mardi 17 août 2010

Le Cameroun, l’autre champion d’Afrique de la Corruption

(Alwihda 17/08/2010)
La fin du régime Biya est la seule issue pour le développement du Cameroun
Pour les sociologues la corruption est un phénomène social "normal". Surtout n’allez pas vous imaginez que la sociologie cautionne ce fléau, bien au contraire le "normal" renvoie ici a ce que l’on retrouve dans toutes les sociétés quelles qu’elles soient. A titre d’exemple, l’Amérique, et bien d’autres pays dits "développés" connaissent un certain degré de corruption.
Le "normal" est ce qui se retrouve dans toutes les sociétés mais a un niveau "contrôlable". Cependant quand un phénomène social sort de la "normalité" c'est-à-dire du "contrôle social" que sont la loi la police et toutes les institutions chargées du maintien de l’ordre social, et atteint un niveau "pathologique" là on parle de "déviance".
C’est donc le cas du Cameroun ou on peut affirmer juste au regard des faits sociaux quotidiens que notre pays est pour le moins "déviant". L’analyse de ce jour se focalisera sur un aspect de cette tare qui est partagée par tous les Camerounais sans exception : La corruption.
Nous allons donc essayer d’expliquer pourquoi ce phénomène est passé d’un niveau "normal" à une échelle "pathologique" voir "endémique" au Cameroun en nous basant sur la théorie de la motivation et des besoins d’Abraham MASLOW, qui est le précurseur de la psychologie transpersonnelle, branche de la psychologie qui dépasse ce qui concerne strictement la personnalité pour s’intéresser à la dimension spirituelle de l’homme et aux états de conscience exceptionnels.
La société est semblable au Corps humain
La société est comme le corps humain. Dans tout organisme, chaque organe a une fonction spécifique qui contribue cependant au fonctionnement de l’ensemble. A titre d’exemple le cœur ne peut survivre sans les poumons. Quand donc une partie du corps est malade, c’est tout le l’organisme qui souffre. Quand vous avez mal à la tête ou au pied, les autres organes sont affectés aussi.
Il en est ainsi de la société. Chaque institution de nos Etats a une un rôle, une fonction à remplir pour le bon fonctionnement de l’ensemble. Quand une institution ne joue pas son rôle, il contamine les autres institutions et la gangrène se propage. A un certain niveau le mal est tellement profond qu’il y a une implosion.
Dans le cas du corps humain ceci se traduit par la mort. Dans le cas des sociétés, c’est soit la disparition de toute une civilisation (Les civilisations Egyptiennes, Grecque, Nubiennes, Maya, Aztèques etc.), soit le retour à l’anarchisme de la guerre civile (RDC, Somalie, etc.) ou encore les génocides (Juif, Rwandais etc.).
Dans le cas du Cameroun, heureusement, pour l’instant on n’en est pas encore là mais pour combien de temps ? Cependant il faut être aveugle comme le régime Paul BIYA et ses trop fidèles "ministrons" et autres membres du RDPC, pour ne pas voir les symptômes de l’agonie de la société camerounaise.
La corruption est le symptôme le plus visible de notre pays. Comme une maladie extrêmement contagieuse, comme la peste elle s’est propagée à toutes les strates de la société au point de se métamorphoser en "Norme".
Au Cameroun c’est plutôt vous qui êtes qualifiés d’"anormal" si vous ne "voyez" pas le clerc qui reçoit votre dossier dans un quelconque ministère, ou encore si vous ne "farroter" pas le policier qui retient les dossiers de votre véhicule.
Au Cameroun avec 2000 Fcfa on peut se louer les services d’un homme en tenu pour aller "sissia" le citoyen lambda. Certains hauts dignitaires ont le pouvoir de vous mettre en cellule pendant des semaines ceci en bafouant tous les lois qui régissent les libertés civiles de tout citoyen. S’il y a bien un pays qui exécute exactement le contraire de ce qui est écrit dans sa devise c’est le Cameroun il n’y a en effet ni "paix" ni "travail" ni "patrie". Du moins certain travaillent et une minorité consomme.
La justice, un autre organe de notre chère société est tout autant infecté. Aucune institution n’échappe aucun corps de société n’en est épargné.
Quand j’étais à l’université de Yaoundé 1 par exemple dans les années 2001, c’était connu de tous que certains professeurs (pas tous) amortissaient les multiples coupures de salaires dont-ils ont été victimes sur les étudiants, en leur vendant les notes. Vous aviez beau étudiés que vos notes ne reflèteront jamais votre véritable niveau, surtout si vous aviez un certain nom. Imaginez les docteurs qui sortiront de nos facultés de médecine ? A votre avis pourquoi ces riches ne se soignent pas au Cameroun ? Ils savent comment leurs fils sont devenus docteurs.
Imaginons encore un instant les administrateurs qui sortiront de l’ENAM, ou encore les enseignants qui sortiront de l’Ecole normale car nous savons tous que l’entrée dans ces grandes écoles est conditionnée par l’argent et les "relations".
Pas donc étonnant que la corruption soit si démocratiquement rependue au Cameroun, car si l’on n’en est pas victime, on en est au minimum un acteur actif ou passif.
En effet nous les simples citoyens sommes aussi membres de ce "corps social" qu’est la société Camerounaise. La corruption n’est pas seulement l’affaire du gouvernement mais aussi de chaque citoyen qui l’encourage sciemment ou inconsciemment en acceptant comme une fatalité de "tchoko" chaque fois qu’il est confronté à une situation.
Dernièrement une Camerounaise a été assassinée par un élément des forces de l’ordre (ou du désordre) dans la capitale économique parce qu’elle a refusé de corrompre ce dernier. L’affaire a explosé en scandale mais a été étouffée par le Renouveau.
Imaginez un instant si chacun de nous s’opposait ainsi à cette injustice, comme l’avait fait ROSA PARK quand elle refusa de céder son siège à un blanc il y a de cela un demi-siècle ? Cela avait soulevé une grève générale des noirs américains qui aboutit a l’abolition de la ségrégation raciale aux USA. Je ne serais pas là à jouir de ce pays si cette dame n’avait pas dit NON.
Je sais que c’est facile de me tenir sur mon piédestal ici à Washington DC et de donner des leçons de morale à des camerounais qui sont parfois tellement pauvres que leur pain quotidien se résume parfois à un repas hebdomadaire. Ventre affamé a-t-il vraiment une oreille ?
Pour Abraham MASLOW tant que l’on a faim on ne peut développer les autres aspects de sa personnalité. Quel est donc le rapport de causalité entre pauvreté matérielle et corruption au Cameroun ?
Le cercle vicieux de la corruption : Tentative d’explication avec la théorie de MASLOW
On ne nait pas corrompu, on le devient. Beaucoup de Camerounais, à l’instar de l’actuel ministre de la communication du Cameroun, sont devenus par les forces des événements et la nécessité de survie, des corrupteurs.
Dès qu’une occasion s’est présentée ils sont passés du camp des "victimes" à celui des "bourreaux". Il serait facile de les condamner mais si on se penche sur les recherches du psychologue Abraham MASLOW, on peut avoir une explication.
MASLOW estime que les besoins élémentaires (physiologiques et de sécurité) étant satisfaits, la personne cherche ensuite à satisfaire les autres besoins d'ordre supérieur de façon à alimenter sans cesse les motivations. Un besoin d'ordre supérieur ne peut être satisfait que si les précédents le sont. Il distingue donc 5 niveaux hiérarchique de besoin à satisfaire pour sortir du cercle vicieux de la corruption dans n’importe quelle organisation humaine.
À la base, les besoins physiologiques (tels que la faim, la soif) ;
Ensuite, les besoins de sécurité et de protection (tels que le désir d'un toit ou d'une bonne assurance, de la police, justice) ;
Puis viennent les besoins d'appartenance, besoins sociaux qui reflètent la volonté de faire partie d'une famille, d'un groupe, d'une tribu, d’un pays ;
Ensuite arrivent les besoins d'estime de soi (qui permettent de se regarder dans le miroir le matin) ;
Enfin, apparaissent au sommet de la hiérarchie, les besoins d'auto-accomplissement (qui renvoient au désir de se réaliser soi-même à travers une œuvre, un engagement).
Quand on observe cette pyramide de besoins (dont la base sont les besoins physiologiques), on se rend compte que le régime en place maintient justement le camerounais ordinaire au niveau élémentaire des fondements de la santé psychique. Il nous affame.
Tout comme Louis XVI aux 18 siècles le Renouveau affame les masses Camerounaises en confisquant les ressources naturelles et financières du Cameroun, qu’il redistribue a une minorité de fidèles dont la seule devise est de chanter "Paul BIYA toujours Chaud Gars".
La hiérarchie des besoins de MASLOW signifie que l'homme n'atteint le plein développement de son psychisme que s'il est satisfait sur tous les plans : physiologie, sécurité, amour (appartenance), estime (reconnaissance) et accomplissement de soi (créativité), or justement la pauvreté du Camerounais est d’abord mentale, psychique. Certains hommes peuvent vivre dans le dénuement le plus totale et ne jamais céder psychologiquement.
Ne dites pas cela au Camerounais. Il vous demandera : "C’est ça que l’on mange" et avec raison car a l’heure où il vous demande cela il a justement faim. Ne soyons donc pas surpris que pour 5000 FCFA (10$) il aille voter 10 fois pour le RDPC lors des prochaines élections présidentielles.
Quand j’étais à L’université de Yaoundé 1 à Ngoa Ekelle, j’ai été témoin des cas d’achat de conscience des étudiants pas le MINEDUC (http://www.cameroon-info.net/stories/0,16232,@,universites-les-etudiants-ont-rencontre-le-minesup.html). Ce n’est pas la tentation qui manque. Il faut juste vivre au-delà des considérations matérielles et, ne nous mentons pas peu de gens peuvent le faire.
Si déjà le premier besoin qui est de manger et de boire n’est pas satisfait comme c’est le cas d’au moins 90% des camerounais on peut donc aisément comprendre pourquoi la corruption est tellement répandue au Cameroun. C’est une relation de causalité.
Le Camerounais n’est pas plus corrompu qu’un Tchadien ou un Américain. Le Camerounais n’est pas né corrompu, il l’est devenu sous un régime qui a élevé la pauvreté et la corruption au rang de programme politique. Le tribalisme est une autre conséquence de ce cercle vicieux.
Selon MASLOW les "besoins d’appartenances se traduisent par la volonté de faire partie d'une famille, d'un groupe, d'une tribu, d’un pays, d’une nation". Le renouveau encourage les Camerounais à se replier instinctivement vers leur groupe immédiat qui est leur tribu d’origine car ils sont conscients que si les Camerounais réalisaient qu’ils sont manipulés par une poignée de vautours qui se recrutent nationalement, et si ces derniers réalisaient que ce qui les unit est plus grand que ce qui les divise, alors les Camerounais en découdraient avec ce régime.
Le régime Biya a atteint son seuil de compétence
On dit vulgairement au Cameroun que "la plus belle fille du monde ne peut donner que ce qu’elle a" tout comme en sociologie on utilise parfois l’expression "seuil de compétence" pour schématiser les limites de tout un chacun.
En effet, le régime du renouveau du président ad vitam aeternam, Paul BIYA a atteint son seuil de compétence depuis le coup d’Etat manqué du 06 Avril 1984. Apparemment cet événement aurait eu des conséquences psychologiques beaucoup plus profondes sur le président actuel du Cameroun que l’on ne s’imaginait. Le premier président du Cameroun certes était un dictateur. Mais personne ne niera que les ministres n’étaient point milliardaires. Personne ne contestera que les routes étaient bitumées, les salaires étaient décents, le Cameroun s’offrait même le luxe d’assister la Corée du Sud.
Le renouveau par contre est un vendeur d’illusions. Nos grands-parents et parents ont crus en BIYA. Il incarnait la jeunesse, l’Avenir, la liberté. Au fil des années, il est devenu tellement despote qu’Hitler rougirait face à tant de malice. On dirait que Machiavel aurait écrit "Le Prince" directement BIYA, bien qu’au contraire de la pensée de Machiavel, il ne sert pas le peuple, mais lui-même et la France.
Prenons un exemple très simple. Selon la Banque Mondiale, à peine 6% des Camerounais ont un compte bancaire. Déjà dans les années d’après indépendance, nous étions à ce niveau comment donc expliquer que le Cameroun au lieu d’avancer sous BIYA recule ?
Pourquoi sous AHIDJO avec moins de ressources le Cameroun décollait au moins économiquement et sous BIYA, avec plus de ressources, nous reculons ?
Comment peut-on s’insérer dans ce monde avec un système bancaire qui date des années 60 ?
Pourquoi avons-nous encore un président aux méthodes de la guerre froide alors que nous sommes au 21ieme siècle?
Les législateurs dans les démocraties avancées ont justement limités les mandats des présidents parce qu’au-delà de deux mandats on devient au mieux un despote. BIYA s’est taillé une constitution sur mesure. Il est rééligible à l’infini.
Que peut nous offrir le renouveau quand son promoteur Paul BIYA est classée par "Foreign Policy" un organe respectable et du gouvernement américain et de l’ONU comme l’un des pires dictateurs du monde ?
Une fois de plus la réponse est simple Paul BIYA a atteint son seuil de compétence et seule la chute (par les urnes) de son régime brisera le signe indien de la corruption au Cameroun.
Conclusion
Il s’agissait d’expliquer dans notre analyse pourquoi le phénomène de corruption est passé d’un niveau "normal" à une échelle "pathologique" voir "endémique" au Cameroun en nous basant sur la théorie de la motivation et des besoins d’Abraham MASLOW.
Nous pouvons retenir que bien qu’il y ait une dépendance causale entre la survie biologique et la corruption au Cameroun, il n’en demeure pas moins vrai que certains braves camerounais préfèrent mourir dans la pauvreté matérielle que de prostituer leur conscience et leur santé mentale au régime pervers du RDPC.
Pius NJAWE était l’un des exemples de ceux qui sont parti de rien et sont accomplis grâce à la sueur de son front et ceci sans lécher les bottes du Renouveau. L’homme de chair est certainement faible. Mais il ne faut non pas plus sous-estimer le surhomme spirituel qui est en nous.
La fin du renouveau sera probablement le début d’un nouveau contrat social entre les Camerounais et le gouvernement, mais en attendant d’en arriver là disons non à la corruption.

Par Eric Roger TAGNE
(Alwihda) - 16 Août 2010
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