(AgoraVox 08/01/2013)
L’homme d’affaire spécialiste de l'Afrique et de la
diplomatie parallèle, Jean-Yves Ollivier a jeté un pavé dans la mare en publiant
une violente charge contre la Cour Pénale internationale (Slate Afrique), qu'il
accuse d'être un complice indirect des massacres de la Lord Resistance Army de
Joseph Koni.
Et si la Cour Pénale Internationale, par son intransigeance
bureaucratique et son manque de pragmatisme, était un organisme contreproductif
? C'est la thèse défendue par Jean-Yves-Ollivier, qui explique comment des
négociations pour mettre un terme à la rébellion de Joseph Koni ont achoppé à
cause de l'idéologie de l'impunité de la CPI.
Joseph Kony et l’Armée de
résistance du Seigneur (LRA)
En Ouganda, l’Armée de résistance du
Seigneur (LRA), dirigée par Joseph Kony est un mouvement rebelle
mystico-politique qui multiplie depuis plus de 25 ans les atrocités en
Ouganda.
Cette armée, classée dans la liste des organisations terroristes
par les Etats-Unis, recrute notamment des enfants soldats. Elle commet de
nombreuses exactions et est à l'origine d'une sanglante guerre civile depuis
1988, comme le décrit Jean-Yves Ollivier, qui parle également de "deux millions
d’Ougandais chassés de leur foyer, dont plus de 60.000 enfants kidnappés et
enrôlés de force comme enfants soldats ou esclaves sexuels".
Cette
situation catastrophique a été récemment médiatisée en occident, où
l'association Invisible Children a publié une vidéo, qui a fait le tour du web
et a permis la mobilisation de milliers d'Américains, dont plusieurs stars du
show-business (Angelina Jolie, Chris Brown...).
La CPI responsable des
derniers crimes de Joseph Kony ?
Selon Jean-Yves Ollivier, le président
Ougandais, Yoweri Museveni, aurait décidé, en 2006, d'entamer des négociations
avec Joseph Kony, afin que ce dernier renonce au pouvoir et dissolve l'Armée de
résistance du Seigneur.
Pour négocier la fin des massacres et des
exactions, Museveni avait alors demandé à l'ancien président Mozambicain Joaquim
Chissano et à Jean-Yves Ollivier d'entamer les pourparlers avec
Kony.
Jean-Yves Ollivier raconte alors cette étrange rencontre, qui se
tint "dans l’extrême-sud du Soudan, non loin de la frontière ougandaise." Il
avoue sa surprise et sa joie quand il réalise que Joseph Kony est prêt à tout
abandonner en échange d'une simple ferme, de quelques maisons, de 2.500 têtes de
bétails et de garanties quant à la tranquillité de son avenir judiciaire. Quelle
aubaine pour le peuple Ougandais : des milliers de vies allaient être épargnées
! Il ne manquait plus qu'un accord signé par la Cour Pénale Internationale, qui
garantisse au chef de guerre l'abandon des poursuites et tout serait
fini.
"Hélas, raconte Jean-Yves Ollivier, bien que Chissano se déplaçât
en personne à La Haye pour négocier avec la Cour pénale internationale, le
procureur de la CPI d’alors, l’Argentin Luis Moreno-Ocampo, refusa net au nom du
sacro-saint principe de « l’impunité ».
Quitte à punir des dizaines de
milliers de civils, non seulement en Ouganda, mais aussi au Congo-Kinshasa et en
République centrafricaine qui, depuis, ont été suppliciés par la LRA, une armée
de desperados plus cruelle que jamais pour n’avoir plus rien à
perdre.
Bref, en fermant la porte de sortie à Kony, la CPI a ouvert à un
cortège d’innocents un boulevard de souffrances."
Cette affaire ouvre une
réflexion plus large sur la Cour pénale Internationale, sur son fonctionnement,
ses méthodes et son utilité. Jean-Yves Ollivier, qui se définit comme "l’un de
ses ennemis déclarés", dénonce "le néocolonialisme judiciaire de la CPI" qui
applique une "justice des vainqueurs" et qui condamne uniquement des
Africains.
"Le monde est trop complexe pour accorder l’impunité à des
justiciers internationaux trempant leur orgueil dans le sang de victimes
anonymes. Joseph Kony court toujours. S’il était arrêté demain, il faudrait
juger avec lui la CPI. Pour complicité", conclut un Jean-Yves Ollivier plus que
déçu par l'organisme international.
De quoi remettre en question un
organisme bureaucratique déconnecté de la complexité des situation, qui exerce
une justice sans aucune légitimité démocratique et qui bloque la résolution de
nombreux conflits, à l'image du cas Ougandais, où tant de victimes auraient pu
être épargnées sans son intransigeance contre-productive.
par
Matthieu Carmineau mardi 8 janvier 2013
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