mercredi 7 juillet 2010

Madagascar - L'exhumation, une coutume encore respectée à Madagascar (REPORTAGE)

(Xinhuanet 07/07/2010)
En voyageant sur les routes nationales de Madagascar du mois de juillet au mois d'août, on trouve chaque année des familles en mêmes tenues vestimentaires dansant, buvant et portant sur leurs épaules des dépouilles emballées de linceuls.
C'est l'exhumation ou retournement des morts, connue en langue malgache "Famadihana", un rituel funéraire faisant partie des us et coutumes malgaches encore respectés dans le pays, accordant une importance particulière aux ancêtres défunts.
Un anthropologue malgache, Rakotoson Gérôme, a dit à Xinhua que l'exhumation signifie généralement soit emballer de nouveaux linceuls les dépouilles, soit rapatrier une personne enterrée dans une autre cimetière vers son tombeau familial, mais les rites changent suivant l'ethnie.
Rakotoson Gérôme a distingué que pour les malgaches, l' enterrement fait passer une personne dans le monde des vivants à celui des morts, tandis que l'exhumation fait entrer le défunt dans le monde des ancêtres et lui confère son pouvoir protecteur.
Selon cet anthropologue, les malgaches croient que les défunts peuvent encore s'interférer dans la vie de ses héritiers et ils peuvent donner leur bénédiction aux membres de la famille encore en vie.
Ce spécialiste de la culture malgache a expliqué que quelquefois, l'exhumation est déclenchée par un membre de famille, qui songe qu'un défunt se sent avoir froid. Ce membre de famille alerte toute la famille pour qu'une exhumation sera organisée. Si la famille accepte, un devin astrologue est consulté pour déterminer la date propice de la cérémonie.
Un grand père de famille, Dadazafy, qui vient d'organiser une exhumation samedi dernier, a dit à Xinhua, que sa famille s'est organisée pour partager les dépenses, environ 3000 dollars. Il a dit que la dépense est grandiose car la famille invite toute sa connaissance, à peu près 300 à 400 personnes, à leur rendre honneur pendant ce grand événement familial.
Ce grand père a exprimé que l'exhumation est une occasion pour tous les descendants d'une même famille de se connaître, donc les descendants des défunts mettent des tenues vestimentaires identiques permettant leur distinguer des invités ou d'autres descendants.
Dadazafy a indiqué que sa famille a organisé des festivités pendant les trois jours de ce grand événement familial. Elle a servi à toutes les convives le "vary be menaka", plat de riz accompagné de viande de porc ou de boeuf bien grasse, ainsi que le "toaka gasy", un rhum de fabrication artisanale, à base de canne à sucre ou de tamarin.
Au jours "J" de la cérémonie, avant de faire sortir du tombeau les dépouilles, l'orateur prononce ses discours "kabary", en utilisant des adages, des proverbes et des cantiques, une autre coutume très célèbre à Madagascar.
Une fois les dépouilles sont sorties du tombeau familial, leurs descendants passent au remplacement des linceuls. En réalité, on n' enlève pas les vieux linceuls, on met directement les nouveaux sur les anciens linceuls, a expliqué Dadazafy.
"On ne peut pas pleurer, mais ceux qui ne peuvent retenir leurs larmes devront le faire en toute discrétion car l'exhumation est plutôt une fête qu'un rite funéraire," a-t-il dit.
Après l'emballage des corps, les descendants des défunts marquent ensuite leur communion avec leurs ancêtres en tournant sept fois autour du tombeau en dansant tout en portant sur leurs épaules les corps des défunts récemment exhumés.
Après ces rites, les corps sont remis à leur place dans le tombeau familial et les descendant demandent à leurs ancêtres joie et prospérité.
Un autre anthropologue, Mihajasoa Christian, a dit à Xinhua que les malgaches croient que tous les objets utilisés lors de la cérémonie de l'exhumation deviennent sacrés. Il a pris un exemple que les femmes stériles croient à la fin de la cérémonie qu'elles donneront naissance à un enfant en s'appropriant seulement d'un bout des nattes, qui ont été en contact avec les défunts.
L'anthropologue a expliqué qu'en générale, l'exhumation se fait chaque sept ans mais elle connaît quelques variantes suivant les régions où elle est pratiquée. Dans la partie ouest du pays, elle doit avoir lieu un an après l'enterrement, alors qu'à l'est, elle se déroule dans les deux ou trois ans suivant l'enterrement.
Les betsileo, une tribu à Fianarantsoa, 500 kilomètres au sud de la capitale, ne font pas sortir les corps des défunts du tombeau familial mais ils leur apportent juste de nouveaux linceuls, tandis que les vezo, une autre ethnie du sud ouest, ne pratiquent pas de l'exhumation comme tous les malgaches, a-t-il dit.
Mihajasoa a statué que selon la croyance malgache, l'exhumation permet aux malgaches de toujours bien agir car les ancêtres n'aideront jamais et ne béniront jamais une mauvaise personne.
Pourtant, l'organisation d'un tel festin, coûte cher, selon Mihajasoa, et quelques fois entraîne des mésententes entre les membres des familles car quelquefois la famille impose à chaque membre de payer une grosse somme d'argent alors que certains membres n'ont pas la possibilité de payer une telle somme.

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