(Les Afriques 02/03/2011)
Représentant spécial des Nations-Unies en Côte d’Ivoire, Young Jin Choi passe en revue avec Les Afriques les derniers développements de la crise ivoirienne. Il a participé ce lundi 28 février 2011 à Dakar à la 20 ème rencontre de haut niveau des représentants spéciaux du secrétaire général des Nations-Unies en Afrique de l’ouest.
Les Afriques. M Choi Il y’a deux jours, des casques bleus de l’ONU ont été pris pour cible par l’armée pro-Gbagbo.Quelle est votre réaction face à cette situation ?
Young Jin Choi. Ecoutez, nous étions dans notre patrouille et nos éléments ont reçu des tirs directs des militaires pro-Gbagbo et nous avons riposté. Cela s’est passé dans la journée, en fin d’après –midi à Abobo (un quartier abidjanais, fief de Alassane Dramane Ouattara).Nos trois casques bleus ont heureusement reçu ses tirs sur leurs casques. S’ils n’étaient pas bien protégés, ils allaient mourir sur le champ. C’était une attaque très sérieuse et nous avons mis en garde les forces pro-Gbagbo .On leur a dit de ne pas répéter ce genre d’attaques que nous assimilons à un crime de guerre. Les paroles parfois brutales de même que les menaces de certains proches de Gbagbo font partie de la stratégie du harcèlement, de la propagande. Nous le comprenons très bien. Si on brule vos voitures, on tire sur vous, on tente de vous kidnapper ou on procède au saccage des maisons pour prendre des biens. Il s’agit d’un acte d’hostilité direct extrême. C’est une perte de contrôle des forces de Gbagbo. Pourtant, on a récemment assisté à une transformation du harcèlement, devenu modéré.
Les Afriques. Quelle est aujourd’hui la situation à Abobo et dans l’ouest du pays ?
Y.J .C Oh, la situation est extrêmement grave surtout à Abobo, un quartier d’Abidjan où nous avons constaté plusieurs corps abandonnés dans la rue. Ce qui pourrait provoquer des épidémies dans le pays. On pourrait donc avoir des cas humanitaires non seulement à Abobo, mais aussi dans l’ouest de la Côte d’Ivoire...Il nous faire très attention et redoubler de vigilance.
Les Afriques.Craignez-vous une reprise de la guerre civile en Côte-D’ivoire ?
Y.J.C Vous savez, tout ce que je peux dire pour le moment, c’est que pour la première fois depuis 2004, il y’a eu accrochage direct entre les deux armées dans l’ouest du pays. C’est un signe très grave mais il faut remarquer qu’elles se sont séparées après une journée de combat. Maintenant, on croise les doigts d’autant plus qu’on n’a pas assisté à une reprise des combats depuis cet accrochage. On ne craint rien mais on se prépare pour le pire avec bien sûr l’espoir de voir cette situation revenir à la normale.
Les Afriques. Etes vous en phase avec le panel des chefs d’Etat africains qui a entamé des pourparlers de paix en Côte d’ivoire sous l’égide de l’Union africaine ?
Y.J.C Je vais vous dire. J’ai eu l’occasion de faire un briefing en compagnie de ces chefs d’Etat désignés par l’Union africaine. Mais cette rencontre était strictement consacrée aux élections. Ils m’ont promis qu’ils reviendront bientôt à Abidjan avec une solution. Peut-être même qu’ils reviendront à la fin de cette semaine. On les attend avec beaucoup d’espérence.De toute façon, notre mandat, notre devoir c’est d’assister, d’appuyer ce panel de haut niveau des Chefs d’Etat africains de même que le groupe d’experts. Contrairement à ce que pensent beaucoup d’analystes, faire quitter Gbagbo n’est pas notre mission en Côte-d’Ivoire. Il faut être clair .Nous sommes là pour le peuple ivoirien. Notre première mission, c’est la protection des civils, y compris les civils pro-Gbagbo.La deuxième, c’est la protection de l’Hôtel du Golf où réside le Président élu M Alassane Dramane Ouattara. Ce dispositif de l’Hôtel du Golf est très important car c’est pour prévenir la division du pays et la reprise de la guerre civile.Nous avons d’ailleurs déployé la moitié de nos éléments basés dans la capitale ivoirienne à l’Hôtel du Golf. Le troisième élément de notre mandat, c’est la certification, c’est-à-dire la sauvegarde des résultats de l’élection présidentielle. Notre impartialité est totale sur le plan militaire et politique.
Les Afriques. Qu’en est –il de cette affaire du commando invisible ?
Y.J.C C’est vrai qu’il y’avait des accrochages entre les camps civils pro-Ouattara à Abobo et des forces armées pro-Gbagbo.Nous pouvons affirmer qu’il y’avait des tirs d’armes lourdes des deux côtés. C’est pour vous dire que des éléments civils du camp Ouattara sont armés. Malheureusement, l’ONU est dans le désarroi de dire que la situation en Côte d’Ivoire peut-être source de graves complications avec des implications fâcheuses dans la sous-région ouest africaine.
Propos recueillis par Mohamed Ndiaye
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