jeudi 5 août 2010

Finances publiques: le Fmi préoccupé par le cas du Cameroun

(Mutations 05/08/2010)
L’institution financière internationale relève des faiblesses dans la gestion des ressources financières.
«Les administrateurs se sont dits préoccupés par les faiblesses de gestion des finances publiques au vu de l’augmentation des obligations de paiement non réglées et du recours à la Société nationale des Hydrocarbures (Snh) pour financer des opérations de dépenses», écrivent les membres du conseil d’administration du Fonds monétaire international (Fmi), dans la note d’information publique rédigée le 22 juillet 2010, au terme des consultations de 2010 avec le Cameroun. «En outre, poursuivent-ils, la gestion des finances publiques s’est sensiblement détériorée, vue (…) la forte augmentation des ordonnancements non exécutés et des dépenses engagées et non ordonnancées mais pour lesquelles les services ont déjà été fournis».
Pour prévenir les risques de déséquilibre que font courir ces faiblesses sur le budget national, le Fmi recommande une prudence, une plus grande rigueur et une transparence dans la gestion de la trésorerie et des dépenses. «Il (est) essentiel de renforcer la gestion des dépenses et de la trésorerie afin de préserver la stabilité budgétaire et financière», lit-on dans la note d’information publique. En clair, il s’agit de limiter les dépenses, un plan de rigueur en somme. Même si le bailleur de fonds «juge essentiel de protéger les dépenses prioritaires d’investissement», option que le gouvernement avait déjà prise pour résorber la question de l’insuffisance des infrastructures qui plombe la croissance. Le train des mesures devra s’étendre à la poursuite de la réduction de la dette de l’Etat vis-à-vis des entreprises nationales.
Le Fmi salue d’ailleurs l’apurement par l’Etat d’une partie de sa dette due à la Société nationale de raffinerie (Sonara), au titre des subventions des prix des carburants à la pompe. Or pour y parvenir, il faut réussir à lever des fonds et faire des économies là où c’est possible. Le Fmi se veut clair, le Cameroun doit «éviter d’épuiser la marge budgétaire constituée des dépôts utilisables de l’Etat à la banque centrale régionale (La Beac, ndlr)». Or jusqu’ici, les recettes fiscalo-douanières n’ont pas encore atteint les prévisions. Les crises financière et économique mondiales ont privé l’Etat d’importantes recettes du fait de la baisse des cours des produits d’exportation et de la demande sur le marché international. Faut-il le rappeler, l’économie camerounaise reste largement otage des recettes d’exportations.
L’idée de cesser de subventionner même “progressivement» les produits pétroliers suivant les recommandations du Fmi, est au moins délicate pour le gouvernement qui doit se souvenir que c’est une énième hausse des pris à la pompe qui déclencha les émeutes de février 2008. Pris dans cet étau, le gouvernement est face à un dilemme: Suivre le «plan d’austérité» que lui propose le Fmi et risquer de compromettre son programme de dépenses d’investissements prioritaires et d’autres engagements financiers, ou ignorer au moins quelques unes de ces mesures et courir le risque de se «fâcher» avec l’institution financière internationale.
L’on annonce l’émission par le gouvernement d’un emprunt obligataire dans les prochaines semaines. Cette option, encouragée par le Fmi (qui recommande par ailleurs une amélioration du recouvrement des recettes fiscales) suffira-t-elle, à permettre au Cameroun de lever suffisamment de fonds pour répondre à ces besoins de financements des projets? L’Etat ne va-t-il pas l’accompagner d’un train de mesure d’austérité en opérant des coupes sur les dépenses de fonctionnement? Dans l’hypothèse d’une opération intégralement fructueuse, l’Etat va-t-il utiliser tous les fonds levés dans le cadre de cet emprunt seulement pour financer les projets structurants?
Le 02 juillet dernier, le ministre des finances Essimi Menyé publiait un communiqué qui rassurait de façon globale sur la bonne santé budgétaire et financière du Cameroun, après les conclusions des consultations du bailleur de fonds. La note d’information publiée par ce dernier incite aujourd’hui au scepticisme.

Serge D. Bontsebe
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