mardi 8 novembre 2011

Liberia: faible affluence à la présidentielle après des violences

MONROVIA (AFP) - L'affluence des électeurs a été faible mardi au Liberia pour le second tour de la présidentielle boycotté par Winston Tubman, principal rival de la présidente Ellen Johnson Sirleaf, au lendemain de la dispersion violente d'opposants qui a fait au moins deux morts.
M. Tubman, leader du Congrès pour le changement démocratique (CDC), a affirmé avoir été victime d'une tentative d'assassinat lors de l'intervention, lundi, des policiers au siège de son parti, sur ordre "des plus hautes autorités" de l'Etat.
Contrairement au premier tour du 11 octobre où de longues files d'attente s'étaient formées devant les bureaux de vote, très peu de personnes étaient présentes devant ceux visités par l'AFP à Monrovia, sillonnée par des véhicules de police et de l'ONU.
Le même phénomène a été noté dans les provinces du pays, selon des journalistes locaux contactés par l'AFP et des écoles utilisées comme bureaux de vote ont préféré ne pas ouvrir leurs portes par crainte de violences.
Les bureaux ont fermé comme prévu à 18H00 (locales et GMT), selon Joseph Yassiah, porte-parole de la Commission électorale nationale (NEC). "Il n'y a eu aucun incident" pendant le vote, a-t-il dit, ajoutant qu'il "est trop tôt" pour commenter la mobilisation des électeurs.
Parmi ceux qui ont voté, figure Leymah Gbowee, pacifiste libérienne prix Nobel de la paix 2011 reçu conjointement avec Mme Sirleaf. Elle a affirmé "avoir pleuré toute la nuit" à cause des violences commises lundi.
"Voter est un droit, ne pas voter aussi" et quel que soit le choix, l'essentiel est de le faire "sans violence", a-t-elle dit.
La chef de l'Etat a voté en fin de matinée dans son village de Fee Fee, à une soixantaine de km à l'est de la capitale.
Winston Tubman, qui avait appelé à boycotter l'élection dont il s'est retiré par crainte de fraudes au profit de Mme Sirleaf, est resté à son domicile.
Y recevant quelques journalistes, dont ceux de l'AFP, il a affirmé avoir été "la cible d'un tir de sniper" lors des violences de lundi et n'avoir eu la vie sauve que grâce à un homme qui l'a poussé alors qu'il sortait de sa voiture. "Il a été tué à ma place", selon lui.
Les policiers "agissaient sur ordres" qui "étaient de m'éliminer", a-t-il ajouté, accusant la présidente Sirleaf: "Sans doute est-ce une punition qu'elle voulait m'infliger" pour avoir appelé à boycotter le scrutin .
Ellen Johnson Sirleaf était arrivée en tête au premier tour avec 43,9% des voix contre 32,7% à M. Tubman.
L'élection est intervenue au lendemain de la dispersion violente par des policiers anti-émeutes de milliers d'opposants venus soutenir M. Tubman devant le siège de son parti.
Au moins deux personnes ont été tuées par balle - au moins huit selon Winston Tubman - et plusieurs blessées, une répression qui a ravivé la crainte de violences généralisées dans un pays encore traumatisé par des guerres civiles qui, de 1989 à 2003, ont fait quelque 250.000 morts.
Selon le leader du CDC, "150 personnes" ont été arrêtées pendant la dispersion et étaient toujours détenues mardi "dans des conteneurs".
Le gouvernement a "regretté" les violences, promettant "que tous ceux qui sont coupables devront répondre de leurs actes".
Il a accusé des militants du CDC d'avoir été armés, ce qui aurait provoqué l'intervention de la police anti-émeutes, mais des sources indépendantes ont affirmé que les seules armes dont disposaient certains manifestants étaient des pierres et des gourdins.
Amnesty International a exigé que les tirs à balles réelles de la police fassent l'objet d'une enquête "immédiatement".
Le président américain Barack Obama a mis en garde contre toute tentative de "perturber" le second tour.
La France a jugé les violences "intolérables" et rappelé qu'il "est essentiel que la liberté de manifester pacifiquement soit respectée".
Le premier tour, couplé à des législatives et sénatoriales où le Parti de l'unité (UP) de Mme Sirleaf était également arrivé en tête, avait été marqué par une forte participation (71%) et s'était déroulé dans le calme.
Ces élections avaient été saluées par l'ensemble des quelque 4.900 observateurs, nationaux et internationaux, comme "libres et transparentes".

© 2011 AFP
www.liberation.fr

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