(Le Figaro 10/06/2011)
Les dirigeants de vingt-six pays d'Afrique de l'Est et du Sud se réunissent dimanche à Johannesburg pour faire avancer le projet de création d'un immense marché commun de près de 600 millions d'habitants couvrant toute la moitié orientale du continent.
Il s'agit de former une très vaste zone de libre échange englobant le Marché commun des Etats d'Afrique australe et de l'Est (Comesa), la Communauté d'Afrique de l'Est (EAC) et la Communauté de développement d'Afrique australe (SADC), trois ensembles qui se chevauchent en partie et dont le produit intérieur brut atteint 875 milliards de dollars (597 milliards d'euros). Le projet avait été approuvé lors d'une première conférence en octobre 2008, à Kampala.
"Nous pensons que c'est une évolution extrêmement importante pour l'Afrique", a souligné le ministre sud-africain du Commerce extérieur, Rob Davies.
"Le continent africain est désormais considéré comme une source d'opportunités, il est l'une des principales zones de croissance : six des dix économies les plus dynamiques au monde se trouvent en Afrique."
Du Cap au Caire, selon le vieux rêve de l'homme politique britannique Cecil Rhodes, la "zone de libre échange tripartite" comprendra l'Afrique du Sud et l'Egypte, les économies les plus développées du continent, mais aussi celles qui croissent le plus vite, notamment l'Angola et l'Éthiopie.
Mais sa mise sur pied se heurte à des obstacles très importants : les barrières douanières, l'insuffisance des infrastructures, la faiblesse des chaînes d'approvisionnement...La plupart des économies de la zone sont en outre largement tributaires de l'exportation de ressources naturelles.
"La zone de libre-échange tripartite sera certainement une étape importante dans le processus d'intégration régionale en Afrique", estime Alex Rugamba, chargé à la Banque africaine de développement (BAD) de l'intégration régionale et du commerce.
"C'est vraiment une question d'économies d'échelle. C'est là que nous voyons d'énormes possibilités. Aussi, si la zone tripartite fonctionne, nous pensons qu'elle peut aussi être un tremplin pour une véritable intégration de l'Afrique dans l'économie mondiale."
Mais les trois ensembles existants n'ont jusqu'à présent pas réussi à atteindre leurs objectifs en matière de commerce intérieur, malgré la suppression de la majeure partie des droits de douane. "Seule une petite partie des communautés économiques régionales ont atteint leurs objectifs pour le commerce entre Etats-membres", relève M. Rugamba.
Selon la Banque mondiale, le commerce entre les pays d'Afrique australe représente à peine 10% du total des échanges de la région, contre 60% en Europe et 40% en Amérique du Nord. Les exportations de la SADC sont passées de 20% à plus de 30% du PIB de la région pendant la décennie 2010, mais le commerce régional n'a représenté que 3% de cette augmentation.
En dépit des promesses, les tracasseries continuent aux frontières, et les barrières non tarifaires sont autant d'obstacles qui nuisent à la compétitivité.
"Alors que ces pays cherchent des moyens novateurs pour contrer le ralentissement économique, ils n'ont pas accordé une attention suffisante aux effets sur la croissance du commerce régional", juge Ruth Kagia, directeur pour l'Afrique du Sud de la Banque mondiale.
Les dirigeants doivent signer dimanche une "feuille de route" censée les diriger vers la fusion de leurs petits marchés domestiques.
"Ce sera un long processus, une feuille de route pour deux à cinq ans. Ca ne sera pas facile", estime Alex Rugamba. "Mais le fait qu'ils sont prêts à lancer des négociations est très encourageant."
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