieu après le « Mondial » des Evala.
« Ils peuvent continuer à marcher, à manifester, ça ne changera rien », avaient l’habitude de ressasser les gouvernants pour dire qu’ils n’ont que faire de ces manifestations organisées par le Front républicain pour l’alternance et le changement (FRAC). Au départ, ils avaient misé sur la lassitude des militants qui, fatigués par le train-train habituel, allaient abandonner les manifestations aux premiers responsables. Mais c’est à tout le contraire qu’on assiste. Quatre mois après l’élection présidentielle, la rue continue de gronder avec la même ferveur, avec la même détermination. Sans oublier aussi les manifestations spontanées des populations qui avaient protesté le 22 juin contre la hausse des prix des produits pétroliers. Au fond, Faure Gnassingbé et son gouvernement sont bien gênés par ces démonstrations de force du FRAC. Que faire alors devant de telles situations ?
A défaut d’une interdiction par les biceps, les bastonnades et les gaz lacrymogènes, les autorités togolaises entendent abuser de l’article 14 de la Constitution togolaise : « L’exercice des droits et libertés garantis par la présente Constitution ne peut être soumis qu’à des restrictions expressément prévues par la loi et nécessaire à la protection de la sécurité nationale, de l’ordre public, de la santé publique, de la morale ou des libertés et droits fondamentaux d’autrui ». Ainsi, toutes les manifestations sur la voie publique ou dans les lieux publics devront être soumises à un régime de déclaration préalable auprès du ministre de l’Administration territoriale ou du préfet. Cette déclaration devra préciser au moins trois personnes responsables ainsi que le jour, l’heure, l’objet et l’itinéraire, et ce, 72 heures avant le jour « J », les week-ends et les jours fériés n’étant pas pris en compte. « Et 36 heures avant l’heure annoncée, l’autorité saisie décline en retour ses observations et ses recommandations sur tel ou tel point. Les recommandations peuvent conditionner la tenue de la manifestation. Plus est, il peut arriver que l’autorité diffère la manifestation », explique notre confrère « L’Union ». Le projet prévoit aussi des peines d’emprisonnement jusqu’à cinq ans ainsi que des peines d’amende.
Et pour faire avaler la couleuvre aux Togolais, on soutient que ce projet vise à empêcher que les militaires et les corps spécialisés de l’armée rétablissent l’ordre. « Le futur règlement restituera à l’autorité administrative la plénitude de ses attributions en sa qualité d’initiateur privilégié et responsable des opérations de maintien de l’ordre public, c’est-à-dire à la police administrative et à l’autorité civile (gouverneur de région, préfet, maire et ses adjoints), responsables de la préparation et du déclenchement des mesures préventives et, éventuellement, des mesures répressives en cas de besoin », poursuit le confrère.
On ne le dirait jamais assez, Faure Gnassingbé est en train d’installer son système après la vraie fausse rupture annoncée par la formule « moi c’est moi, lui c’est lui ». C’est ce que Me Djovi Gally appelait la « dictature rampante de Faure Gnassingbé » avant qu’il ne s’amourache tout dernièrement du RPT. On tend vers l’ère du parti unique où aucune manifestation ne sera tolérée et où les citoyens seront obligés d’accepter sans questionner. Le projet de restriction des droits à la manifestation et aux réunions s’inscrit dans cette dynamique. Les gouvernants gèrent mal le pays, entretiennent la misère et ne veulent pas qu’on en parle. Ils entendent étouffer toutes les manifestations en imposant l’omerta. C’est comme un père de famille qui, après avoir violemment frappé son enfant, lui ordonne d’attendre d’abord son autorisation avant de pleurer. Allait-il la lui accorder s’il faisait la demande ? La réponse est non. Et tout le monde connaît la propension des autorités togolaises à interdire les manifestations de rue.
La République est donc en danger et il est nécessaire que les organisations des droits de l’Homme et les partis politiques se mobilisent pour que cette loi scélérate ne passe pas.
R. Kédjagni
LIBERTE HEBDO TOGO
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