(BBC Afrique 02/08/2010)
L'actualité au Bénin reste dominée par cette affaire ICC du nom de cette structure illégale de placement d'argent qui a fonctionné pendant quatre ans en promettant à ses épargnants des taux d'intérêt à trois chiffres allant parfois jusqu'à 200%.
Une vaste escroquerie qui affecte plusieurs dizaines de milliers de personnes spoliées de près de 100 milliards de Fcfa. Le pot aux roses a été découvert avec l’incapacité de la société de rembourser les déposants.
Près de la moitié des 83 députés à l’assemblée nationale ont entamé une démarche auprès du président du parlement pour demander que le Président de la République Boni Yayi soit poursuivi pour forfaiture et parjure.
C’est à l’initiative de deux députés, Janvier Yahouédéhou et Sacca Fikara, qu’une demande de poursuite du président de la république Boni Yayi et chef du gouvernement devant la Haute cour de justice, circule dans les couloirs de l’Assemblée nationale depuis le 26 juillet dernier.
Le président coupable de laisser-faire
De source parlementaire, le projet aux allures d’une pétition a déjà enregistré les signatures d’au moins 42 députés soit plus de la moitié des 83 élus. Selon le document publié par plusieurs quotidiens vendredi et dont le contenu n’a été jusqu’ici réfuté par aucun des initiateurs, les signataires estiment que le chef de l’Etat a favorisé les activités de ICC-Services. Entre autres griefs, la protection des lieux de travail et des résidences des responsables de la société par des agents des forces de sécurité publique.
On évoque également le financement d’activités politiques de partis et organisations de la mouvance présidentielle par ICC-Services avec la fabrication de matériel de propagande à l’effigie de Boni Yayi. « En les laissant sévir ainsi, poursuit le document, le président de la république, économiste et banquier de profession, a trahi son serment de défendre le peuple béninois et la nation ».
Selon l’article 137 de la constitution du Bénin, « la décision de poursuite puis la mise en accusation du président de la république et des membres du gouvernement devant la Haute cour de justice est votée a la majorité des deux tiers des députés composant l’assemblée nationale ». Ce qui revient à dire que l’adhésion de 56 députés est nécessaire. Voila qui justifie peut-être la chasse aux signatures actuellement en cours à l’hémicycle de Porto-Novo. Et après avoir franchi cet obstacle de la majorité, les députés frondeurs pourraient être confrontés à une autre épreuve : celle de la promptitude ou non à convoquer une session extraordinaire du parlement par son président. Mathurin Nago est de ceux qui constituent aujourd’hui l’aile dure de la mouvance présidentielle.
Du culte à l'argent du culte
La société « ICC-Services » exerçait à sa création des activités liées aux soins de santé, à l’assistance en informatique et à la formation des jeunes diplômés. Aux dires de ses responsables, les activités de placement d’argent autrement dit d’épargne rémunérée étaient à l’origine destinées à l’église du Christianisme céleste à laquelle appartiennent les promoteurs. Le placement d’argent aurait été par la suite ouvert au grand public en violation de toute réglementation en la matière. Toujours est-il que la structure a fonctionné quatre ans durant avant que n’apparaissent les premières difficultés de payement des épargnants.
Les premières révélations dans ce scandale dévoilent des connections entre politique, religion et argent. L'affaire "ICC-Services" a déjà été à la base du limogeage de l'ancien ministre de l'Intérieur Armand Zinzindohoué, pourtant inconditionnel de Boni Yayi. Autre tête qui est tombée dans la tourmente, celle de Constant Georges Amoussou, procureur général près la cour d'appel de Cotonou relevé ses fonctions et actuellement en détention préventive. Les deux hauts fonctionnaires auraient eu des "atomes crochus" avec les cerveaux de l'escroquerie.
Des responsables syndicaux pointent un doigt accusateur vers le gouvernement qui selon eux aurait consciemment ou inconsciemment rendu ICC-Services crédible.
Virgile Ahissou
Cotonou
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