jeudi 16 septembre 2010

Rwanda -Un médecin rwandais accusé de génocide libéré en France, Kigali "indigné"

(Le Monde 16/09/2010)
Le Rwanda s'est dit "indigné et déçu" par le refus de la justice française d'extrader vers Kigali un médecin rwandais soupçonné d'être impliqué dans le génocide des Tutsi en 1994. L'ambassade du Rwanda à Paris "exprime sa profonde indignation et sa déception à la suite de la libération d'Eugène Rwamucyo, un génocidaire présumé" dont Kigali "avait demandé l'extradition" explique un communiqué publié mercredi 15 septembre.
L'ambassade fustige le "risque de consacrer l'impunité", en dépit de "l'engagement ferme, des plus hautes autorités de l'Etat français, de poursuivre et de punir les responsables du génocide des Tutsi réfugiés sur son sol". La cour d'appel de Versailles a refusé mercredi matin l'extradition du médecin rwandais et a décidé de sa remise en liberté, mettant ainsi fin à la procédure.
Eugène Rwamucyo avait été interpellé en mai lors d'une cérémonie d'obsèques en région parisienne, en vertu d'un mandat d'arrêt international délivré par le Rwanda en 2007. Il est notamment accusé par Kigali d'avoir participé à des réunions de responsables génocidaires à Butare (sud du Rwanda) en 1994, dont l'une sous l'égide du premier ministre de l'époque, Jean Kambanda, condamné à la perpétuité par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR). Environ 800 000 Tutsi et Hutu modérés ont été tués, selon l'ONU, entre avril et juillet 1994 au cours du génocide rwandais.
"C'est un soulagement car c'est un dossier très politique et donc c'est la victoire du droit sur la politique", a déclaré Me Philippe Meilhac, l'avocat de M. Rwamucyo. M. Rwamucyo est par ailleurs visé par une information judiciaire ouverte à Paris en 2008 pour génocide, crimes contre l'humanité et complicités après une plainte du Collectif des parties civiles pour le Rwanda (CPCR). "L'idée n'est pas d'échapper aux procédures", a souligné Mme Meilhac, "Nous avons l'espoir désormais que la justice française accélère le pas et l'entende car il n'y a rien de pire que de ne pas pouvoir se défendre".
Présent à l'audience, Alain Gauthier, président du CPCR, a également demandé que "le juge d'instruction prenne l'affaire en main sur la suite des 17 ou 18 autres dossiers car M. Rwamucyo n'est qu'un parmi d'autres". La justice française a récemment rejeté trois demandes d'extradition vers Kigali de Rwandais soupçonnés d'avoir pris part au génocide, arguant d'un manque de garanties accordées à la défense devant la justice rwandaise.
D'autres procédures d'extradition sont engagées par le Rwanda contre de présumés génocidaires rwandais en France. A Bordeaux, la décision de la chambre de l'instruction est attendue le 7 octobre concernant la demande d'extradition à l'encontre de Sosthène Munyemanan, un autre médecin rwandais accusé d'avoir participé au génocide de 1994. Cette décision intervient alors que par ailleurs les juges français en charge de l'enquête sur l'attentat contre l'avion du président rwandais Juvénal Habyarimana en 1994 sont à Kigali depuis dimanche où ils multiplient auditions de témoins et visites sur le terrain.
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