jeudi 6 mai 2010

GABON - Scandale au Gabon: Les 7 millions d’euros maltais d’Omar et Ali Bongo

(BDP Gabon 05/05/2010)
Quelques mois seulement après que le Congrès américain avait épinglé Ali Bongo et son défunt père Omar Bongo pour une affaire de détournement et de blanchiment d’argent volé, voilà que l’affaire rebondit, cette fois du côté de Malte, où le gouvernement maltais vient de dénicher 7 millions d’Euros dissimulés sur un compte dans ce pays par Bongo père et fils.
Outre, donc, les 70 comptes de la famille Bongo dénichés en France par la justice française en 2009, c’est à un véritable réseau de comptes emplis d’argent gabonais détourné par les Bongo que l’on a désormais affaire. De New York à Paris, de Paris à Monaco (où deux comptes à la Banque populaire de la Côte d’azur et à la banque Pasche contenant 2,4 millions d’Euros –soit 1,7 milliards de CFA—et appartenant à Edith Lucie Bongo, feu l’épouse de feu le dictateur Omar Bongo, ont été découverts), en passant par Malte et Beijing, la galaxie financière des Bongo est immense et tentaculaire.
La chronologie de cette affaire montre une implication directe du Président gabonais actuel, Ali Bongo Ondimba. En voici le sommaire :
Jeudi 5 février 2010: Outre les détournements liés aux affaires familiales des Bongo aux Etats-Unis qu’il étale au grand public, avec notamment la confirmation de l’affaire des 25 millions de dollars donnés en cadeau par Ali Bongo à son ancienne épouse Inge Lynn Collins Bongo en 2006 pour s’acheter une villa dans le quartier sélect de Malibu aux abords de Los Angeles, ou même les 130 millions de dollars (66 milliards de FCFA) épinglés sur un compte d’Omar Bongo à la CITIBANK de New York par le Sénat américain en 1999, un nouveau rapport du même Sénat en 2010 fait une analyse accablante des “opérations financières douteuses qui auraient été menées aux Etats-Unis en 2006 par l’ancien président gabonais Omar Bongo, aujourd’hui décédé, et par des membres de sa famille, dont son fils Ali, qui lui a succédé” (AFP).
Selon toujours l’AFP, « le document de 330 pages publié ce jeudi 05 février 2010 indique que l’ancien président et son fils, alors ministre de la Défense, ont déboursé 18 millions de dollars pour s’offrir les services d’un lobbyiste américain Jeffrey Birrell. Leur but: acquérir six véhicules blindés et six avions militaires C-130. » 18 millions de dollars, c’est près de 9 milliards de FCFA. L’affaire remontait à 2006.
Dimanche 2 mai 2010: L’affaire rebondit. On apprend d’un journal maltais, Malta Today, que le Ministre des finances maltais aurait lancé une enquête sur les avoirs d’Omar Bongo dans un compte que le gouvernement maltais vient de découvrir à la Fimbank. Et comme pour bien montrer à quel point Omar Bongo se confondait à l’Etat gabonais, le compte supposé appartenir à l’Etat gabonais avait, bizarrement, comme bénéficiaire et ayant droit, S.E. Omar Bongo Ondimba qui, à son tour, devait passer par son contact parisien, en la personne de François Meyer, avocat.
Cette affaire éclabousse de nouveau Ali Bongo parce que les 7 millions d’Euros en cause sont le “reliquat” des 18 millions de dollars (14 millions d’Euros) qu’Omar Bongo et Ali Bongo avaient fait transférer dans les comptes américains de Jeffrey Birrell pour s’acheter ses services de lobbying dans le cadre de leur tentative d’acquérir six véhicules blindés et six avions militaires C-130 pour le compte, soi-disant, de l’armée gabonaise. Mais, l’affaire n’ayant apparemment pas abouti, les 14 millions d’Euros se sont bizarrement évaporés, ne laissant qu’une trace d’un million de dollars payés à Birrell en 2006 pour ses “bons et loyaux services” et, maintenant, les 7 millions d’Euros que l’on vient de découvrir à Malte, dissimulés, de toute évidence, par Ali Bongo et son papa.
Le rôle de Birrell, comme l’avait bien expliqué le Sénat américain, était de recevoir, en les comptes de sa compagnie aux Etats-Unis, les 18 millions de dollars et autres versements devant servir dans le cadre des procédures accompagnant l’achat du matériel militaire. Il lui appartenait par la suite, une fois l’argent reçu, de le distiller sur des comptes additionnels aux Etats-Unis et dans le monde selon les directives d’Ali Bongo et de son père.
Birrell, selon Malta Today, avait en effet pu obtenir l’autorisation du gouvernement américain pour l’achat des fameux véhicules et avions militaires, mais après que le deal avait échoué, il ne restait plus des 18 millions de dollars que 9,2 million (7 millions d’Euros) que Birrel transféra, non pas sur un compte au Gabon, mais sur un compte … maltais.
Les transactions d’Omar Bongo et de sa famille, semble-t-il, obéissaient toujours aux mêmes procédures douteuses. C’est d’ailleurs ce qui a poussé le Sénat américain à conclure que “ces transactions doivent êtres vues comme suspectes car elles ont permis au président Omar Bongo de détourner des sommes considérables du Gabon et de les faire passer par les circuits internationaux de transfert d’argent [avec pour effet de les blanchir] vers des comptes pas directement associés à lui, rendant ainsi difficile toute traçabilité des mouvements de ces fonds, notamment de ceux transitant par les Etats-Unis avant d’atteindre leur destination finale.”
Vu qu’Ali Bongo, en tant que Ministre de la défense, était directement impliqué avec son père dans l’achat des fameux véhicules et avions militaires, il était forcément au courant de la destination finale des 7 millions d’Euros de reliquat (sans oublier la destination des autres 7 millions évaporés). Bongo père et Bongo fils se retrouvent ainsi non seulement complices dans une affaire de détournement d’argent public, mais également au centre d’une filière de blanchiment d’argent volé du trésor public gabonais.
A y lire de près, le type de transactions incriminées ici était commun dans la galaxie des Bongo. On faisait semblant de sortir de l’argent du trésor public pour financer des projets internationaux aux apparences légitimes, mais on faisait par la suite sciemment échouer ces affaires pour créer la confusion et ainsi justifier l’évaporation de l’argent qui était alors tout simplement redirigé vers des comptes personnels ou familiaux, au travers justement d’intermédiaires comme les lobbyistes américains Jeffrey Birrell ou Jack Abramoff, ou alors des juristes ou avocats français tels François Meyer.
La culture de la corruption et des détournements est si généralisée au Gabon qu’elle engouffre près de la moitié du budget de l’Etat. La famille Bongo en est le plus grand bénéficiaire. Par ailleurs, Omar Bongo exerçait une véritable politique d’extorsion à l’encontre des compagnies pétrolières ou autres souhaitant s’investir au Gabon. D’où les 50 millions d’Euros (33 milliards de FCFA) que la compagnie Elf était obligée de lui verser à titre personnel chaque année en échange du droit d’exploiter du pétrole en terre gabonaise.
Au vu de l’implication d’Ali Bongo auprès de son père au cours de la dernière décennie, surtout dans un contexte de plus en plus marqué par l’anticipation de l’après-Bongo, il y a fort à parier que celui qui se dit aujourd’hui le promoteur d’un « Gabon émergent » devra, au préalable clarifier son implication dans les activités scabreuses qui le situent aujourd’hui au sein d’un scandale qui, dans un pays de moralité et de droit, aurait dû mener soit à sa démission immédiate, soit à sa destitution par le Parlement. Mais au pays des Bongo, la loi c’est le président, et dans l’idée d’émergence que promeut le dictateur, il n’y a aucune place pour la moralité, encore moins les principes d’état de droit.
Ali Bongo Ondimba est arrivé au pouvoir suite à des fraudes massives qui l’ont vu succéder à son père dans un Gabon où l’exercice du pouvoir présidentiel semble être devenu une affaire de familiale et la prérogative des Bongo seuls, ce qui fait désormais de ce pays une quasi monarchie. Omar Bongo avait régné sur le Gabon pendant près de 42 ans. Il est officiellement décédé le 8 juin 2009 dans un hôpital espagnol, mais des doutes subsistent qui font état d’une machination par laquelle le régime aurait caché la date du vrai décès du dictateur qui serait survenu, selon des sources anonymes, le 6 mai 2009, soit un mois plus tôt.

Par Daniel Mengara
Source: “Bongo Doit Partir”, http://wwww.bdpgabon.org/.
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