samedi 14 août 2010

RDC - Sur les traces de l’Onatra/ RVA : le front social en ébullition

(Le Potentiel 14/08/2010)
Ça bouillonne à la Régie des voies aériennes. Le climat social s’est sérieusement détérioré dans cette entreprise publique en transformation. Dans le rang des revendications, la suspension du contrat de stabilisation conclu en juillet 2008 entre le gouvernement et le groupement ADPI-KPMG. Jean Assice, qui assume depuis le 24 septembre 2008 les fonctions d’ADG pour le compte du groupement, est en mauvaise posture. Après l’Onatra, le plan de stabilisation traverse une zone de fortes turbulences à la RVA. Reste à savoir si la grogne sociale va en accélérer la fin, alors que le contrat court jusqu’au 14 décembre 2010, ayant été conclu pour 26 mois à compter de sa mise en œuvre, le 14 octobre 2008.
Les travailleurs de la Régie des voies aériennes (RVA), en cessation de travail depuis le jeudi 12 août 2010, s’en sont pris au groupement ADP INGENIERIE et KPMG (ADPI-KPMG) qui pilote depuis le 14 octobre 2008 le plan de stabilisation des activités de leur entreprise.
En interne, personne, en tout cas, ne croit en l’efficacité du programme proposé par ADPI-KMPG, avec l’aval du gouvernement, après avis favorable du Comité de pilotage de la réforme des entreprises du portefeuille (COPIREP). Tous jurent par l’arrêt de ce plan de stabilisation pour éviter un naufrage certain à la RVA, alors que le contrat liant le gouvernement au groupement français court jusqu’au 14 décembre 2010. Le contrat de stabilisation signé pour 26 mois prenant effet à la date de sa mise en œuvre, soit le 14 octobre 2008.
Le Copirep doit se mordre les doigts, lui qui a conseillé au gouvernement d’opter pour le plan de stabilisation pour une catégorie d’entreprises publiques.
La thérapie a été expérimentée pour la première fois à la Générale des carrières et des mines (Gecamines) avec Sofreco, cabinet français recruté sur concours par le Copirep. La tentative s’est soldée de la manière la plus catastrophique, déjouant tout pronostic au niveau du Copirep.
Sans désemparer, le Copirep est demeuré dans la logique du plan de stabilisation. La déroute de Sofreco n’aura donc eu aucun effet sur la tactique élaborée au quatrième étage de l’immeuble de la Sofide.
Aussi, les plans de stabilisation ont-ils été successivement étendus à d’autres entreprises du secteur de transport. La firme espagnole Progosa se verra confier l’Onatra, Vecturis héritera de la Société nationale des chemins de fer du Congo (SNCC) alors que le groupement ADPI-KMPG se chargera de la RVA.
« CHASSEZ LE NATUREL,… »
« Chassez le naturel, il revient au galop », rappelle un vieux proverbe. De la manière que la sagesse recommande qu’ « on ne change pas l’équipe qui gagne », le plan de stabilisation s’est clôturé piteusement à l’Onatra. Progosa qui s’en chargeait a dû évacuer – presqu’en catimini et plus d’une semaine avant le terme du contrat, le 21 juin 2010 ses experts mandatés à l’Onatra, laissant derrière lui une entreprise en ruines, plombée par une trésorerie au rouge.
Depuis deux jours, le vent de panique, qui a soufflé à l’Onatra jusqu’à emporter le contrat Progosa, secoue de manière virulente la RVA. Dans leurs revendications, les syndicalistes disent agir sur mandat du personnel de la régie et légitiment leur action par le souci de sauver l’entreprise. Le plan de stabilisation négocié avec ADPI-KPMG, disent-ils, a apporté plus de problèmes qu’il en a résolu.
Or, dans le contrat d’assistance technique signé entre ADPI-KPMG et la RDC, il était prévu, pour une durée de 26 mois, à compter de la date de mise en œuvre du contrat, que des experts du groupement assistent sur place la RVA dans ses missions de : concevoir, construire, aménager, exploiter et développer les 54 aéroports en charge, assurer la gestion et le contrôle de l’espace aérien.
La tension est donc vive à la RVA. Et, les revendications ont une toute autre tournure. Ainsi, outre le départ de Jean Assice et Hervé Warin, respectivement ADG et ADT, agissant depuis le 24 septembre 2008 sur mandat d’ADPI-KPMG, la délégation syndicale a étendu ses revendications à la rémunération, exigeant l’alignement des salaires versés aux agents au SMIG.
Approché par la presse, Jean-Paul Kalonda, président de la délégation syndicale de la RVA, ne cache pas sa désapprobation après deux ans de prestation d’ADPI-KPMG. « Le plan de stabilisation a été un véritable échec. Aujourd’hui, l’entreprise ploie sous une dette évaluée à plus de 30 millions de dollars américains. C’est cela l’héritage que va nous léguer Jean Assice », se désole-t-il.
La réplique de la direction générale n’a pas tardé. Sauf qu’en lieu et place de Jean Assice, ADG de la RVA, c’est l’un de ses ténors, de surcroît commandant de l’aéroport de Kisangani, qui s’est prêté hier vendredi 13 août au restaurant Super Aubaine aux questions de la presse. Les journalistes en sont sortis désabusés, car aucune réponse consistante n’a été apportée à leurs nombreuses questions.
La conférence de presse a davantage entretenu la nébuleuse sur les nombreuses revendications mises à charge de Jean Assice et son équipe. Le navire RVA sombre. Et, pendant ce temps, comme avec le naufrage du Titanic, le gouvernement fait semblant de jouer la valse alors que l’entreprise prend l’eau de tous bords.
LA COMPROMISSION
Preuve que le gouvernement n’est nullement ému par ce qui se passe actuellement à la RVA, certaines indiscrétions renseignent que, suivant le même mode opératoire, la REGIDESO et la SNEL, deux grandes entreprises du secteur de l’énergie, se préparent à passer sous régime d’un plan de stabilisation.
Pour la REGIDESO, l’avis de pré-qualification signé par la ministre du Portefeuille est explicite. « Le contrat de gestion – d’une durée de cinq ans - a pour objectif d’assister la REGIDESO dans l’amélioration des performances techniques et commerciales essentielles … en milieu urbain et de tendre vers son équilibre financier ».
Pourquoi une telle intransigeance alors que partout ailleurs, où les plans de stabilisation ont été mis en œuvre, les résultats se sont avérés négatifs à tout point de vue ? Le gouvernement tirerait-il un intérêt à la mise en œuvre des plans de stabilisation ?
La situation actuelle interpelle plus d’une conscience. Elle est la preuve de l’insouciance du gouvernement de voir réellement les entreprises publiques se relever. Tout semble avoir été planifié pour affaiblir davantage les entreprises publiques pour, finalement, les brader lorsque la déconfiture aura atteint son paroxysme.
On ne se leurre pas pour le dire. Les plans de stabilisation, élaborés par le Copirep comme stratégie transitoire pour la restructuration des entreprises publiques, ont échoué. La Gecamines en a donné la preuve, suivie ensuite par l’Onatra. Faute d’avoir réagi à temps pour arrêter l’hémorragie, la RVA fait actuellement face à la passivité du gouvernement à prévenir les faits.
A quatre mois de la fin contractuelle du contrat conclu entre le gouvernement et l’ADPI-KPMG, il y a lieu de diligenter en urgence un audit dans cette entreprise publique en transformation pour y évaluer l’apport d’ADPI-KPMG. On lui éviterait ainsi le sort que connaît la Gecamines, abandonnée brutalement par la Sofreco sans qu’aucun rapport n’ait été officiellement rendu public.
Même cas de figure aussi pour l’Onatra que les experts mandatés par Progosa ont, deux semaines avant la fin du contrat, abandonné, quittant la RDC incognito, sans rapport préalable sur les deux ans de gestion de cette entreprise.
Par conséquent, qu’est-ce qui empêcherait ADPI-KPMG de refaire le même coup à la RVA ?

Par Le Potentiel
© Copyright Le Potentiel

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire