mardi 17 août 2010

Centrafrique - Bozize et le cinquantenaire en Centrafrique

(L'Indépendant (cf) 17/08/2010)
Le cinquantenaire des indépendances Africaines a produit et continu de produire diverses et intenses réactions. Les populations Africaines ployant pourtant sous le joug conjugué de la misère et de la pauvreté se sont tout à coup découvert un patriotisme suspect, cyniquement alimenté par une presse à la botte des régimes inaptes et autoritaires en place dans les différentes capitales Africaines.
Le résultat, une sorte de conformisme, de suivisme idéologique et intellectuel d’après lequel celui qui ne verrait autre chose que l’occasion de beuveries incontrôlées, d’orgies intellectuelles, de célébration innocentes serait contre sa nation, coupable d’apostasie politique et devrait être mis à mort sur le bucher d’un chauvinisme soudain et passager. Il est à noter que l’Afrique à la fin des années 80 a connut le même engouement à la faveur du retour du multipartisme.
François Bozize et son parti ont donc décidé de surfer sur la vague de ce patriotisme éphémère en multipliant les sorties. La première pour « diagnostiquer » le mal Centrafricain et la seconde beaucoup plus conventionnelle, à l’ occasion de son adresse au peuple du 13 Aout. Le silence est d’or affirme la maxime, Bozize le sait t’il ? , en tout nous le constatons.
La solennité de ce jour n’étant plus à démontrer, les Centrafricains dans leur ensemble attendaient plus de leur leader. Ils méritent mieux que cette sorte de politique spectacle, égoïste et inconséquente. Les interventions du président qui auraient du tourner autour de la réconciliation nationale, dans une nation subdivisée et compartimentée a plutôt été l’occasion pour le maitre de Bangui de faire étalage de « l’avancée » de la R.C.A depuis 2003. Avancée qu’il est d’ailleurs le seul a constaté. Hallucination de dictateur coupé de la vie réelle, de la « vraie vie » comme dirait le Centrafricain, ou manœuvre politique délibérée. La réalité Centrafricaine, elle, varie phénoménalement d’un individu à l’autre, d’un parti à l’autre et même pire, d’un groupe ethnique à l’autre. Il existerait d’un coté cette romantique réalité d’après laquelle la Centrafrique serait un vaste chantier ou coule le lait et le miel et de l’autre, celle plus désastreuse et grisâtre que vit journellement le peuple centrafricain.
Le pouvoir de Bangui une fois de plus a démontré ses carences, ses limites ainsi que son manque d’imagination. En ce faisant, il expose avec une clarté à éblouir un aveugle, aux Centrafricains la véritable cause de notre humiliant retard : la périlleuse institution d’une politique identitaire. Cette situation a finit de métamorphoser la nation en une superposition hétéroclite de congrégation s’éloignant chaque jour un peu plus l’un de l’autre. On ne discute qu’avec ceux qui pensent comme nous, qui sont de la même ethnie, ou du même parti politique, Transformant l’interlocuteur, l’adversaire, le frère Centrafricain aux idéaux divergents en ennemi public bon pour la géhenne. Tout ce que le président a pourtant feint de condamner dans son adresse à la nation du 13 Aout.
En effet, l’allocution présidentielle à la veille du cinquantenaire a manqué de maturité, de sagesse et par dessus tout de circonspection. La politique politicienne sarcastique et sardonique, n’avait point sa place en ce jour grandiose. La paix et le dialogue, socle et le piédestal sur lesquels il devrait s’appuyer pour rebâtir la RCA, ont été inscrits tous deux aux abonnés absents. L’harmonie républicaine en effet ne s’obtient point par le constant harcèlement de ses adversaires politique, mais plutôt par une politique d’apaisement, soulignée par des actions d’un symbolisme concret et sans ambigüité.
La gestion d’une nation n’est pas une affaire personnelle(contrairement à ce que pense le Président), elle concerne le peuple dans son ensemble, l’implication de tous serait donc l’idéal. L’existence d’une majorité, politique ne devrait aucunement se traduire par un diktat exclusif et pernicieux sur les autres groupes. Ni servir de plateforme au rejet systématique des aspirations de la minorité, ou encore être un prétexte pour la mise en place d’une politique dont la rapacité retarderait indubitablement toute tentative de développement. L’état de déliquescence moral et infrastructurel dans lequel se trouve la nation en est une illustration parfaite. Nous avons une destinée commune, Personne ne pourra vivre en paix sur un ilot d’opulence en plein milieu d’un océan de pauvreté. Le devoir du président est de faire en sorte que nous ne perdions jamais cela de vue.
Sa majesté Bozize 1er a préféré comme à l’accoutumé lancer la pierre sur ces prédécesseurs. Aucun d’eux n’a connu grâce à ses yeux. Fustigeant les pratiques tribalistes des uns à la gestion malhonnête des autres. Il se pose avec une fierté à peine feinte comme le sauveur de la nation. 2003 serait pour lui est l’année par laquelle tout a débutée, insultant au passage l’intelligence des Centrafricains, il oublie sciemment la main de fer de sa famille sur le pays tout entier et en particulier sur les ministères et les postes stratégiques tel que celui de l’armée (son fils) qui serait alimenté par les industries extractives où siège son neveu. La sécurité nationale vient d’ailleurs de voir l’entrée sur scène du dernier en date à la tête de l’organe chargé de la délivrance des passeports. Chacun de nous a encore en mémoire les malheureux incidents survenus en Allemagne. Nul n’est donc blanc comme neige et la notion de l’intérêt nationale devrait primer sur les mesquins jeux politiques.
Les festivités elles même auront lieu dans 4 mois. Espérant que jusque là le président reviendrait sur sa position et fera de ces festivités ce qu’elles sont vraiment. Une occasion de réunion et d’échanges entre Centrafricains de toutes les couches sociales, de toutes les confessions religieuses et surtout de différents partis politique.
Car il est parfaitement sain que dans une nation de 5 millions d’âmes, d’autres individus que les « Bozize » puissent aspirer à la magistrature suprême, ce que ne semble pas accepter ou comprendre le président de la république.
Dernier mot, le président n’a pas une seule fois fait mention de la bonne gouvernance dans son allocution, omission sincère ou perfide négligence ?

Source: Zohoko.net
Lundi 16 Août 2010
Christian Touaboy
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